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Configuration externe et dimensions
La prostate a une forme conique et aplatie d’avant en arrière. Elle présente à décrire une base supérieure, un apex inférieur, une face antérieure, une face postérieure et deux faces inféro-latérales.
La prostate normale apparait au toucher rectal ferme élastique et régulière. Elle mesure en moyenne 40 mm de largeur à la base, 20 mm d’épaisseur et 30 mm de hauteur. Son poids est de 20 g.
Anatomie zonale de la prostate
Deux modèles anatomiques permettent une subdivision de la prostate.
Le plus ancien est celui de Gil Vernet qui distingue:
o une prostate crâniale dont les canaux excrétoires s’abouchent au dessus du Veru Montanum ;
o une prostate caudale dont les canaux s’abouchent en dessous du Veru Montanum ;
o une zone intermédiaire entre ces deux zones.
Le second modèle proposé par Mc Neal [31] (figure 2), distingue 5 zones au niveau de la prostate :
o une zone périphérique;
o une zone centrale;
o une zone transitionnelle;
o une zone fibromusculaire;
o une zone péri urétrale.
C’est aux dépens de la zone périphérique que se développent 70% des cas de cancer de la prostate. Ensuite vient la zone de transition avec moins de 30% des cas souvent découverts de façon fortuite lors d’une résection trans-urétrale de la prostate pour hypertrophie bénigne de la prostate.
Rapports de la prostate (figure 3)
La loge prostatique
La prostate est bien fixée au fascia pelvien pariétal et au périnée par l’intermédiaire de sa loge conjonctive.
La loge prostatique, est définie par le fascia prostatique qui se prolonge par le fascia vésical et le fascia pelvien pariétal.
La loge cellulo-fibreuse épaisse et inextensible contient la prostate à laquelle elle adhère de façon lâche, ce qui permet son clivage chirurgical lors des prostatectomies radicales. Elle est constituée par :
– en avant : La lame pré-prostatique détachée du fascia supérieur du diaphragme urogénital. Les collatérales de la veine dorsale de la verge et le plexus de Santorini sont contenues dans ce fascia;
– en arrière : L’aponévrose de Denonvilliers qui constitue une protection naturelle contre l’extension postérieure du cancer de la prostate;
– latéralement : Les lames sacro-recto-génito-pubiennes de qui contiennent les bandelettes neurovasculaires;
– en bas : Le fascia supérieur du diaphragme urogénital qui recouvre les muscles du plan périnéal moyen;
– en haut : La loge prostatique est ouverte au niveau de la vessie qui adhère directement à la base de la prostate;
Rapport à l’intérieur de la loge prostatique
La prostate contient:
– le sphincter de la vessie, en continuité avec le détrusor. Il entoure le premier centimètre de l’urètre prostatique, maintient la continence passive et prévient l’éjaculation rétrograde;
– l’urètre prostatique qui traverse la prostate verticalement de la base au sommet. Sa paroi postérieure présente à l’intérieur une saillie médiane et longitudinale : le veru montanum ou colliculus séminal, repère essentiel lors des résections endoscopiques de la prostate ;
– à l’intérieur de la loge, la prostate répond au sphincter strié de l’urètre et aux veines péri-prostatiques;
– le sphincter strié de l’urètre est un anneau complet au niveau de l’urètre membraneux et du bec prostatique. La section de ses fibres lors d’une prostatectomie pourrait être responsable d’incontinence;
– les plexus veineux péri-prostatiques (plexus de Santorini en avant, le plexus latéro-prostatiques et les veines pudendales en arrière) sont situés dans les parois de la loge. Ils constituent un rapport chirurgical important lors de la prostatectomie radicale.
Rapports par l’intermédiaire de la loge prostatique
– La face antérieure répond à l’espace pré-prostatique compris entre la face postérieure de la symphyse pubienne en avant, la lame pré-vésicale en arrière, les ligaments pubo-vésicaux et l’espace pré-vésical de Retzius en haut, le fascia supérieur du diaphragme urogénital en bas et les lames sacro-recto-génito-pubiennes latéralement.
– La face postérieure répond à la face antérieure du rectum par l’intermédiaire de l’aponévrose prostato-péritonéale de Denonvilliers.
Entre cette aponévrose et le rectum, au dessus du noyau fibreux central du périnée, il y a un espace qui sert de passage lors des prostatectomies radicales : l’espace décollable de Proust.
– Les faces latérales répondent à la partie inféro-antérieure de l’espace pelvi-rectal supérieur. Cet espace, facilement clivable, contient les filets du plexus nerveux hypogastrique.
– La base de forme quadrilatère, présente trois segments:
o antérieur, en rapport direct avec la vessie;
o moyen, répondant à la barre inter urétérale de la vessie;
o postérieur, vésiculo-déférentiel.
– Le sommet, entouré totalement par le sphincter strié de l’urètre, répond :
o en avant ; à la symphyse pubienne (à 2 cm de son bord inférieur);
o en arrière : à la courbure périnéale du rectum et au bulbe du corps spongieux;
o en bas : au diaphragme uro-génital qui va la séparer de l’urètre membraneux.
Vascularisation- Innervation (figure 4)
Les artères sont constituées par les branches prostatiques de l’artère vésico-prostatique et de quelques rameaux de l’artère hémorroïdale moyenne.
Les veines se jettent dans le volumineux plexus veineux latéro-prostatique. On individualise deux courants veineux : le courant supérieur (base de la prostate) se draine dans les veines vésicales et le courant inférieur (faces latérales) qui se draine dans la veine pudendale interne.
Les lymphatiques forment un réseau péri-prostatique et se résolvent en quatre pédicules de drainage (iliaque externe, hypogastrique, postérieur et inférieur).
Les nerfs viennent du plexus hypogastrique inférieur et accessoirement du plexus sacré.
HISTOLOGIE DE LA PROSTATE [52]
Le tissu prostatique est formé par deux contingents principaux.
Le contingent glandulaire est formé d’acini groupés en lobules. Les lobules sont drainés par des canaux secondaires s’abouchant dans des canaux principaux. Ces canaux principaux se drainent dans l’urètre à un niveau variable en fonction de la zone prostatique examinée. Dans leur extrémité terminale, les canaux principaux présentent un revêtement urothélial. Dans plus de 95 % des cas, les adénocarcinomes prennent leur origine au niveau des structures glandulaires acineuses ou des canaux secondaires.
Le second contingent, conjonctif, est formé essentiellement de cellules musculaires lisses.
Composants glandulaires :
Les structures épithéliales prostatiques sont bistratifiées. En surface, le revêtement est constitué par les cellules sécrétoires, correspondant à des éléments cylindriques, caractérisés par un cytoplasme pâle ou éosinophile granuleux. Le noyau de petite taille, est en position basale. Ces éléments expriment fortement l’antigène spécifique de prostate et les phosphatases acides prostatiques. Ces cellules sécrétoires sont marquées par les cytokératines de bas poids moléculaire. Les kératines de poids moléculaire élevé ne sont pas exprimées. Les cellules basales sont situées entre la membrane basale et le pôle basal des cellules sécrétoires. Ces cellules sont mal visibles. Elles sont centrées par des noyaux de petite taille, allongées, et présentent un cytoplasme endothéliforme. Elles sont considérées comme le comparti- ment cellulaire de réserve. Ces cellules sécrétoires sont marquées par les kératines 903 de haut poids moléculaire. Il n’existe pas à leur niveau de marquage par PSA ou phosphatase acide prostatique. Les cellules neuroendocrines s’observent dans tous les compartiments glandulaires de la prostate. Leur densité est faible, et augmente au niveau des canaux péri-uréthraux. Ces cellules neuroendocrines sont marquées par des anticorps antichromogranine A. Elles sécrètent des polypeptides très nombreux tels que sérotonine, somatostatine, calcitonine, gastrine, Beta-HCG. 2-2-Composants mésenchymateux Le contingent mésenchymateux est formé par des cellules musculaires lisses.Ces éléments fusiformes, avec un cytoplasme rubanné, présent- ent un petit noyau central ovalaire. Elles s’agencent sur un mode fasciculé. 2-3-La capsule prostatique La prostate est séparée des structures anatomiques voisines par une bande collagène dont l’individualisation est nette au niveau des faces latérales et de la face postérieure. Au niveau de l’apex l’identification des limites de la glande est beaucoup plus imprécise avec une intrication des structures acineuses et des fibres musculaires striées du sphincter. En avant, il n’existe pas de limite nette et les fibres prostatiques sont mêlées aux éléments conjonctivo-musculaires sphinctériens.
