L’amélioration de l’accès au financement pour les entreprises, en particulier les Petites et Moyennes Entreprises (PME) fait l’objet d’une attention croissante en Afrique. Elle s’inscrit dans le cadre des programmes visant à promouvoir ce secteur. Au niveau de l’Union Economique et Monétaire Ouest Africaine (UEMOA), la question revêt également une importance majeure dans les différents pays où le développement des PME apparaît comme un levier stratégique pour la croissance économique, la création de l’emploi et la réduction de la pauvreté. Dans cette optique, des réflexions ont été menées à travers l’élaboration de Documents de Stratégie de Réduction de la Pauvreté (DSRP) prenant en compte le rôle important que doivent jouer les banques et autres établissements de crédit concernant le financement de ces PME.
Titrisation des crédits aux PME et financement des PME
Concept de titrisation
Ici, il s’agira pour nous d’expliquer le principe, les enjeux et les objectifs de la titrisation de créances des établissements de crédit.
Principe et objectifs de la titrisation
Pour aborder ce point, nous définirons d’abord le principe de la titrisation puis les objectifs de cette opération.
Principe de la titrisation
Selon Corynne JAFFEUX, la titrisation se définit comme « un véritable montage financier consistant à vendre un ensemble de créances à une entité créée à cet effet, le fonds commun de créances (FCC), qui finance cette acquisition par l’émission de titres ».
Le principe de la titrisation consiste pour toute entreprise à céder un portefeuille d’actifs illiquides à un FCC (véhicule de titrisation) qui se charge de les transformer en tranches de valeurs mobilières appelées titres , d’où l’expression « titrisation » (securitization en anglais). Ensuite, Le FCC paye du « cash » à l’entreprise cédante en s’endettant auprès d’investisseurs (acheteurs des titres sur le marché financier), lesquels versent des fonds et reçoivent en échanges des titres assortis d’intérêts et de conditions de remboursement suivant la maturité de l’opération. Le FCC agit sous le couvert de la société de gestion laquelle est contrôlée par le dépositaire dans ses prises de décisions relatives au bon déroulement de l’opération. La titrisation permet la levée des fonds par les entreprises. Les actifs cédés sont qualifiés d’actifs sous-jacents.
Les actifs sous-jacents peuvent être :
– des actifs financiers (prêts immobiliers, prêts aux entreprises, crédit de consommation, leasing automobile dettes résultant de « LBO’s » (Leasing Buy Out) ;
– des actifs corporels (immeubles, matériel de transport, le stock de matières premières) ;
– des actifs incorporels (Licences, Brevets, Marques) ;
– des créances probables et créances litigieuses (droit à réparation dans un contentieux) inscrites au bilan des entreprises .
Objectifs et risques de la titrisation
La mise en place d’une opération de titrisation est destinée à apporter une réponse aux besoins de financement des organisations qui s’analyse sous forme d’objectifs à atteindre. Les objectifs essentiels se déclinent comme suit :
– gestion du bilan : l’objectif est de rendre sa structure financière saine. Une réduction de la valeur du poste créances clients par exemple réduit le besoin en fonds de roulement de l’entreprise, améliore son ratio de liquidité et lui confère une flexibilité d’endettement plus importante permettant de rétablir les fonds propres.
– réduction de coût des ressources : par la titrisation, un émetteur peut obtenir des ressources à moindre coût par le biais d’un FCTC dont la qualité de signature est reconnue. L’analyse statistique des taux d’intérêt sur le marché des capitaux comparés à ceux du système bancaire permet d’illustrer cette disparité (« spread »). Les taux emprunteur sur la marché des capitaux est le plus souvent inférieur à celui du système bancaire . La titrisation est donc une source de financement « low cost ».
– amélioration des ratios d’exploitation : la titrisation est un outil de recyclage des créances, on vend des créances pour financer d’autres. Ainsi, les frais étant fixes et le niveau des fonds propres inchangé, une augmentation du volume financé peut se traduire par une amélioration de la rentabilité.
– relance de la croissance d’un secteur d’activité : la titrisation est également un moyen de relance économique. Elle a été utilisée aux Etats-Unis pour relancer le secteur de l’immobilier à travers la transformation des créances hypothécaires en titres. Ce qui a permis d’accroitre le volume de prêts immobiliers par recyclage des créances hypothécaires.
– adoption d’une solution de financement innovante : les institutions financières, en utilisant les ressources obtenues à moindre coût par la titrisation de leurs créances, ont la possibilité d’octroyer des crédits à leur clientèle à taux réduit. Ceci étant, les établissements de crédits peuvent, par ce mécanisme, mettre en place des produits programme de crédit « Product program » pour une clientèle bien ciblée .
Les opérations de titrisation, bien que profitables, présentent des risques opérationnels défavorables aussi bien pour les parties prenantes qu’à tout le système financier, à savoir:
– le risque de défaillances des intervenants : il existe toujours dès lors qu’on peut avoir un défaut de participation d’une des parties prenantes au processus.
– le risque de défaillance des débiteurs: les bénéficiaires de prêts non couverts à cent pourcent peuvent devenir insolvables à tout moment. De la sorte, la défaillance de la plupart des débiteurs conduit à un risque systémique (déstabilisation du système financier), étant entendu que les risques de crédit (principalement le risque de non remboursement) ne sont plus supportés seulement par les banques. Les déposants auprès des banques sont également exposés à ces risques ainsi que les détenteurs de titres de créances tout comme les établissements de crédit. Le cas illustratif est celui des créances hypothécaires aux USA pour lesquelles les ménages bénéficiaires de prêts immobiliers ont fait des défauts de paiement d’où la crise des « subprimes » à la suite des « bulls » de crédits hypothécaires.
– le risque de perturbation des flux financiers : ce risque est lié aux retards de paiement, aux remboursements anticipés et aux erreurs techniques qui peuvent avoir lieu. En conséquence, ces manquements entraineront forcément une désynchronisation entre les flux attendus par les détenteurs et les paiements réellement effectués par le FCTC.
La titrisation est donc une opération complexe qui exige la prise de garanties suffisantes avant sa mise en œuvre, afin d’éviter des crises financières.
Origines et enjeux de la titrisation
A travers cette rubrique, nous expliqueront les origines de la titrisation, identifier les principales catégories de titres qui en découlent et déterminer les enjeux économiques de cet outil de gestion.
Origines
Le mécanisme de titrisation a été mis au point aux Etats-Unis (USA). La première opération a été réalisée pour le compte de Ginnie Mae en 1970 par l’émission de titres adossés à des prêts hypothécaires connus sous le nom de « Mortgage Back-Securities » (MBS).
L’émission de titres issus d’actifs sous-jacents non hypothécaires de même nature a eu lieu en 1975 avec la titrisation des créances sur les contrats de leasings informatiques de la société Sperry Corporation. Cette catégorie de titres homogènes, tout comme les autres adossées à des crédits non hypothécaires, ayant une maturité de court terme, sont nommées « Asset Back-Securities » (ABS).
Les enjeux économiques de la titrisation
L’environnement financier international caractérisé par la crise financière qui perdure, conduit actuellement les principaux acteurs de l’économie mondiale que sont les Etats-Unis et les pays de l’Europe à la recherche de solutions durables en vue de relancer la croissance.
Au niveau de l’Europe, le marché européen peine à se remettre de sa crise. De plus les ABS subissent les effets d’une règlementation restrictive qui pénalise les investisseurs. Malgré ce contexte conjoncturel, M. Michel Barnier, commissaire européen pour le marché intérieur et les services a déclaré que : la titrisation a « le potentiel de débloquer des sources de financement supplémentaire pour l’économie » . Cette opinion encourage la titrisation en ce sens qu’elle accroit la capacité des banques à prêter davantage.
Dans les pays d’Afrique du Nord, à l’instar du Maroc, le marché de la titrisation a pris forme avec un développement progressif de la culture des marchés de capitaux. Trois opérations de titrisation portant sur les créances hypothécaires ont été déjà réalisées. Selon Siham Elouazaz et Mohamed Chbani « l’avenir de ce mode de financement s’annonce favorable ». La promulgation de loi 33- 06 permet l’élargissement du champ d’application à tout type de créance » . Cette évolution permet d’espérer une mise en route certaine d’opérations de titrisation de prêts aux PME dans cette région; surtout que le secteur des PME est présenté comme le levier de la croissance économique en Afrique.
La révision du cadre juridique relatif aux opérations de titrisation de plus en plus envisagée dans certains pays, notamment l’introduction de dispositions visant à étendre le champ d’application de cette technique à d’autres actifs sous-jacents tels que les crédits automobiles, les prêts à la consommation, les crédits aux PME. Ceci montre bien l’importance de ce montage financier à donner un coup de fouet à l’activité économique par le marché financier. Aux Etats-Unis par exemple, le législateur prévoit d’inclure les créances aux PME ou sur carte de crédit .
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Table des matières
REMERCIEMENTS
LISTE DES SIGLES ET ABREVIATIONS
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES FIGURES
LISTE DES GRAPHES
SOMMAIRE
INTRODUCTION
CHAPITRE I: Titrisation des crédits aux PME et financement des PME
I.1. Concept de titrisation
I.1.1 Principe et objectifs de la titrisation
I.1.1.1 Principe de la titrisation
I.1.1.2 Objectifs et risques de la titrisation
I.1.2. Origines et enjeux de la titrisation
I.1.2.1 Origines
I.1.2.2 Les enjeux économiques de la titrisation
I.2. Cadre juridique de la titrisation des créances négociables dans l’UEMOA
I.2.1 Caractéristiques des titres de créances négociables et actifs sous-jacents
I.2.1.1. Caractéristiques des titres des créances négociables
I.2.1.2. Les actifs sous-jacents
I.2.2. Capacité juridique d’un FCTC et des SFD
I.2.2.1. Qualité juridique du FCTC
I.2.2.2 Capacité juridique des SFD dans le contexte de la titrisation
I.3. Pratique des instruments financiers sur le marché monétaire
I.3.1. Fonctionnement des bons de trésors négociables
I.3.1. fonctionnement des autres TCN
I.4. Titrisation des prêts aux PME et modalité de financement des PME
I.4.1. Mécanisme général d’une opération de titrisation
I.4.1.1. Description du mécanisme d’une opération de titrisation
I.4.1.2. Types de titrisation
I.4.1.2.1. La titrisation classique
I.4.1.2.2. La titrisation synthétique
I.4.2 Titrisation des crédits aux PME des SFD et Financement des PME
I.4.2.1. Titrisation des crédits aux PME
I.4.2.2. Modalités de financement des PME
CHAPITRE II: Diagnostic stratégique et fonctionnement du FCTC VITALPME
II.1. Présentation et diagnostique stratégique
II.1.1 Présentation du FCTC VITALPME
II.1.2. Etude de marché
II.1.2.1. Présentation de l’enquête
II.1.2.2. Analyse de l’environnement économique
II.1.2.2.1.Analyse des facteurs économiques
II.1.2.2.2. Facteurs culturels
II.1.2.3. Analyse de l’offre
II.1.2.3.1. Marché des TCN
II.1.2.3.2. le marché des obligations et des actions
II.1.2.4. Analyse de la demande
II.1.2.4.1. La demande globale
II.1.2.4.2. La demande des ABS des SFD
II.2. Plan marketing
II.2.1.Le produit
II.2.2. La distribution
II.2.3. La communication
II.2.5. Diagnostic interne et externe
II.3 Mise en œuvre du projet FCTC VITALPME
II.3.1 Constitution du FCTC et désignation de gestionnaire de projet
II.3.1.1 Choix des Systèmes financiers décentralisés et signature de contrats
II.3.1.2. Origination, subordination et gestion des risques
CHAPITRE III: Etudes financières du projet
III.1. Volume prévisionnel de crédits aux PME à titriser et coût du projet
III.1.1. Volume de créances à titriser
III.1.2 Evaluation du coût du projet
III.2 Indicateurs d’activité et de performances financières
III.2.1 Détermination de la VAN et du TRI de VITALPME
III.2.2 La rentabilité du cédant et des investisseurs
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES
