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La culture et la créativité comme outils de développement et de valorisation des territoires : les concepts de ville créative et de « classe créative »
La ville créative : une utopie séduisante
La « classe créative » et ses limites
Bien que R. Florida (2004 et 2005) se défende de promouvoir une vision élitiste de la créativité et du développement urbain et économique, l’appropriation et l’application de ses théories par les décideurs politiques favorisent le renforcement des inégalités et des ségrégations sociales : « Dans les faits, les politiques municipales qui sont tirées des théories de Florida ont pour effet de promouvoir l’attraction et la rétention des élites, souvent aux dépens d’autres actions plus concrètes et moins visibles » (Shearmur, 2010, p. 114). La théorie de R. Florida sert ainsi de légitimation à des politiques visant la gentrification des centres villes par des aménagements susceptibles d’attirer la « classe créative » (Rousseau, 2009 ; Vivant, 2009).
De manière générale, le modèle de la ville créative est critiqué pour ses effets amplificateurs de la fragmentation sociale et spatiale des espaces urbains. La ville créative « renvoie les groupes qui ne font pas partie de la creative class (soit 80 % de la population selon les comptes estimatifs de R. Florida) à vivre dans une autre ville » (Saez, 2010, p. 33). Dans la ville créative, les formes de développement créatif ont tendance à rester enfermées dans des enclaves urbaines sans que les retombées positives ne se diffusent à l’échelle métropolitaine (Besson, 2010). Sous le couvert d’un vocabulaire séduisant valorisant la créativité et la culture, les décideurs politiques mobilisant la ville créative contrent la critique artiste (Boltanski et Chiapello, 1999) et justifient des stratégies favorisant les élites au détriment du reste de la société. Ainsi, « de nouveaux mécanismes de discrimination sociale et spatiale se dessinent sous le paravent esthétique de la « ville créative » » (Besson, 2010, p. 6).
La mise en application du modèle de la ville créative dessine une ville fragmentée composée d’archipels créatifs isolés du tissu urbain environnant. La « classe créative » prendrait place dans des enclaves, sortes de bulles créatives, dont seraient exclus les autres. Le critique d’art Brian Holmes interroge la pertinence de ce modèle d’organisation socio-spatiale en prenant l’image du parc plutôt que de la bulle : « Nous autres intellectuels, artistes et bohémiens, membres incertains d’une classe ascendante, pouvons-nous continuer d’habiter un rêve urbain – de « vivre et travailler dans le parc » – dans la plus parfaite inconscience du nouveau jeu d’inclusion/exclusion qui se dessine à l’échelle mondiale, sous le couvert esthétique de la « ville créative » ? » (Holmes, 2005, p. 100).
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Table des matières
Introduction générale
Partie 1. Quartiers créatifs et club. Fondements théoriques
Chapitre 1 : Les quartiers créatifs. Ancrages territoriaux de clusters d’activités culturelles et créatives
Chapitre 2 : Le club. Entre fondements théoriques, enjeux socioéconomiques et entrées analytiques
Chapitre 3 : Une méthodologie qualitative centrée sur l’analyse des pratiques, des représentations et des réseaux des travailleurs créatifs
Partie 2. Du quartier ouvrier au quartier créatif : évolution et construction de clusters créatifs ancrés territorialement. Le cas des quartiers des Olivettes (Nantes), du Panier (Marseille) et Berriat (Grenoble)
Chapitre 4 : Situations géographiques et trajectoires évolutives de trois quartiers créatifs. Terreaux et prémices de la clubbisation aux Olivettes, au Panier et à Berriat
Chapitre 5 : Les quartiers créatifs des Olivettes, du Panier et Berriat : concentration spatiale et mise en réseau des travailleurs créatifs
Partie 3. Le club comme modèle d’organisation des travailleurs créatifs au sein des quartiers créatifs
Chapitre 6 : Les quartiers créatifs : des paniers de biens réservés aux ayants droit. Premiers éléments du club de travailleurs créatifs
Chapitre 7 : Définition des membres et appropriation identitaire de l’espace. Seconds éléments du club de travailleurs créatifs
Partie 4. Le club et ses impacts sur les territoires et les travailleurs créatifs. Un catalyseur ou un fossoyeur de la cohésion sociale et de l’innovation dans les quartiers créatifs ? 308
Chapitre 8 : Entre construction d’un commun ouvert et édification d’une bulle créative fermée : réalités sociales du club de travailleurs créatifs
Chapitre 9 : Apports du club et des sous-clubs aux travailleurs créatifs : de la stimulation des dynamiques créatives collectives à l’entre-soi et l’enfermement
Conclusion générale
Bibliographie
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