Généralités sur les acrosyndromes
Un acrosyndrome vasculaire est une pathologie des extrémités (principalement doigts et orteils, mais également nez et oreilles) d’origine circulatoire. Il peut être lié à un trouble fonctionnel vasomoteur (vasoconstriction ou vasodilatation exagérée) ou à un trouble organique de la micro ou de la macro-circulation (1). L’acrosyndrome peut constituer une maladie à part entière ou être un symptôme reflet d’une pathologie systémique. On distingue :
– Les acrosyndromes vasomoteurs paroxystiques :
o le phénomène de Raynaud
o l’érythermalgie
– Les acrosyndromes vasomoteurs permanents :
o l’acrocyanose
o l’acrorhigose
– Les acrosyndromes trophiques :
o l’ischémie digitale permanente sévère
o les nécroses digitales
o les engelures
o l’hématome spontané des doigts
o le syndrome de l’orteil bleu.
Les acrosyndromes avec vasoconstriction représentent la majorité des acrosyndromes en pratique clinique avec notamment une prévalence élevée en France pour le phénomène de Raynaud, l’acrocyanose et les engelures (1). L’interrogatoire et l’examen clinique sont fondamentaux pour orienter le diagnostic et le bilan étiologique qui en découle en raison de l’exhaustivité des étiologies possibles en particulier dans le cadre du phénomène de Raynaud et des acrocyanoses (3). Les engelures ne présentent, quant à elles, que rarement des causes secondaires.
Le phénomène de Raynaud
Définition
Le phénomène de Raynaud a été décrit pour la première fois en 1862 par Maurice Raynaud. Il décrivait un phénomène d’attaque transitoire et réversible, de changement de couleur déclenché le plus souvent par le froid et attribué à un mécanisme ischémique (4). La définition actuelle correspond à un trouble vasomoteur dû à la contraction temporaire et réversible des vaisseaux sanguins (vasoconstriction) le plus souvent en réaction au froid – plus rarement à une émotion ou à un stress – et caractérisé par une ischémie paroxystique des extrémités (touchant principalement les doigts et parfois les orteils, les oreilles ou le nez) .
La crise se déroule habituellement en 3 phases :
– La phase ischémique dite syncopale : blanche et froide, elle est parfois totalement isolée. Elle s’accompagne d’une sensation de « doigts morts » ou d’hypoesthésie.
– La phase dite asphyxique : inconstante, aspect des doigts bleus. Elle témoigne le plus souvent d’une forme sévère.
– La phase de récupération : doigts tuméfiés, rouges et douloureux, avec possibles dysesthésies parfois douloureuses.
Les formes répondant strictement à cette définition sont rares. Cependant, la phase syncopale est nécessaire pour poser le diagnostic (6). Les crises typiques surviennent chez environ 1/3 des phénomènes de Raynaud primaire et 2/3 des phénomènes de Raynaud secondaires. Il est important d’un point de vue étio-pathogénique de différencier le phénomène de Raynaud primaire lorsqu’il est simplement le reflet d’un trouble de la thermorégulation secondaire à une vasoconstriction excessive des extrémités, le plus souvent en réaction au froid ; du phénomène de Raynaud secondaire, symptôme d’une maladie systémique. Les causes du phénomène de Raynaud secondaire sont très variées et leur physiopathologie souvent incomprise.
Épidémiologie
Le phénomène de Raynaud est le plus fréquent des acrosyndromes vasculaires paroxystiques. Sa prévalence en France est estimée entre 5 et 15% de la population générale avec des variations importantes selon les études et la région de France explorée (16, 17,18). La prédominance féminine est très nette avec un sexe ratio de 4 femmes pour 1 homme (19). Le phénomène de Raynaud primaire est de loin le plus fréquent même si l’estimation exacte est compliquée en raison de biais importants de recrutement selon les études : sur l’ensemble des phénomènes de Raynaud, on estime qu’environ 12% seraient des phénomènes de Raynaud secondaires. Par ailleurs, on estime qu’environ 10% des phénomènes de Raynaud initialement qualifiés de primaire évoluent vers un phénomène de Raynaud secondaire (20).
Physiopathologie
La physiopathologie du phénomène de Raynaud est très complexe et encore incomplètement comprise ; plus particulièrement dans le cadre du phénomène de Raynaud secondaire (21, 22). Elle est illustrée sur la figure 2a et la figure 2b. Sur le plan anatomique, la circulation sanguine digitale se décompose en deux parties distinctes (23) :
– les anastomoses artério veineuses (AVA) : rôle important dans la thermorégulation
– les anses capillaires : rôle nutritionnel .
La vasoconstriction cutanée, qui survient sous l’influence de facteurs neurogènes centraux et périphériques, réduit donc considérablement le flux sanguin cutané. Lors de l’exposition au froid, la vasoconstriction cutanée permet de réduire la perte de chaleur et la chute de la température corporelle (24). La réduction du flux sanguin cutané au niveau des anastomoses artério veineuses limite la perte de chaleur sans altérer le flux sanguin nutritionnel. Il n’y a pas de vasoconstriction des anses capillaires. Chez les patients présentant un phénomène de Raynaud primaire, il existe une exagération de la réponse normale au froid avec une réduction du débit sanguin à la fois dans les anastomoses artério veineuses et dans les anses capillaires. Le mécanisme en cause fait intervenir une augmentation sélective des récepteurs alpha-2-adrénergiques et alpha 2cnoradrénergiques dans les cellules musculaires lisses vasculaires dont l’expression entraîne un effet vasoconstricteur périphérique. Cet effet est majoré lors de l’exposition au froid à l’origine des symptômes du phénomène de Raynaud (25).
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Table des matières
Introduction
1. Préambule
1.1 Généralités sur les acrosyndromes
1.2 Le phénomène de Raynaud
1.2.1 Définition
1.2.2 Critères diagnostiques
1.2.3 Épidémiologie
1.2.4 Physiopathologie
1.2.5 Traitement
1.3 Acrocyanose
1.3.1 Définition
1.3.2 Critères diagnostiques
1.3.3 Épidémiologie
1.3.4 Physiopathologie
1.3.5 Traitement
1.4 Engelures
1.4.1 Définition
1.4.2 Critères diagnostiques
1.4.3 Épidémiologie
1.4.4 Physiopathologie
1.4.5 Traitement
1.5 Obésité et chirurgie bariatrique
1.5.1 Généralités sur l’obésité
1.5.2 Chirurgie bariatrique
1.5.3 Les différentes techniques chirurgicales
1.5.4 Rôle du tissu adipeux dans la thermorégulation
2 Introduction
2.1 Généralités
2.2 Problématique et objectif de notre travail
3 Matériel et méthode
3.1 Type d’étude
3.2 Participants
3.3 Méthode
3.4 Cadre réglementaire
3.5 Analyse statistique
4 Résultats
4.1 Population d’étude
4.2 Résultats]
5 Discussion
5.1 Analyse des résultats
5.2 Limites
5.3 Perspectives
6 Conclusion
7 Bibliographie
8 Annexes
