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Viser des performances autorisant des usages multiples
De nombreux acteurs du domaine spatial projettent des missions ambitieuses en termes d’équipage humain, de charge utile et d’objectifs ; cf. III.2.b. Malgré ce constat, la démarche normale de conception d’un système électro générateur est de choisir une mission (automatique ou habitée, type de propulsion, trajectoire, etc.) puis concevoir le système en fonction des 14 besoins et contraintes alors connues, mais aussi dans leurs limites. Cette démarche a l’avantage de conduire à une solution parfaitement adaptée au besoin. Cependant cela constitue en soit aussi un inconvénient puisque cela empêche une forme de standardisation de la source d’énergie, susceptible de réduire les coûts, faciliter les procédures et donner la possibilité pour chaque système d’obtenir un retour d’expérience utilisable d’une mission à l’autre.
La démarche de la présente étude est donc originale par le choix de séparer la conception de la source d’énergie du choix de la mission : le système électro générateur, dont le réacteur, est vu comme un module indépendant destiné à être connecté à toute structure (module, véhicule, etc.) qui requiert une alimentation électrique. En conséquence, l’idée est de proposer une puissance dépassant les besoins les plus élevés envisagés, et ce nettement de sorte à prévenir des besoins non encore exprimés qui seraient plus élevés que ceux actuels. On note à ce sujet la puissance minimale requise de 3 kW par astronaute sur une base lunaire (hors ISRU et objectifs scientifiques) d’après la NASA d’une part (J. M. Hickman 1990), et d’autre part l’objectif poursuivi par la NASA quant au moteur à effet Hall X3, censé délivrer jusqu’à 8,5 N pour une impulsion spécifique comprise entre 1400 et 3200 s, avec une alimentation de 250 kW. (R. Florenz 2012) Des calculs d’ordres de grandeur sont présentés dans le cas de l’utilisation de ressources in-situ en III.2.b et dans le cas de la propulsion électrique en II.4.c. C’est donc la puissance de 1 MWe qui est visée, de façon arbitraire mais permettant de répondre à l’objectif choisi. Délivrer une telle puissance pilotable constituerait par ailleurs une rupture à même de multiplier les utilisations, donc d’auto alimenter ce modèle au sens de sa demande. Enfin, la durée de vie visée à cette puissance est de l’ordre de 15 ans, soit l’ordre de grandeur visé par la NASA dans son projet Kilopower. (D. I. Poston 2019)
Prendre en compte les contraintes du domaine
Concevoir un réacteur sans s’intéresser aux particularités d’une application spatiale prêterait le flanc à la critique dès les premiers aspects propres au domaine spatial considéré. L’objectif est donc de les prendre en compte au plus tôt.
En premier lieu, les contraintes de masse et d’encombrement étant prépondérantes pour toute charge utile placée sur un lanceur, on choisit donc la masse spécifique comme critère commun aux différentes sous parties de l’étude. La masse spécifique d’un système électro générateur s’exprime en kg/kWe, c’est la masse du système entier normalisée par la puissance électrique délivrée. Dans cette étude, l’encombrement n’est considéré qu’au travers de l’aire de surface rayonnante nécessaire pour rayonner la puissance thermique non convertie. La littérature montre en effet que c’est le sous-système le plus encombrant ; cf. III.1.
L’objectif général détaillé au III.2 de concevoir un système indépendamment de son utilisation implique un objectif technique : celui d’avoir la possibilité d’arrêter et redémarrer le réacteur si nécessaire. Cela requiert d’être pris en compte au moment de choisir et étudier le système de contrôle de réactivité. Ce dernier est aussi lié à la sûreté du réacteur, implicite à tout design. Celle-ci doit être assurée tant dans les phases opérationnelles au sol, au lancement puis en opération que dans les phases accidentelles telles qu’une explosion du lanceur ou une rentrée atmosphérique.
Enfin, l’idée est d’adopter une approche globale comprenant non pas seulement le réacteur, mais aussi et surtout en même temps, le cycle de conversion, la source froide et le bouclier notamment.
Démarche suivie pour cette étude
Concrètement, l’étude présentée dans ce mémoire s’est appuyée sur plusieurs aspects principaux. On montre en Figure 1 une représentation des moyens mis en œuvre pour étudier ces aspects ainsi que les principaux liens qui les relient entre eux.
En premier lieu, l’idée est d’étudier les deux aspects principaux du sujet que sont la génération de puissance par le réacteur et sa transformation par un système de conversion. Pour ce qui est du réacteur, on s’intéresse d’abord uniquement à la neutronique, du point de vue de la criticité et de l’évaluation des contre-réactions. L’objectif est d’obtenir un premier design au sens des matériaux mis en œuvre et de la géométrie. En ce qui concerne le circuit de conversion, on se concentre d’abord sur la modélisation du cycle de conversion, puis on intègre la source froide. L’objectif ici est de chercher la combinaison d’un cycle et d’une source froide qui est optimale du point de vue de la surface et/ou de la masse de cette dernière, et de connaître la puissance thermique nécessaire pour une puissance électrique donnée.