Diagnostic des sarcomes de la prostate [19] :
Circonstances de découverte :
Le sarcome de la prostate peut être suspecté sur les éléments suivants:
Une symptomatologie urogénitale : souvent révélatrice et d’évolution rapide, associant dysurie, pollakiurie, impériosités mictionnelles, voire rétention vésicale complète. L’hématurie est plus rare, elle est en rapport le plus souvent avec un envahissement vésical.
Signes digestifs : Troubles de la défécation (ténesme, épreintes), voire constipation témoins de la compression rectale.
Grosse jambe unilatérale en rapport avec la compression veineuse pelvienne.
Une tumeur pelvienne chez un jeune enfant.
Une insuffisance rénale aiguë peut être au premier plan, en rapport avec une rétention chronique d’urines vésicale avec distension et urétéro-hydronéphrose ou un envahissement direct des méats uréteraux.
Amaigrissement et douleurs sont des symptômes tardifs en rapport avec un envahissement locorégional ou des métastases osseuses.
Découverte fortuite après analyse d’une pièce opératoire d’une hypertrophie bénigne de la prostate ou des copeaux de résection d’une prostate.
Examen Clinique :
Interrogatoire : recherche un facteur de risque comme une irradiation pelvienne, les antécédents personnels ou familiaux de sarcomes.
Examen Physique :
La palpation de l’abdomen et des fosses lombaires peut mettre en évidence l’extension abdominale d’une volumineuse tumeur, un gros rein distendu, un globe vésical en cas de rétention vésicale complète.
Le toucher rectal est essentiel (réalisé au mieux sous anesthésie chez le jeune enfant), il peut mettre en évidence :
o une tumeur bombant dans le rectum, indurée, irrégulière et immédiatement évocatrice de tumeur maligne, sans que l’on puisse toujours affirmer son origine vésicale ou prostatique dans les lésions volumineuses ;
o parfois, la prostate est ferme, souple ou élastique, lisse, indolore et évoque une hypertrophie bénigne de la prostate chez l’homme âgé.
Radiothérapie :
Deux voies d’administration peuvent être utilisées :
o externe : 45 à 50 grays (Gy) sont délivrés sur la tumeur en 4 à 5 semaines en moyenne (35 Gy sur les aires ganglionnaires) ; chez l’enfant de moins de 5 ans, la dose maximale est de 40 Gy ;
o interstitielle (iridium 192, iode 125, or 198) : elle permet de délivrer des doses supérieures avec moins de conséquences pour les organes voisins.
Chimiothérapie :
Depuis la découverte de la chimiosensibilité des sarcomes, l’utilisation de la chimiothérapie combinée à la chirurgie et à la radiothérapie a transformé leur pronostic à partir des années 1970. Elle permet de réduire la place des exérèses élargies mutilantes.
Divers protocoles sont utilisés :
o Le protocole de première intention est le VAC, qui associe la Vincristine (Oncovin®), l’Actinomycine D et le Cyclophosphamide (Endoxan®) administré en cures de 5 jours, espacées de 2 à 4 semaines. L’ifosfamide (Holoxan®) prescrit à la place de l’Endoxan® serait moins toxique (cystites hémorragiques).
o D’autres drogues sont utilisées pour les chimiothérapies de « rattrapage » : doxorubicine (Adriblastine®), méthotrexate, bléomycine, association de doxorubicine et de cisplatine (Cisplatyl®). Les doses administrées dépendent des effets secondaires observés (hématologiques, digestifs, cardiaques, pulmonaires….). La durée du traitement est de 18 mois à 2 ans dans les rhabdomyosarcomes.
Indications [15 ; 19 ; 51] :
Les indications thérapeutiques sur les sarcomes de la prostate ne sont pas codifiées du fait de la rareté des cas et du fait de la difficulté à obtenir une classification unanime.
