Profils hématologique et biochimique du drépanocytaire

INTRODUCTION

La drépanocytose est une maladie génétique à transmission autosomique récessive due à une anomalie de structure de l’hémoglobine qui aboutit à la formation d’une hémoglobine S (HbS). Elle associe trois grandes catégories de manifestations cliniques, dont l’anémie hémolytique chronique, les phénomènes vaso-occlusifs, la grande susceptibilité à l’infection, avec une grande variabilité d’expression clinique selon les individus atteints. Les porteurs du trait drépanocytaire (patients hétérozygotes AS) sont asymptomatiques. Les formes expressives de la maladie sont les situations d’homozygotie SS ; de double hétérozygotie SC, SD Punjab, Sβ thalassémique, SO Arab [1]. Des études récentes ont démontré que 300 000 enfants drépanocytaires naissent chaque année à travers le monde dont les ¾ en Afrique subsaharienne [2]. La morbidité chez le drépanocytaire a été bien documentée dans les pays développés dans le cadre de la «cooperative study of sickle cell disease » aux USA et en Jamaïque.

Paradoxalement, très peu d’études de recherche ont été conduites en Afrique ou plus de 230 000 enfants drépanocytaires naissent chaque année. Les données de base concernant le profil clinique et biologique du drépanocytaire dans un contexte subsaharien deviennent alors une nécessité.Par ailleurs, la coexistence d’anomalies génétiques en particulier le déficit en G6PD érythrocytaire et la drépanocytose contribuerait, sans nul, doute à un profil particulier dont les contours demeurent encore non connus.L’histoire naturelle des formes expressives de la drépanocytose révèle que le risque d’infections graves bactériennes ou parasitaires est élevé et représente une cause majeure de décès dans la première enfance chez le drépanocytaire Le paludisme est une parasitose due à un hématozoaire du genre Plasmodium,transmis à l’homme par la piqûre d’un moustique du genre Anopheles.Cinq espèces plasmodiales sont inféodées à l’homme à savoir : P. falciparum, P. vivax, P. ovale, P. malariae et P. knowlesi. Ce dernier estparticulièrement retrouvé chez les singes (macaques) d’Asie. Cependant des cas d’infections ont été récemment signalés chez l’homme. Ces cinq espèces diffèrent par leurs caractéristiques biologiques, cliniques, leur répartition géographique et leur capacité à développer des résistances aux antipaludiques. P. falciparum est l’espèce la plus redoutable car responsable des formes cliniques sévères voir fatales de la maladie. En 2009 encore le paludisme reste la première endémie parasitaire mondiale.

Le nombre d’accès palustres survenant chaque année à travers le monde semble diminuer, il est estimé entre 250 et 500 millions, entrainant la mort d’environ 750000 à 1 million de personnes, parmi lesquelles une majorité de jeunes enfants vivant en Afrique sub-saharienne.Le paludisme représente une charge financière énorme pour les populations et par conséquent la maladie constitue un obstacle au développement des pays concernés, notamment en Afrique [4]. Au Mali comme dans les autres pays de la sous région, le paludisme constitue la première cause de mortalité [6]. Des études récentes ont montré qu’en Afrique subsaharienne le taux de mortalité infantile est passé de 184 à 144. Au Mali il est passé de 249 à 191 [7].L’étiologie exacte de ces décès demeure peu ou pas connue. La distribution géographique du gène responsable de la drépanocytose coïncide largement avec celle des zones d’endémie palustre ou ayant un passé de paludisme [8].A cet effet, la mortalité dans des zones d’endémie palustre mérite d’être évaluée avec précision. Très peu d’études ont porté sur l’évaluation de la prévalence du paludisme chez le drépanocytaire majeur faute de cohorte de malades dépistés et régulièrement suivis.Le trait drépanocytaire a été longtemps associé à la protection contre les formes cliniques de paludisme. On a aujourd’hui des évidences pour soutenir cette affirmation.

La première est d’ordre épidémiologique : les plus hautes fréquences du trait drépanocytaire se superposent avec celles du paludisme à Plasmodium falciparum. La deuxième est clinique : selon une étude portant sur une cohorte de plus de 1000 enfants au Nigéria, Aido et al montrent un avantage de survie des sujets porteurs du trait drépanocytaire par rapport aux enfants non drépanocytaires. [9]. Paradoxalement, une étude récente a démontré que le trait drépanocytaire favoriserait de façon significative la transmission du paludisme [10]. A ce jour, un risque accru de décès lié au paludisme chez le drépanocytaire majeur en zone d’endémie palustre a été suggéré [11]. Les études supportant cette hypothèse demeurent peu concluantes. Cependant, nul ne doute que le drépanocytaire pourrait développer la forme sévère et fatale du paludisme. L’évidence d’une plus grande susceptibilité au paludisme des drépanocytaires n’existe pas. La détermination exacte du risque de décès lié au paludisme chez le drépanocytaire est une nécessité pour plusieurs raisons : du point de vue des perspectives, de stratégies, la détermination d’une association entre la drépanocytose et les décès de paludisme justifierait la création de programmes de dépistage précoce de la drépanocytose et l’instauration d’une stratégie de prévention antipaludique ciblée ;au cas où le risque spécifique de décès lié au paludisme chez le drépanocytaire n’est pas élevé, une approche alternative de la prophylaxie et du traitement doit être conçue.

Le paludisme peut être à l’origine d’une aggravation de l’anémie chez le drépanocytaire. Sa survenue pourrait être responsable d’une modification des paramètres hématologiques et biochimiques. Il serait donc important de savoir l’impact de l’infection palustre sur ces paramètres chez le drépanocytaire.La création d’un Centre de référence comme celui de Bamako s’inscrit dans le cadre de l’amélioration de la qualité de vie du drépanocytaire. En Afrique subsaharienne peu d’études se sont intéressées à la prévalence du paludisme chez le drépanocytaire et son impact sur son profil biologique. Le CRLD apparait comme une structure appropriée pour bien documenter la prévalence du paludisme et son impact sur le profil biologique du drépanocytaire, d’où la nécessité de conduire cette étude.

Au plan méthodologique

Il a été clairement montré qu’un suivi médical régulier, améliorait considérablement la survie et le confort du drépanocytaire. En Afrique où naissent entre 150 000 et 300 000 enfants drépanocytaires homozygotes par an, très peu d’études ont porté sur la relation entre le paludisme et la drépanocytose majeure[13]. Cependant, l’ampleur du problème est une évidence dans le contexte Sub-saharien. L’histoire naturelle des formes expressives de la drépanocytose révèle que le risque d’infections à P. falciparum est élevé et représente une cause majeure de décès dans la première enfance chez le drépanocytaire. Le choix du Centre de recherche et de lutte contre la drépanocytose se justifie par l’existence d’une cohorte de drépanocytaires régulièrement suivis. Ce travail s’inscrit dans le cadre de la détermination de l’impact de l’infection à P.falciparum chez le sujet drépanocytaire usager du Centre de recherche et de lutte contre la drépanocytose de Bamako. Il testait l’hypothèse selon laquelle, le paludisme modifierait les paramètres hématologiques et biochimiques chez le drépanocytaire. L’étude a concerné les drépanocytaires tous âges et sexes confondus pour lesquels un consentement éclairé écrit a été obtenu.

Le diagnostic de la drépanocytose a été effectué par HPLC et les paramètres biologiques (hématologiques et biochimiques) ont été réalisés au laboratoire de biologie clinique et de recherche du centre de recherche et de lutte contre la drépanocytose de Bamako. La recherche systématique de P. falciparum a été faite par la technique de la goutte épaisse. L’étude a porté sur 584 drépanocytaires régulièrement suivis. L’analyse des tranches d’âge de la population d’étude montre que la majorité des drépanocytaires inclus dans l’étude étaient d’âge compris entre 0 et 15 ans avec 56 ,68% (n = 331). Le sexe féminin était prédominant avec 56,5%.

Typologie

Notre étude a porté sur une population de 584 drépanocytaires majeurs repartis en quatre phénotypes à savoir, 331 homozygotes SS soit 57%, 204 hétérozygotes SC soit 35%, 34 Sβ +thal soit 6% et 15 Sβ 0thal soit 3%. La superposition géographique de distribution du gène S et celle du paludisme est à l’origine de plusieurs théories sur les relations entre drépanocytose et paludisme. La première théorie, celle de Haldane en 1949 et argumentée par Allison en 1954 plaide pour la sélection naturelle des sujets hétérozygotes AS vis-à-vis du paludisme. Cependant, les travaux fondamentaux sur l’invasion de l’érythrocyte par le P. falciparum n’ont pas montré de particularités pour l’érythrocyte drépanocytaire. Ainsi, l’étude de la fréquence de l’infection palustre par P. falciparum selon le phénotype hémoglobinique a permis d’observer un taux d’infection à 2,4% pour les homozygotes SS ; 3% pour les hétérozygotes SC et 0% pour les sujets S/β-thalassémiques. Il apparait que le taux d’infection ne différait pas entre les sujets SS et SC. Par contre aucun cas d’infection palustre n’a été observé chez les sujets S/thalassémiques. Ces résultats montrent bien que les drépanocytaires en particulier les sujets SS et SC font bien le paludisme à P. falciparum. Plusieurs études sur la relation entre le paludisme et la drépanocytose ont été conduites dans différentes zones géographiques et bioclimatiques [12]. Très peu d’entre elles ont porté sur les modifications biologiques associées à cette association.

Données biologiques et biochimiques

L’analyse de données biologiques en particulier biochimiques au cours de l’infection palustre du sujet drépanocytaire montre que quelque soit lephénotype considéré, et malgré l’utilisation du fer par les micro-organismes en particulier le P. falciparum pour assurer sa croissance, nous n’avons pas observé de carence martial mais une ferritinémie basse chez les sujets SC. Ces résultats obtenus pourraient s’expliquer par la faible proportion de drépanocytaires infectés. Cette ferritinémie basse chez les SC pourrait s’expliquer par les saignées induites chez ses sujets. Ce qui ne nous a pas permis d’observer une modification significative du taux de ferritinémie. Cependant, une ferritinémie significativement augmentée chez le drépanocytaire du fait de l’hyperhémolyse entrainant une hyperabsorption intestinale se traduisant par une transferrine saturée en fer a été signalée par certains auteurs [13]. Les complications hépatiques sont souvent à craindre au cours de la drépanocytose. Le dosage de la LDH constitue un des marqueurs de cette complication. Par ce travail nous avons voulu vérifier si l’infection palustre modifiait le taux de LDH chez le drépanocytaire.

Les résultats de cette exploration n’ont pas montré de modifications significatives associées à l’infection palustre chez le sujet drépanocytaire quelque soit le phénotype considéré.Un taux significativement plus élevé de la créatinémie a été observé chez les sujets homozygotes SS (P<0,001), mais pas chez les sujets drépanocytaires SC. Au cours de notre étude, nous n’avons pas observé de modification de la glycémie au cours de l’infection palustre.Une réduction significative du taux de potassium au cours de l’infection palustre était observée chez les sujets SS, mais pas chez les sujets SC. Il semble qu’une condition intracellulaire particulière comme la réduction du taux depotassium intracellulaire influencerait la croissance du P. falciparum. Plusieurs hypothèses en faveur d’une consommation du potassium par le P. falciparum ont été émises dont la plus connue est celle de Friedman [14]. L’étude de l’impact du paludisme sur le taux de calcium chez le drépanocytaire montrait une augmentation significative de celui-ci chez le drépanocytaire SS (P=0,002) mais pas chez le sujet SC (P=0,33). Par contre un taux de magnésium faible a été observé chez le sujet SS au cours de l’infection palustre. Il apparait de ces résultats que les modifications biologiques étaient observées surtout chez les drépanocytaires SS mais pas chez les hétérozygotes SC.L’étude de l’hémogramme montrait que seul le taux de leucocytes et le nombre de globules rouges étaient significativement augmentés au cours du paludisme chez le drépanocytaire. L’absence de sujets S/beta-thalassémiques infectés ne nous a pas permis de déterminer le profil biologique de ces drépanocytaires au cours du paludisme.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela clepfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières

I. INTRODUCTION
II. OBJECTIFS
III. METHODOLOGIE
IV. RESULTATS
V. COMMENTAIRES ET DISCUSSION
VI. CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
VII. REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
VIII. ANNEXES

Profils hématologique et biochimique du drépanocytaireTélécharger le rapport complet

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *