CONNAISSANCES ANATOMIQUES ET DE LA REEDUCATION PERINEALE

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Les traitements de l’incontinence urinaire

Les différents traitements de l’IUE sont bien codifiés et ont fait l’objet de recommandations pour la pratique clinique (7) :
• La rééducation périnéale est le traitement de première intention en cas d’IUE ; elle permet de prendre conscience et renforcer le plancher pelvien (6). Cette rééducation fonctionnelle ne doit pas être prolongée au-delà d’une quinzaine de séances si elle a été bien menée et n’a pas montré d’efficacité (2). Dans le cadre d’une IUE, une rééducation par des exercices de contraction volontaire éventuellement associée à du biofeedback et à une électrostimulation (en cas de défaut de contraction volontaire) est adaptée. Les exercices de contraction volontaire du périnée visent à augmenter la force de contraction des muscles pelvi-périnéaux pour compenser l’augmentation de la pression abdominale lors de l’effort. Le biofeedback qui consiste à introduire une sonde « réceptrice » dans le vagin, permet à la patiente de visualiser l’intensité des contractions qu’elle réalise et d’améliorer sa proprioception musculaire ainsi que son endurance. L’électrostimulation pelvi-périnéale impulse un courant électrique sur une zone musculaire et nerveuse entraînant une hypertrophie musculaire. Elle permet également d’améliorer la capacité vésicale et de diminuer l’intensité des contractions détrusoriennes (8).
• Certaines mesures hygiéno-diététiques sont aussi conseillées : éviter la consommation excessive de boissons pour ne pas uriner plus d’un litre et demi par jour (6). L’arrêt du tabac et la réduction d’une surcharge pondérale sont également encouragés (2).
• En cas d’échec de la rééducation périnéale, une prise en charge chirurgicale pourra se discuter et consistera en la pose d’une bandelette sous-urétrale (BSU) avec un pourcentage de guérison de 80%.
• D’autres techniques sont parfois proposées, comme :
– le sphincter artificiel urinaire (SAU) qui a un taux de réussite de 90% quand il ne laisse pas place à une érosion-infection obligeant à l’explanter,
– les ballons péri-urétraux,
– les injections d’agents de comblement (par endoscopie),
– la cure de prolapsus pouvant être associée à la correction d’une incontinence (2) (7).
Pour ce qui est de l’IUU :
• Des règles hygiéno-diététiques sont également préconisées comme la régulation des boissons et l’arrêt du tabac, mais aussi limiter la consommation de vin, bière et spiritueux qui irritent la vessie, et également éviter la consommation de café et de thé qui entraînent une production rénale d’urine accrue (6).
• Un traitement médical peut être envisagé. Il s’agit en général d’anticholinergiques (oxybutinine et chlorure de trospium par exemple) qui bloquent la transmission nerveuse entre les nerfs qui contrôlent la vessie et le muscle vésical. Ils ne sont malheureusement pas dénués d’effets secondaires (sécheresse buccale ou oculaire, troubles digestifs) qui sont souvent à l’origine d’un arrêt prématuré du traitement (2).
• La rééducation fonctionnelle est utilisée pour différer le besoin mictionnel et permettre un délai supplémentaire pour un trajet jusqu’aux toilettes. Elle peut associer une stimulation électrique pour inhiber ces contractions anarchiques et une prise en charge comportementale (6). Nous considérons les techniques cognitivo-comportementales comme « l’intégration corticale d’une fonction végétative soumise
à des messages sensoriels » (8), elles ont pour but de définir des troubles comportementaux, de proposer des corrections à ces troubles (apprentissage du réflexe périnéo-détrusorien qui consiste à contracter les muscles pelviens pour inhiber la vessie), des techniques de relaxation et de détournement de l’attention.
• La neuromodulation sacrée qui consiste à poser un stimulateur raccordé à une électrode sur les racines nerveuses sacrées (2).
• L’injection intradétrusorienne de toxine botulique par voie endoscopique est assez récente, elle a une bonne efficacité mais elle est temporaire ce qui implique des réinjections régulières. Son principal risque est la rétention urinaire qui peut amener à réaliser des auto-sondages (2).
• Enfin, une prise en charge chirurgicale est également discutable, nous y retrouvons l’entérocystoplastie d’agrandissement ou encore la dérivation urinaire (2) .

Rationnel de l’étude

L’impact périnéal de la grossesse

De nombreuses études se sont intéressées à la prévalence de l’incontinence urinaire pendant la grossesse et en post-partum. Elle augmente progressivement au cours de la grossesse pour être maximale au troisième trimestre. Parmi les facteurs de risque d’IU du post-partum, la multiparité et l’accouchement par voie basse sont souvent rapportés. Pourtant certaines études ne retrouvent pas de différence significative entre les femmes ayant accouché par voie basse et par césarienne.
Certaines modifications physiologiques et anatomiques survenant au cours de la grossesse peuvent expliquer l’IU de la grossesse. Ces modifications sont :
• la dilatation de la voie excrétrice (dès 6SA et dans plus de 90% des cas au troisième trimestre) due à une obstruction mécanique par l’utérus gravide ainsi qu’à l’effet myorelaxant de la progestérone, cette dilatation est d’autant plus importante chez les femmes atteintes de pyélonéphrite,
• une hypotonie vésicale également due au taux plus élevé de progestérone ainsi qu’une augmentation de la capacité de la vessie qui, elle, se déforme en élargissant sa base et en changeant de courbure ; le trigone devenant convexe du fait de l’utérus gravide,
• une augmentation du poids des viscères lors de la grossesse ainsi qu’une élongation des moyens de suspension qui modifient par la suite l’axe de pression abdominale en le dirigeant vers la fente vulvaire,
• une modification de l’équilibre vésico-sphinctérien par diminution de la pression urétrale et augmentation de la mobilité cervico-urétrale.
Par ailleurs, lors de l’accouchement on peut retrouver :
• une distension du périnée, du noyau fibreux central du périnée avec un risque de déchirure du muscle pubo-rectal au niveau de son point d’ancrage sur le corps du noyau fibreux,
• un diastasis des muscles releveurs de l’anus entraînant une perte des supports inférieurs et postérieurs de la paroi antérieure du vagin et de la vessie favorisant ainsi les prolapsus génitaux,
• des lésions d’étirement du nerf pudendal avec une récupération à distance inconstante en particulier lors d’un travail long ou de l’utilisation de forceps.
Ainsi, la grossesse est un facteur de risque très clair d’incontinence urinaire puisque près de 85% des femmes enceintes sont concernées(9).

L’effet du sport sur le plancher pelvien

Malgré de nombreuses vertus, le sport peut également être vecteur d’incontinence urinaire. L’activité sportive, dès lors qu’elle n’est pas réalisée en parallèle d’un travail des muscles pelviens peut être délétère pour le périnée. En effet, l’activité sportive sollicite le périnée, en particulier lorsque les muscles abdominaux sont développés aux dépens des muscles pelviens (ce qui laisse entrevoir un déséquilibre de pression et donc un défaut de résistance aux pressions intra-abdominales). Toutefois, si le sport est pratiqué avec connaissance et conscience du périnée, il diminuerait l’incidence des incontinences urinaires mais aussi des prolapsus. La pratique d’un sport expose le périnée à des contraintes importantes qui sont variables selon le sport et l’intensité de sa pratique mais remédiables si des exercices de contrôle du périnée sont associés à l’entraînement (10). Les activités sportives sont classées selon leur impact périnéal dans la littérature. Ainsi, certains sports comme l’athlétisme, la gymnastique ou encore le basket-ball sont considérés comme ayant un fort impact périnéal ; a contrario, la natation est classée dans la catégorie à faible impact. Dans une étude similaire à celle que nous avons mise en place, les auteurs ont montré que les femmes pratiquant habituellement une activité à fort impact périnéal étaient plus sujettes aux incontinences urinaires, contrairement à celles qui pratiquaient un sport à faible impact. Dans ce dernier groupe, la pratique d’une activité sportive favorisait la continence (11).

Les bénéfices d’une activité sportive au cours de la grossesse

Cependant, comme nous l’avons introduit dans le paragraphe précédent, le sport a également des impacts positifs sur la grossesse. Une pratique sportive régulière diminue le risque de prise de poids excessive, elle joue également positivement sur le diabète gestationnel, l’hypertension artérielle, le bien-être physique et psychique et diminue les symptômes veineux ou vasculaires (œdèmes des membres inférieurs, varices, thrombose veineuse) (12) (13). En post-partum, il semble y avoir moins de hernies de faiblesse, de lombalgies, de phlébites et de varices mais aussi de dépressions du post-partum quand la pratique est modérée (14). L’HAS (haute autorité de santé) ainsi que les collèges des gynécologues obstétriciens américains et français s’harmonisent pour prôner l’importance d’une activité physique lors d’une grossesse à partir du moment où elle est modérée et régulière et s’il n’y a aucune contre-indication médicale notable. Ils excluent les sports à risques de traumatismes, notamment abdominaux, et de chutes. Toutefois, il parait nécessaire que les femmes soient vigilantes aux moindres symptômes devant les faire arrêter ou ralentir leur pratique (métrorragies, dyspnée, contractions utérines, céphalées, vertiges, pertes de liquide amniotique). Il est absolument nécessaire d’avoir une hydratation suffisante et des apports énergétiques adaptés. D’autre part il y a lieu de s’abstenir d’exercices en décubitus dorsal surtout à partir du quatrième mois de grossesse et d’éviter l’altitude. Enfin, la reprise d’un sport au cours du post-partum est tout à fait compatible avec l’allaitement, il est tout de même préférable de donner le sein avant l’exercice physique pour éviter le passage d’acide lactique dans le lait (13).

Etudes déjà menées sur le même thème

D’autres études ont déjà été publiées sur le sujet de l’IU au sein d’une population de femmes sportives et autour de la période gestationnelle. La majeure partie des études auxquelles nous nous sommes intéressées dataient d’il y a plus de 10 ans. Nous pouvons donc nous interroger sur l’actualité des données recensées qui peuvent être considérées désuètes à l’heure actuelle. Bon nombre d’études retrouvées dans la littérature s’attardaient uniquement sur une population de sportives de haut niveau (15). Les quelques études qui se sont intéressées à une population plus générale ont classé les sports pratiqués selon leur impact périnéal et non l’intensité de la pratique sportive (11). Celle-ci est plus utilisée pour évaluer l’activité physique comme par exemple dans le questionnaire standardisé de Ricci et Gagnon. En effet, la prévalence et la gêne d’une IU, en particulier à l’effort, augmentent certes avec l’impact périnéal mais aussi avec l’intensité de la pratique. Il existe une hypothèse qui témoigne que la pratique d’un sport de manière intensive révélerait une IUE chez des femmes considérées auparavant asymptomatiques et démasquerait donc une faiblesse constitutionnelle du tissu conjonctif (16).

Objectifs de notre étude

Objectif principal

L’objectif principal de notre étude sera de mettre en lien une pratique sportive dite « intensive » (c’est-à-dire supérieure à trois heures hebdomadaires de sport) et le risque de survenue d’une IU dans une population de femmes primipares au cours de deux périodes distinctes : la grossesse et le post-partum.

Objectifs secondaires

En second plan, il nous semble intéressant d’évaluer le retentissement engendré par l’incontinence urinaire sur les activités quotidiennes, lors de situations d’effort, sur l’image de soi, sur le comportement sexuel et émotionnel des femmes enceintes ou au cours de leur post-partum. Ce peut être un impact important sur leur qualité de vie en général.
De même, nous évaluerons la connaissance des femmes de leur périnée, nous recueillerons les attentes de celles-ci envers la rééducation périnéale et leur sensibilité à l’effectuer selon leur quotient hebdomadaire sportif.

Nos hypothèses

D’abord, nous supposons que les femmes ayant un taux hebdomadaire de sport élevé sont plus sujettes à l’IU au cours de leur grossesse et en post-partum. Puis, nous pensons que l’accouchement voie basse augmente le risque d’IU dans le post-partum de ces femmes dites « sportives ».
Ensuite, il nous semble plausible que les femmes sportives n’aient pas une meilleure connaissance de leur périnée par rapport à la population témoin et que ces dernières soient plus rigoureuses dans la réalisation de séances de rééducation périnéale lorsque celles-ci sont indiquées.

Matériels et méthode

L’étude que nous avons réalisée est une étude transversale divisée en deux parties. La première partie a concerné les femmes primipares venant pour leur échographie du troisième trimestre au centre hospitalier universitaire (CHU) de Caen entre le 06/08/2018 et le 09/11/2018. La deuxième partie a concerné les femmes primipares au cours de leur post-partum, ces patientes ont été recrutées lors de leur séjour en suites de couche au CHU de Caen entre le 20/08/2018 et le 28/09/2018. Elles ont été recontactées par email entre le 14/11/2018 et le 29/12/2018.
Les critères d’inclusion à notre étude étaient :
➢ Femmes primipares
➢ Grossesse singleton
Les critères d’inclusion spécifiques au premier groupe étaient :
➢ Femmes au troisième trimestre de leur grossesse
➢ Femme réalisant leur échographie du troisième trimestre au CHU de Caen Les critères d’inclusion relatifs au second groupe étaient :
➢ Femmes en post-partum (à distance de leur accouchement)
➢ Femmes ayant accouché au CHU de Caen
Les critères de non inclusion à notre étude étaient :
➢ Femmes multipares
➢ Grossesses multiples
➢ Femmes ayant eu une mort fœtale in utero
➢ Femmes ayant eu une interruption médicale de grossesse
➢ Femmes présentant un handicap moteur
➢ Femmes présentant un handicap mental
Pour recueillir les informations dont nous avions besoin, nous avons utilisé deux questionnaires différents. Les critères de jugement ont été évalués grâce à des questionnaires standardisés tels que le score de Ricci et Gagnon pour évaluer l’intensité de l’activité sportive, l’ICIQ-SF (International Consultation on Incontinence Questionnaire-Short Form) et le Contilife pour évaluer l’IU et son retentissement sur les activités quotidiennes. Le score de Ricci et Gagnon (Annexe I) est un questionnaire d’auto-évaluation de l’activité physique qui permet de déterminer le profil du patient qui y répond (inactif, actif ou très actif). L’ICIQ-SF (Annexe II) permet de diagnostiquer une incontinence urinaire, de déterminer sa fréquence, sa gravité et son impact global sur la qualité de vie. Enfin le Contilife (Annexe III) permet de mesurer l’impact sur la qualité de vie de l’incontinence urinaire dans plusieurs domaines.
En ce qui concerne la mise en place de l’étude consacrée aux femmes enceintes au cours du troisième trimestre de leur grossesse, notre questionnaire (Annexe IV) était distribué par les hôtesses d’accueil lors de l’arrivée des patientes que nous ciblions dans le service d’échographie, c’est-à-dire des femmes primipares entre 30 et 34 semaines d’aménorrhée (SA). Elles pouvaient le remplir en attendant leur consultation ou après celle-ci. Une boîte était à leur disposition sur le bureau des hôtesses d’accueil indiquant le nom de l’étude afin qu’elles puissent déposer leur questionnaire une fois celui-ci dûment rempli.
Les femmes incluses en post-partum ont été informées de l’étude par le personnel du service ainsi que les étudiantes sages-femmes au cours de leur séjour en suites de naissance au CHU de Caen. Une feuille d’information et de non opposition à être recontactée par email (Annexe V) leur était distribuée. Ainsi elles prenaient connaissance du déroulement de l’étude et indiquaient leur adresse email si elles consentaient à participer. Le questionnaire (Annexe VI) leur était par la suite envoyé à 90 jours de leur accouchement.
Plusieurs outils statistiques nous ont été utiles pour analyser nos recueils de données : le logiciel Excel et le logiciel STATA version 13 (Stata-Corp®).
Préalablement à la mise en place de notre étude, nous avons sollicité l’accord d’un comité de protection des personnes (CPP). Le 06 novembre 2018, notre projet a été examiné par le CPP Ouest VI qui a émis un avis favorable sous réserve de prise en compte de remarques formulées.

Résultats

Caractéristiques des populations

En ce qui concerne les effectifs totaux, nous avions recueilli 42 questionnaires dans le premier groupe. Nous avions pris 40 questionnaires en compte ; deux étant inexploitables car très peu remplis. Pour le second groupe, nous avions recruté 52 patientes en suites de naissance, 50 adresses emails étaient lisibles et/ou valides, nous avions recensé 32 questionnaires complets et 18 réponses incomplètes. Nous avions exploité 35 questionnaires au total.

Discussion

Nous articulerons cette discussion autour de la présentation de son contexte en soulignant les limites et les avantages inhérents. Ensuite, nous nous focaliserons sur les résultats et tenterons d’apporter des conclusions aux phénomènes observés.

Limites de notre étude

Pour avancer une première piste de discussion, il semblerait que nous ayons malheureusement manqué de temps, de manière générale, pour la mise en place d’une étude d’une telle ampleur. Nous avons été obligées de prendre deux populations distinctes car le temps accordé à la réalisation de notre étude de mémoire dans notre cursus universitaire n’était pas suffisant pour interroger les mêmes patientes au troisième trimestre de leur grossesse et en post-partum. De même, nous avions pour projet d’apparier les patientes du premier et du second groupe mais cela n’a malheureusement pas été possible au vu du nombre de réponses recueillies. Enfin, nous avons été retardées par la constitution d’un dossier de CPP pour être conforme aux nouvelles lois éthiques de protection des données personnelles ainsi que par la mise en ligne du questionnaire du post-partum qui devait avoir été préalablement validé par le correspondant éthique de l’université au vu de l’utilisation d’une plateforme mise à disposition par cette instance.
Par ailleurs, le remplissage des questionnaires était incomplet pour nombre de patientes, notamment dans le premier groupe, les rendant inexploitables pour certains ou peu contributifs. Nous pouvons illustrer nos propos en citant l’exemple de l’IMC ; nous voulions à la première ébauche de nos questionnaires demander la taille et le poids avant grossesse de nos patientes afin de calculer leur IMC nous même, mais dans un souci d’anonymat, il nous a été demandé de modifier ces critères et d’ainsi demander directement l’IMC avant grossesse de la patiente. Or nous pouvons supposer que nos patientes ne connaissaient pas forcément leur IMC et n’avaient peut-être pas eu le temps ou les moyens matériels pour le calculer au moment de remplir le questionnaire. Cependant, nous avons moins été confrontées à ce souci pour le second groupe (femmes en post-partum) qui avaient répondu sur une plateforme internet (LimeSurvey) à nos questions et qui, pour passer au groupe de questions suivant du questionnaire devaient avoir rempli en entier le précédent, les réponses incomplètes étaient donc dues à quelques abandons en cours de remplissage, nous permettant cependant parfois d’exploiter les premières réponses. Puis, en cours d’étude, nous sommes tombées face à un biais inévitable dans la mise en œuvre de celle-ci, auquel nous n’avions pas réfléchi avant, concernant le second groupe. Les réponses étant anonymes nous ne savions pas quelle patiente avait répondu à quel moment au formulaire et donc si elle avait bien répondu 90 jours après son accouchement comme convenu dans notre protocole. Lorsque nous avions sollicité les patientes par l’envoi du premier mail elles étaient à 90 jours de leur accouchement mais elles n’avaient pas forcément cliqué sur le lien de l’étude le jour même de sa réception et nous avions ensuite effectué plusieurs relances afin d’obtenir un maximum de réponses au questionnaire par rapport au nombre de femmes recrutées au préalable. Nous en avons donc conclu que les femmes avaient répondu entre 90 et 120 jours après leur accouchement, le biais de mémoire étant donc applicable à la situation. Ceci étant, nous nous sommes aperçu que les bornes pour notre premier groupe étaient similaires étant donné que les femmes réalisent leur échographie du troisième trimestre entre 30 et 34 SA ce qui témoigne également d’un biais de mémoire pour le premier groupe.
Enfin, nous pouvions supposer que même anonymement il n’est pas facile pour des femmes relativement jeunes de témoigner de leur incontinence urinaire, en particulier si elles étaient entourées de leur conjoint ou de proche(s) au moment de répondre aux questions et ainsi que certaines incontinences avaient donc été ignorées ou sous-estimées dans notre recueil de données. Il s’agit là d’un biais de désirabilité sociale.

Points forts de l’étude

Nous avons obtenu un avis favorable du CPP grand ouest VI sous réserve de prise en compte des remarques formulées. Les CPP se prononcent sur les conditions dans lesquelles le(s) promoteur(s) de la recherche assure(nt) la protection des personnes et notamment des participants, sur le bien-fondé et la pertinence du projet de recherche et sur sa qualité méthodologique. Nous retenons donc cet avis favorable comme atout de notre étude.
L’utilisation de questionnaires validés de symptômes dans la littérature internationale (le score de Ricci et Gagnon, l’ICIQ-SF et le Contilife) nous a permis de limiter les biais de classement au sein de nos populations.
En ce qui concernait la mise en place des études, la façon de recruter les patientes (par les hôtesses d’accueil ou le personnel du service en suites de naissance) semble avoir été optimale, aucune information au sujet d’un problème de compréhension ou de difficulté à répondre aux questionnaires ne nous est revenue et les patientes recrutées n’ont émis aucune réserve à participer à notre étude.
L’hétérogénéité au sein des populations à propos de plusieurs critères (âge, poids, catégorie sociale) nous a permis d’assurer une représentativité intéressante dans chacun de nos deux groupes.
Deux indicateurs de l’hypothèse principale de notre étude se sont avérés fortement significatifs, il nous semble donc adapté de les citer dans nos points forts. En effet, les patientes ayant eu ou ayant une incontinence urinaire avant la grossesse sont plus sujettes à en avoir une pendant la grossesse. De même, les femmes ayant une incontinence urinaire pendant la grossesse sont, quant à elles, plus sujettes à en avoir une en post-partum même à distance de leur accouchement, il s’agit là d’un point très intéressant à analyser et que nous détaillerons un peu plus loin.
Par ailleurs, nos hypothèses secondaires au sujet de la qualité de vie en général des femmes incontinentes et des connaissances périnéales des femmes sportives sont validées. Il existe donc un retentissement sur la vie quotidienne des femmes incontinentes comparativement aux patientes ne présentant pas de fuites urinaires. Et, les femmes sportives n’ont pas une meilleure connaissance de leur périnée que la population témoin.

Analyses des résultats selon nos hypothèses

Pour débuter par des constats généraux, au sein de notre premier groupe, il s’est avéré que la population était majoritairement non sportive avant la grossesse (70%) et que cette proportion de femmes « inactives » n’avait pas augmenté au cours de celle-ci (70%). Nous notions 22,5% de femmes symptomatiques d’IU avant leur grossesse et ce pourcentage augmentait à 50% en état gravide en se répartissant entre IU légère (12,5%), modérée (27,5%) et sévère (5%). Nous n’observions pas de différence significative entre femmes sportives et non sportives pendant la grossesse (âge, IMC, prise de poids au cours de la grossesse, IU, maîtrise du périnée, volonté de réaliser de la rééducation et score au vrai/faux sur le périnée). A propos du second groupe, notre population était cette fois ci majoritairement sportive avant la grossesse (71,4%), cette proportion baissait en cours de grossesse (40%) et à nouveau en post-partum (22,9%). Nous retrouvions 5,7% des patientes ayant une IU avant la grossesse, 34,3% en cours de grossesse et 40% en post-partum se répartissant au cours de cette période entre IU légère (31,4%) et modérée (8,6%). Parmi nos patientes, 80% d’entre elles avaient accouché voie basse. A nouveau, nous ne retrouvions pas de différence significative entre femmes sportives et non sportives en post-partum si ce n’est la prise de poids pendant la grossesse qui avait une tendance significative (p = 0,05) et serait moins élevée chez les patientes sportives en post-partum.
Concernant les facteurs de risque significativement associés à une IU dans nos études, nous retrouvions les IU antérieures à la grossesse pour les IU gravides et les IU au cours de la grossesse pour les IU en post-partum. En résumé, une patiente avait plus de risque d’avoir une IU gestationnelle si elle en avait déjà une préexistante à sa grossesse et une patiente avait plus de risque d’avoir une IU en post-partum si elle en avait eu une au cours de sa grossesse. Il nous semblait normal qu’une patiente ayant des fuites urinaires antérieures à sa grossesse en ait encore au cours de celle-ci. Toutefois, nous nous sommes interrogées sur les raisons qui feraient perdurer une incontinence urinaire gestationnelle en post-partum. Nous savions que la grossesse avait un retentissement physique et nous nous sommes interrogées sur le fait que celui-ci persiste en post-partum. En effet, la grossesse serait responsable, par l’augmentation du poids viscéral et l’élongation des moyens de suspension, d’une « diminution secondaire du système d’amarrage des viscères pelviens et d’une modification de l’axe de pression abdominale se dirigeant vers la fente vulvaire ». Elle serait également à l’origine d’une dilatation de la voie excrétrice par l’utérus gravide et l’effet myorelaxant de la progestérone, mais aussi d’une hypotonie vésicale due à un changement de courbure de la vessie et à nouveau à la progestérone. Enfin elle engendrerait également une modification de l’équilibre vésico-sphinctérien par diminution de la pression urétrale et augmentation de la mobilité cervico-urétrale (9). Ces modifications sont certes dues à l’état gravide mais elles ont une incidence sur le post-partum étant donné que les incontinences urinaires gestationnelles, dont elles sont la cause, sont facteurs de risque d’incontinences urinaires en post-partum. Ainsi, ces changements physiques persisteraient donc une fois apparus pendant la grossesse. Nous constatons donc qu’une IU pendant grossesse a une plus grande probabilité de perdurer en post-partum et qu’une IU pré-grossesse perdure systématiquement pendant la grossesse. Ceci expliquerait en partie le fait, connu et reconnu, que les femmes multipares sont plus sujettes au IU. En effet, une femme ayant subi une IU pendant sa première grossesse aurait une probabilité augmentée d’en subir une lors de ses grossesses suivantes, ceci pourrait ainsi faire l’objet d’une étude sur une population de femmes multipares. La rééducation périnéale devrait donc être prescrite à toutes les patientes ayant eu une incontinence au cours de leur grossesse. Les recommandations de bonnes pratiques au sujet de la rééducation périnéale en France ont régulièrement évolué en particulier au cours des dernières années (prescription majoritairement aux multipares puis à toutes les patientes ayant accouché par voie basse, à toutes les patientes peu importe leur mode d’accouchement, etc…). Actuellement, elle est recommandée pour traiter une incontinence urinaire persistante à trois mois et une incontinence anale mais elle n’est pas recommandée de manière précoce étant donné qu’aucune étude n’a été menée à ce sujet (19). Des séances de rééducation périnéale peuvent également être prescrites suite à une impression clinique lors d’un examen vaginal appelé « testing des releveurs de l’anus », il permet d’évaluer la force et l’endurance des muscles du plancher pelvien et de détecter une éventuelle inversion de commande (action de pousser au lieu de contracter par exemple) (20). Ce testing consiste à demander à la patiente de contracter ses muscles périnéaux autour des doigts de l’examinateur le plus longtemps possible et en plusieurs répétitions. Il existe plusieurs scores, celui de Minaire de 1994 est celui qui est le plus largement utilisé (Annexe VII). Nous nous interrogeons donc sur l’intérêt de prescrire de la rééducation périnéale dès la sortie de maternité aux femmes ayant eu une incontinence urinaire gestationnelle donc d’une potentielle prise en charge précoce ou de l’initiation d’un critère supplémentaire à la prescription de rééducation périnéale au cours de la visite post-natale (IU en cours de grossesse).
Par ailleurs, nous ne retrouvions aucun autre facteur de risque significativement associé à l’incontinence urinaire. Certains sont pourtant classiquement retrouvés dans des études similaires tels que l’âge, l’IMC ou encore la prise de poids pendant la grossesse (2). Le nombre de patientes recrutées n’a sûrement pas été suffisant pour établir un lien significatif de tous ces facteurs normalement associés.
Toutefois, la prise de poids au cours de la grossesse était à tendance significative en association à la pratique d’un sport en post-partum. C’est-à-dire que les femmes pratiquant une activité physique en post-partum avaient en moyenne une prise de poids inférieure au cours de leur grossesse. Ce lien potentiel est difficilement interprétable étant donné que la pratique d’un sport pendant la grossesse n’est pas, quant à elle, significativement associée à une prise de poids inférieure. Il ne s’agissait pas là d’un des objectifs de notre étude et nous avions relevé dans nos lectures un lien entre sport et prise de poids (14) mais il semblerait intéressant d’approfondir le sujet et d’étudier le quotient hebdomadaire sportif à partir duquel l’activité physique a un impact bénéfique.
Au sujet de notre hypothèse principale, qui était pour rappel : mettre en lien une pratique sportive dite « intensive » (c’est-à-dire supérieure à trois heures hebdomadaires de sport) et la survenue d’une IU au cours de deux périodes distinctes : la grossesse et le post-partum, nous n’avons pas trouvé de résultats significatifs. Nous imaginions qu’au même titre que certaines autres études, le sport serait significativement associé à l’apparition d’une IU et qu’elle serait proportionnelle au quotient hebdomadaire sportif (11). Il nous semble opportun de préciser qu’avec un plus grand nombre de patientes recrutées, la représentativité aurait sûrement été meilleure dans les diverses catégories sportives et donc les résultats plus représentatifs de la littérature internationale. En effet, nous avions dans notre premier groupe 70% de femmes non sportives, 20% de femmes actives et 10% de femmes très actives, il semblait donc compliqué d’effectuer un lien significatif entre sport et incontinence urinaire au sein d’une population majoritairement non sportive. A l’inverse, parmi notre seconde population, nous trouvions 29% de femmes non sportives, 54% de femmes habituellement actives (avant la grossesse) et 17% de femmes habituellement très actives, nous pouvions donc supposer que la population dite « témoin » qui regroupait donc les femmes non sportives n’était pas suffisante pour affirmer une corrélation significative. Si nous n’avons pas retrouvé que le sport était un facteur de risque d’incontinence urinaire, il lui est clairement associé dans toutes les études que nous avons pu lire au préalable. Ainsi il nous paraissait opportun de souligner l’importance d’une prise de conscience périnéale lors d’une pratique sportive. Il s’agissait là du point de départ de notre réflexion. Nous nous sommes donc questionnées sur l’intérêt d’une formation sur le périnée des éducateurs sportifs et des divers professionnels du monde du sport pour permettre un apprentissage de n’importe quelle discipline sportive en préservant celui-ci.
De même nous avions évoqué le fait que l’accouchement voie basse augmenterait le risque d’IU dans le post-partum, cependant l’incontinence urinaire n’est pas significativement associée à celui-ci. Cette affirmation est controversée dans la littérature internationale, l’accouchement par les voies naturelles est parfois considéré comme facteur de risque d’incontinence (17), mais toutes les études ne retrouvent pas de différence significative entre l’accouchement voie basse et la césarienne (18). A nouveau, 80% des femmes avaient accouché par voie basse et seulement 11,4% par césarienne (le reste des patientes n’avaient pas répondu à la question), la représentativité dans chacune des catégories n’était sûrement pas suffisamment équivalente pour affirmer que la césarienne serait un facteur protecteur d’incontinence urinaire en post-partum. Pour ce qui avait trait à nos hypothèses secondaires, la qualité de vie globale des patientes incontinentes était, quant à elle, clairement impactée, que ce soit sur le plan des activités quotidiennes, lors de situations d’effort, sur l’image de soi, leur comportement sexuel ou encore émotionnel. Le score Contilife était significativement plus élevé chez les femmes qui avaient une incontinence au cours de la grossesse mais également chez celles qui en avaient une en post-partum. Il existe donc un retentissement sur le quotidien relatif aux incontinences comme nous l’avions évoqué. Cette affirmation soulève un enjeu de santé publique, les patientes concernées par les incontinences gestationnelles sont très nombreuses tout comme celles qui sont encore impactées en post-partum. Pour rappel, nous avions 50% de femmes incontinentes au cours de leur grossesse et 40% en post-partum, selon les résultats au questionnaire standardisé ICIQ-SF dans chacun des deux groupes. Il existe comme nous le présentions dans notre introduction des moyens de les traiter et jusqu’à présent aucune campagne de prévention n’a été réalisée alors que 30 à 40% des femmes sont concernées de manière générale au cours de leur vie (2).
A propos de la rééducation périnéale, les femmes sportives n’ont en effet pas une meilleure connaissance de leur périnée par rapport à la population témoin comme nous l’avions suggéré mais elles n’ont pas non plus semblé plus enclines ou rigoureuses dans la réalisation de séances de rééducation périnéale comme nous le pensions. En ce qui concerne leurs attentes pendant la grossesse, elles espéraient de manière générale retrouver une continence urinaire optimale, que les séances soient utiles de manière actuelle mais également qu’elles soient un enseignement pérenne dont elles pourront se servir à nouveau au fil de leur vie, que les séances soient à la fois rapides et efficaces et enfin elles souhaitaient apprendre à muscler et connaître les différentes parties de leur périnée. En post-partum, il est intéressant de noter que toutes les femmes qui avaient eu une prescription de rééducation périnéale et avaient commencé les séances en étaient satisfaites et qu’elles avaient l’intention de réaliser toutes les séances nécessaires, celles qui n’avaient pas encore commencé avaient également toutes manifesté leur envie de faire la rééducation. Ainsi en ce qui concerne les attentes envers la rééducation périnéale et les avis au sujet de celle-ci, nous pouvons conclure que les femmes en sont majoritairement satisfaites telle qu’elle est réalisée actuellement. Par ailleurs, les réponses au vrai/faux que nous avions utilisé afin d’évaluer leurs connaissances en matière de périnée et de rééducation, sont meilleures au sein du groupe des femmes en post-partum (85,7% de score supérieur ou égal à 7 en post-partum contre 50% au troisième trimestre). Au vu de leur taux de réalisation de la rééducation, nous imaginons qu’au-delà d’un rôle rééducatif musculaire à proprement parler, la rééducation périnéale a également un rôle éducatif à la connaissance anatomique. Pour illustrer nos propos, nous pouvons reprendre en exemple l’affirmation : « le rectum fait partie des organes du périnée », pendant la grossesse nous avions plus de patientes ayant répondu faux à cet item, alors qu’en post-partum une majorité de femme avait répondu vrai. Si nous allons encore plus loin dans la réflexion, le rôle de la rééducation périnéale dans la sexualité et l’éducation anatomique à son propre corps en parallèle d’un travail rééducatif musculaire semble intéressant, sollicité et apprécié par les femmes. Nous nous interrogeons donc sur une éventuelle proposition systématique sans critère clinique nécessaire de la rééducation périnéale à la visite post-natale.

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Table des matières

I INTRODUCTION
1. DONNEES THEORIQUES
1.1) Définition de l’incontinence urinaire
1.2) Anatomie du système vésico-sphinctérien
1.3) Physiopathologie de l’incontinence urinaire
1.4) Les traitements de l’incontinence urinaire
2. RATIONNEL DE L’ETUDE
2.1) L’impact périnéal de la grossesse
2.2) L’effet du sport sur le plancher pelvien
2.3) Les bénéfices d’une activité sportive au cours de la grossesse
2.4) Etudes déjà menées sur le même thème
3. OBJECTIFS DE NOTRE ETUDE
3.1) Objectif principal
3.2) Objectifs secondaires
3.3) Nos hypothèses
II MATERIELS ET METHODE
III RESULTATS
1. CARACTERISTIQUES DES POPULATIONS
1.1) Patientes au troisième trimestre de grossesse
1.2) Patientes en post-partum
2. CONNAISSANCES ANATOMIQUES ET DE LA REEDUCATION PERINEALE
3. COMPARAISON DES FEMMES SPORTIVES ET NON SPORTIVES
4. FACTEURS ASSOCIES A L’INCONTINENCE URINAIRE
IV DISCUSSION
1. LIMITES DE NOTRE ETUDE
2. POINTS FORTS DE L’ETUDE
3. ANALYSES DES RESULTATS SELON NOS HYPOTHESES
V CONCLUSION

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