Néanmoins, il est nécessaire de tenir compte de l’âge, de l’état général, du volume tumoral, du grade de malignité et du bilan d’extension pour définir le meilleur enchaînement thérapeutique :
-Pour les tumeurs peu volumineuses et limitées au bloc vésicoprostatique, la résection chirurgicale complète est l’intervention idéale et qui offrirait les meilleures chances de guérison. -Les patients ayant des marges ou un curage ganglionnaire positifs doivent subir une radiothérapie adjuvante (40 à 50 Gy). – Quand la tumeur est volumineuse, une cytoréduction est possible après 2 à 3 cycles de chimiothérapie néoadjuvante avec ou sans radiothérapie. Une chirurgie de rattrapage peut être envisagée par la suite.
Observation N° 1:
Monsieur M.M âgé de 52 ans a été reçu en urgence à l’Hôpital Principal de Dakar pour une rétention complète des urines évoluant depuis 24h et qui avait nécessité un sondage vésical trans-urétral. Ce tableau clinique était précédé d’une dysurie à type d’efforts de poussée et d’une faiblesse du jet mictionnel et une pollakiurie nocturne faite de 5 levées.
Le patient n’avait pas d’antécédents médico-chirurgicaux particuliers.
L’examen physique avait objectivé un bon état général, une sonde urétrale ch18 drainant des urines limpides. Au toucher rectal la prostate était augmentée de volume, indolore, de consistance élastique, avec effacement du sillon médian.
Le Taux de PSA total était à 0,5 ng/ml. La créatininémie était à 11 mg/l et L’ECBU était stérile. L’Echographie de l’appareil urinaire mettait en évidence une hypertrophie homogène de la prostate avec un lobe médian. Le volume prostatique était estimé à 100 cm 3. Il n’existait de retentissement sur le haut appareil urinaire.
Le malade a été mis sous Alfuzozine 10mg à la dose de 10mg par jour pendant une semaine. La tentative de sevrage de la sonde s’était soldée par un échec et l’indication d’une adénomectomie prostatique par voie transvesicale avait été posée.
Les suites opératoires étaient simples avec ablation de la sonde à double courant à J 6 post opératoire. Le patient a repris une miction satisfaisante.
Deux mois après l’adénomectomie prostatique le patient a eu un nouvel épisode de rétention complète d’urine ayant nécessité un sondage vésical trans-urétral.
L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire avait mis en évidence un sarcome prostatique à cellules fusiformes de haut grade (grade III) suivant la classification de la Fédération nationale des centres de lutte contre le cancer. L’immunohistochimie avec coloration avait confirmé le diagnostic d’un léimyosarcome prostatique avec une expression positive pour la vimentine et pour l’actine.
La TDM thoraco-abdomino-pelvienne objectivait une importante tumeur prostatique surélevant le plancher vésical avec une urétéro-hydronéphrose unilatérale droite stade II. Il n’existait de signe de localisation secondaire.
La scintigraphie osseuse n’avait pas mis en évidence de métastases osseuses.
Une Cystoprostatectomie radicale avec dérivation urinaire cutanée trans-iléale selon Bricker avait été réalisée.
L’examen anatomopathologique de la pièce de prostatectomie avait conclu à un léimyosarcome de haut grade avec une recoupe apexielle infiltrée.
Cinq mois après la cystoprostatectomie radicale, le patient avait été reçu dans un tableau d’altération de l’état général (ECOG 3), un syndrome infectieux avec une température à 39°5, l’urétérostomie était non fonctionnelle et la créatininémie était à 64 mg/l.
L’échographie abdominale objectivait une uretérohydronephrose bilatérale plus marquée à droite (stade 2 à gauche et stade 3 à droite).
L’attitude thérapeutique consistait à une dérivation urinaire par une néphrostomie droite, une antibiothérapie à large spectre et une réhydratation hydro-électrolytique.
Le patient est décédé dans un tableau de défaillance multiviscerale 7 mois après le diagnostic.
Observation N° 2 :
Monsieur O.S., patient de 62 ans était venu consulter au service d’urologie de l’Hôpital Général Le Grand Yoff pour une masse hypogastrique évoluant depuis 6 mois associée à une dysurie à type de faiblesse du jet mictionnel, et une miction en 2 temps, une impériosité mictionnelle et une pollakiurie nocturne à 4 levées .
Le patient n’avait pas d’antécédents pathologiques particuliers.
L’examen clinique objectivait un patient en bon état général, une masse hypogastrique latéralisée à droite, indolore, mâte à la percussion, fixée par rapport aux plans abdominaux superficiels et profonds. La masse mesurait 10 cm de grand axe et débordait le pubis de 3 cm. Au toucher rectal, la masse était volumineuse, dure, fixée à la paroi pelvienne.
Le taux de PSA total était de 8,52 ng/ml.
L’échographie de l’appareil urinaire mettait en évidence une volumineuse masse abdomino-pelvienne développée aux dépens de la prostate. La masse était hétérogène, calcifiée, comprimant la vessie, mesurant 107× 117×193 mm, soit un volume de 1208 cc.
A l’uroTDM il existait une volumineuse tumeur abdomino-pelvienne hétérogène calcifiée n’envahissant pas les structures de voisinage, pouvant être développée aux dépens de la prostate ou du sinus uro génital (Figure 10).
OBSERVATION N°3
Monsieur O.G âgé de 73 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, qui avait consulté au service d’urologie de l’Hôpital Aristide Le Dantec pour dysurie, pollakiurie et hématurie macroscopique intermittente.
La symptomatologie évoluait depuis 4 mois.
L’état général du patient était bon. Au toucher rectal la prostate était augmentée de volume, indolore, de consistance souple, de surface régulière et le sillon médian de la prostate avait disparu.
Les taux de l’antigène spécifique de la prostate (PSA) étaient à 2,11ng/ml. L’échographie de l’appareil urinaire avait mis en évidence une prostate homogène augmentée de volume, qu’on estimait à 210 cc. L’échographie objectivait également un épaississement des parois de la vessie à 8 mm ; le haut appareil urinaire était normal.
Une urétro-cystoscopie mettait en évidence une hypertrophie prostatique avec un lobe médian, une vessie de lutte faite de cellules et de colonnes. Il n’y avait pas de lésions suspectes de malignité visible sur la muqueuse vésicale ni de calcul vésical.
La biopsie prostatique n’a pas été réalisée vus l’aspect de la prostate au toucher rectal et les taux du PSA total.
Le diagnostic d’une hypertrophie bénigne de la prostate a été retenu et devant la survenue répétée d’hématurie macroscopique l’indication d’une adénomectomie prostatique à ciel ouvert a été posée. Celle-ci a été réalisée par voie transvésicale et en peropératoire le tissu prostatique énucléé était nécrotique et friable.
L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire avait mis en évidence une prolifération maligne de cellules fusiformes très atypique avec un pléomorphisme cyto-nucléaire majeur. Les cellules étaient rubanées à cytoplasme parfois assez abondant, éosinophile. Les noyaux étaient arrondis, ovalaires et allongés avec des pluri-nucléations, des mitoses très nombreuses.
Les cellules se disposaient en faisceaux par endroits enchevêtrés (fig.11). Il y avait un stroma fibreux d’abondance variable et une nécrose tumorale abondante (fig.12). Il n’existait pas de parenchyme prostatique normal.
Devant cet aspect, le diagnostic de léiomyosarcome prostatique haut grade (grade III) a été retenu.
Un bilan de métastase n’a pas été réalisé après la découverte du diagnostic et un traitement adjuvant n’a pas été fait.
On n’avait perdu les contacts du patient et il a été réadmis un an après dans un tableau d’altération de l’état général avec un indice ECOG à 3, une anémie à 4g/dl et un blindage pelvien au toucher rectal.
Le malade est décédé dans le service deux jours après son hospitalisation dans un tableau de défaillance de multi viscéral.
Aspects épidémiologiques :
Les sarcomes de la prostate sont des tumeurs rares, ils représentent moins de 0,1% des cancers primaires de la prostate [40 ; 37].
La plupart des études sur les sarcomes de la prostate chez l’adulte porte sur des études de cas et les deux plus grandes séries dans la dernière décennie sur les sarcomes chez l’adulte sont celle de Wang X et al[53], une étude portant sur 25 cas de sarcome de la prostate chez l’adulte de 1989 à 2009, et l’étude de Sohn M et al[47], une étude de 21 cas de sarcome de la prostate chez l’adulte de 1990 à 2013.
Dans notre étude nous rapportons trois cas de sarcomes de la prostate chez l’adulte que nous avons colligé dans trois services d’urologie de 2007 à 2015.
Chez ces trois patients les types histologiques que nous avons rencontrés sont les leimyosarcomes et les rhabdomyosarcomes.
Dans la littérature et dans d’autres séries, il est décrit qu’il existe plusieurs sous-types de sarcomes prostatiques et les deux principaux sont représentés par les leimyosarcomes et les rhabdomyosarcomes. Ces deux types de sarcomes se retrouvent dans deux populations très différentes et représentent à eux seuls plus de 65 % de l’ensemble des sarcomes prostatiques [30 ; 51].
D’autres types histologiques, comme le carcinosarcome, l’histiocytome fibreux, l’angiosarcome, le fibrosarcome, le sarcome indifférencié et le sarcome stromal (SSP), sont beaucoup plus rares [15]. Les sarcomes de la prostate peuvent être observés à tous les âges, y compris les sujets jeunes et la moyenne d’âge au moment du diagnostic est estimée autour de 36 ans, ce qui est nettement plus jeune que la population atteinte d’adénocarcinome [9].
Les rhabdomyosarcomes sont diagnostiqués chez l’enfant entre 3 mois et 18 ans, avec un âge médian de 8 ans [25], tandis que les léiomyosarcome sont plus fréquents chez l’adulte, avec un pic de fréquence entre 40 et 60 ans [51].
En effet dans la plupart des séries rapportées l’âge est supérieur à 20 ans [51.].
Dans notre étude, la moyenne d’âge était de 62,33 ans avec des extrêmes de 52 à 73 ans. Nous n’avons pas rencontré de cas de sarcomes chez l’enfant.
L’origine de ces cancers reste incertaine, et plusieurs facteurs de risque pourraient intervenir dans le développement des sarcomes prostatiques comme la radiothérapie, des traitements préalables par des agents alkylants ( chimiothérapie ou les traitements immunosuppresseurs) , certains virus comme les herpès virus ou le virus Epstein Barr [29].
Une prédisposition génétique a été évoquée grâce aux sarcomes à expression familiale [13].
Mais parmi ces facteurs de risque, la radiothérapie est le seul facteur de risque démontré dans la littérature avec des séries de cas publiés [15].
Aspects diagnostiques :
Contrairement aux sarcomes du rein, les sarcomes de la prostate sont souvent suspectés avant la chirurgie surtout s’il s’agit d’un patient jeune présentant des symptômes obstructifs du bas appareil urinaire, avec au toucher rectal une prostate augmentée de volume et une valeur PSA total normale [27].
La symptomatologie clinique observée chez nos patients est conforme avec celle observée dans la littérature malgré des tableaux cliniques variables selon les cas [21 ; 22 ; 51].
La présentation clinique des sarcomes prostatiques la plus habituelle est la survenue d’une pollakiurie, la dysurie et la rétention complète d’urine. L’hématurie existe quand il y a un envahissement vésical et des signes non urinaires tels qu’une constipation, des ténesmes ou des faux besoins peuvent être observés s’il y a une compression ou un envahissement rectal. Les signes généraux sont toujours tardifs et témoignent de l’évolution de la maladie Au toucher rectal, l’augmentation de volume peut intéresser un seul lobe ou toute la prostate. Sa surface peut être régulière ou nodulaire. Sa consistance est habituellement moins ferme que l’adénome voire molle à tel point que le diagnostic d’abcès prostatique est parfois évoqué [15 ; 51].
Le dosage des taux de PSA total est le plus souvent dans les limites de la normale, en dehors des carcinosarcomes du fait de la composante adénocarcinomateuse de ces tumeurs [15].
Deux de nos patients avaient un PSA inferieur à 4 ng/ml et un patient avait un PSA à 8,52ng/ml. Ces valeurs normales du taux de PSA total pourraient s’expliquer par l’origine non épithéliale des sarcomes de la prostate [41].
Les examens d’imagerie (échographie, UIV, TDM et IRM) ne permettent que de faire le bilan d’extension local et général de la tumeur et ce n’est que l’étude histologique qui confirme le diagnostic [51].
L’étude histologique est réalisée à la suite d’une biopsie transrectale écho guidée dans la plupart des cas et moins souvent par une biopsie transpérinéale scanno-guidée ou à partir de la pièce opératoire d’adénomectomie ou de des copeaux de résection prostatique [44].
Chez deux de nos patients, la confirmation diagnostic a été faite à partir de la pièce opératoire d’adénomectomie .Ce diagnostic post opératoire s’explique par le fait que les signes cliniques retrouvés chez ces patients sont similaires à ceux retrouvés dans l’hypertrophie bénigne de la prostate.
Les études immunohistochimiques confirment la nature rhabdomyoblastique de la proliferation tumorale avec un marquage positif au KI67, un témoin de la prolifération [15,37].
Quant aux léimyosarcomes, ils expriment la vimentine et l’actine, l’immuno-réactivité pour la desmine n’est pas constante[7].
CHEVILLE [9] a constaté que les léïomyosarcomes expriment la vimentine dans 100% des cas, l’actine dans 63 % des cas et seulement dans 20%des cas la desmine.
Ces marquages positifs au KI67 ont été constatés chez un de nos malades qui avait un rhabdomyosarcome .Pour les 2 cas de léimyosarcomes, un cas a exprimé positivement la vimentine et l’actine. Le 2e cas, une étude immuno-histochimie n’a pas été réalisée.
L’association d’un sarcome au carcinome prostatique est possible. Cette tumeur est décrite sous le nom de carcinosarcome. La composante sarcomateuse ne doit pas être omise car le pronostic est plus péjoratif [4, 12, 17].
L’origine vésicale ou prostatique des sarcomes est parfois difficile à déterminer en raison de l’extension locorégionale fréquente lors du diagnostic [51].
La TDM et l’IRM permettent la délimitation précise de la tumeur par rapport aux tissus sains, élément important pour les tumeurs chirurgicalement résécables. Ils permettent aussi d’évaluer l’extension tumorale locorégionale ou à distance au niveau du foie, des poumons, des os et ganglions mais également dans l’estimation de la réponse thérapeutique [20].
La dissémination métastatique s’effectue par voie lymphatique et hématogène et la fréquence des métastases au moment du diagnostic varie entre 20 à 40%.
Généralement les poumons sont les sites métastatiques les plus communs de diffusion métastatique suivie par le foie et l’os [7].
Traitement et pronostic
Le traitement des sarcomes prostatiques n’est pas codifié, il inclut la chirurgie, la radiothérapie pré ou post opératoire et la chimiothérapie néo-adjuvante selon les cas [12 ; 49].
Le traitement dépend de l’âge, de l’état général, du volume tumoral, du grade de malignité et du bilan d’extension [3].
La chirurgie curative inclue une prostatectomie radicale retro pubienne ou une cystoprostatectomie radicale réalisant une exérèse en monobloc, macroscopiquement et microscopiquement complète, emportant l’ensemble de la tumeur, avec des marges saines de 1 à 2 cm [16 ; 44].
Dans notre étude un malade avait eu une cystoprostatectomie de rattrapage plus urétérostomie cutanée transiléale. Les marges chirurgicales étaient positives du coté de l’apex à l’analyse histologique de la pièce opératoire.
Sexton et al ont conclu que les marges chirurgicales négatives et l’absence de maladie métastatique lors de la présentation étaient prédictifs d’une survie favorable .Ils rapportent sur une série, 67 % de survie à 5 ans pour les patients « marges négatives » lors de la chirurgie contre 0 % chez les « marges positives »
[44]. La résection chirurgicale avec des marges négatives devrait être le but de la chirurgie, même si elle est parfois difficile à réaliser.
Les protocoles de chimiothérapie utilisés sont divers, mais le plus utilisé est le VAC : Vincristine (Oncovin®), Actinomycine D et Cyclophosphamide (Endoxan®). L’ifosfamide (Holoxan®) moins toxique quel’Endoxan® a tendance à le remplacer dans ce protocole [15]. Ils sont administrés sous forme de cure avec un intervalle de temps de repos variant de 2 à 4 semaines, la durée totale du traitement dans le rhabdo-myosarcome variant de 18 à 24 mois [15]. Dans notre étude, le cas du rhabdomyosarcome que nous avons rencontré, du fait de la taille trop importante de la tumeur nous avons pris comme option thérapeutique la chimiothérapie pour tenter de réduire la taille de la tumeur en vue d’une chirurgie d’exérèse.
Après ces 4 séances de cure, aucune diminution de taille de la tumeur n’avait été constatée à la tomodensitométrie de contrôle. Le patient signalait les mêmes plaintes et son état général s’altérait.
En traitement néo-adjuvant, la chimiothérapie a plusieurs intérêts théoriques : le traitement précoce de micro-métastases, la diminution de la diffusion métastatique au cours de la chirurgie, l’évaluation sur la pièce opératoire de la chimiosensibilité de la tumeur et l’amélioration de l’opérabilité des grosses tumeurs [16].
La sensibilité des sarcomes à la radiothérapie est bonne, et l’irradiation peut être délivrée par voie externe ou interstitielle. La radiothérapie est moins utilisée en traitement néo-adjuvant dans les sarcomes de prostate depuis l’association de la chimiothérapie néo-adjuvante à la chirurgie [15]. Sexton et al. [44] ont cependant démontré une diminution significative du volume tumoral lors d’une irradiation néo-adjuvante, ce qu’ils n’ont pas constaté sous chimiothérapie seule. Ils ont démontré de même une amélioration de la qualité carcinologique de la chirurgie après irradiation préopératoire.
La radiothérapie adjuvante à une chirurgie complète ou à une chirurgie microscopiquement ou macroscopiquement incomplète n’a pas été évaluée rigoureusement dans les sarcomes de prostate alors que ses résultats sont prometteurs sur le contrôle local de la maladie dans les sarcomes rétro-péritonéaux.
Étant donné la forte malignité des sarcomes prostatiques, le traitement multimodal agressif a été préconisé [51]. Sexton et al [44] suggèrent un avantage de survie pour les patients traités par une approche multimodale combiné, même si la chirurgie a été le pilier du traitement.
Le pronostic des sarcomes prostatiques est souvent défavorable [14,4]. La survie est très variable d’une série à l’autre et aucune étude ne précise la survie en fonction du stade évolutif et du grade tumoral. Néanmoins 3 facteurs sont déterminants pour le pronostic : un bas grade tumoral, les stades I et II et surtout une résection chirurgicale complète avec des marges microscopiques négatives [51].
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Table des matières
INTRODUCTION
ANATOMIE ET HISTOLOGIE
1- ANATOMIE
1-1-ANATOMIE DESCRIPTIVE
1-1-1-Situation
1-1-2-Configuration externe et dimensions
1-1-3-Structure et Fixité
1-1-4-Anatomie zonale de la prostate
1- 2-RAPPORTS DE LA PROSTATE
1-2-1-Loge prostatique
1-2-2-Rapports à l’intérieur de la loge prostatique
1-2-3-Rapports par l’intermédiaire de la loge prostatique
1-3-VASCULARISATION ET INNERVATION
2- HYSTOLOGIE DE LA PROSTATE
2-1-Composants Cellulaires Glandulaires
2-2-Composants Mésenchymenteux
2-3-La capsule prostatique
II-Epidémiologie
1-Incidence
2-Facteurs étiologiques
III-DIAGNOSTIC DES SARCOMES DE LA PROSTATE
1-Circonstances de découverte
2-Examen Clinique
3-Examens Complémentaires
3-1-Biologie
3-2-Imagérie
3-3-Biopsie Prostatique
4-Bilan d’extension
5-Classification
IV-TRAITEMENT
1-But
2-Moyens thérapeutiques
3-Indications
Observation N°1
Observation N° 2
Observation N°3
COMMENTAIRES
1- Aspects épidémiologiques
2- Aspects diagnostiques
3- Traitement et pronostic
CONCLUSION
REFERENCES
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