Dans un second temps, il faut relier ces deux aspects afin d’une part d’obtenir des caractéristiques communes et d’autre part d’évaluer la cohérence des caractéristiques obtenues séparément. En pratique cela se traduit par l’utilisation de la puissance thermique requise issue des calculs de cycles pour un calcul évoluant sur le cœur tel que conçu via la neutronique. Le premier indicateur pour s’assurer de la cohérence entre les aspects cœur et conversion est là encore la puissance thermique. Pour cela, on s’appuie sur des calculs de CFD pour évaluer les températures nécessaires à l’extraction de la puissance thermique requise par le cycle de conversion pour délivrer l’objectif de puissance électrique. L’idée est d’adapter le design en prenant en compte ce résultat si nécessaire.
Enfin, pour pouvoir comparer le système électro générateur dans sa totalité, on choisit pour critère la puissance spécifique, soit la puissance électrique délivrée par kg au niveau du système entier. Il manque donc à évaluer la masse de la radio protection nécessaire associée au réacteur et à sa puissance pour pouvoir obtenir la masse totale du système.
Physiques, propriétés et méthodes
Neutronique des réacteurs
Rappels fondamentaux de neutronique
Le but de cette discipline est d’étudier le comportement des neutrons afin d’en tirer des conclusions macroscopiques. Les neutrons peuvent interagir de différentes manières avec les noyaux des atomes du milieu dans lequel ils se trouvent, interactions qui dépendent de leur vitesse i.e. leur énergie et de l’isotope concerné. Pour rendre compte des probabilités qu’un neutron d’énergie donnée rencontrant le noyau d’un isotope spécifique conduise à une interaction en particulier, on dispose de sections efficaces microscopiques. Ainsi comme on peut le voir sur la représentation de la section efficace microscopique de fission de l’235U en Figure 2, la section efficace (donc la probabilité) que l’interaction d’un neutron avec un noyau d’235U conduise à une fission est plus grande à une faible énergie du neutron, par exemple 0,05 qu’à une énergie plus élevée telle que 2 .
D’où finalement, dans le cas d’égalité, donc un cycle sans entropie créée, l’efficacité de Carnot du moteur présentée en Équation (29). Si on conserve l’inégalité, on constate que c’est l’efficacité maximale entre les deux températures données. = 1 − (29)
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Table des matières
Remerciements
Table des figures
Table des tableaux
I. Introduction
1. Cadre général
2. Objectifs de la thèse
a. Explorer une réponse fondée sur la technologie des RSF
b. Viser des performances autorisant des usages multiples
c. Prendre en compte les contraintes du domaine
3. Démarche suivie pour cette étude
II. Physiques, propriétés et méthodes
1. Neutronique des réacteurs
a. Rappels fondamentaux de neutronique
b. Notions de réactivité et de masse critique
c. Phénomènes de contre-réaction dans un réacteur à combustible liquide
d. Evolution des noyaux lourds et produits de fission
e. La technologie des réacteurs à sels fondus
2. Transport de l’énergie thermique
a. Mécanismes de transferts thermiques
b. Les caloducs capillaires
3. Conversion de l’énergie
a. Conversions statiques
b. Rappels fondamentaux de thermodynamique
c. Thermodynamique d’une machine thermique
d. Conversions dynamiques
e. Propriétés du mercure et du potassium
4. Eléments sur la propulsion nucléaire électrique
a. Description générale et caractéristiques
b. Radioprotection des réacteurs spatiaux
c. Ordres de grandeurs
5. Méthode d’optimisation par algorithme génétique
III. Eléments de contexte
1. Historique des réacteurs spatiaux
a. Réacteurs nucléaires spatiaux ayant volé
b. Projets de réacteurs spatiaux électrogènes non aboutis
2. Contexte spatial actuel
a. Innovation et sociologie de l’énergie
b. Dynamiques actuelles dans le secteur spatial
c. Réponses en développement aux Etats-Unis et en Russie
3. Historique et actualité des réacteurs à sels fondus
4. Considérations environnementales
IV. Conception et étude du cœur et du bouclier
1. Préconception du cœur
a. Choix du sel et du matériau réflecteur
b. Etude de sensibilité sur un pré-design intégrant les fonctions principales
c. Etude des contre réactions en température et du placement des barres
2. Prise en compte de différentes contraintes sur le cœur
a. Contraintes technologiques
b. Contraintes de sûreté
c. Choix sur les contraintes
d. Description générale du design
e. Etude paramétrique et sélection d’une version
3. Etude du contrôle de réactivité pour un démarrage autonome
4. Etude de la durée de vie sur le critère de réactivité
a. Etude dans le cas du design sélectionné
b. Etude sur un design modifié pour optimiser la durée de vie critique
5. Etude thermique du cœur
a. Cadre de l’étude : géométrie et source de puissance
b. Influence du débit de réfrigérant lithium
6. Etude de deux designs de bouclier
V. Elaboration et optimisation du système de conversion et sa source froide
1. Choix des technologies de conversion et de source froide
2. Elaboration de corrélations sur les propriétés du mercure et du potassium
3. Implémentation des méthodes de calculs de cycles
a. Implémentation d’une méthode de calcul de cycle de Brayton
b. Implémentation d’une méthode de calcul de cycle de Rankine
4. Evaluation du transfert thermique sur un radiateur simplifié
5. Méthode de recherche de combinaisons par optimisation génétique
6. Caractérisation de l’option utilisant un cycle de Brayton
7. Caractérisation des options utilisant un cycle de Rankine au mercure
8. Caractérisation des options utilisant un cycle de Rankine au potassium
a. Cas d’un radiateur à caloducs
b. Cas d’un radiateur à gouttelettes liquides-solides
VI. Conclusion
1. Remarques générales
a. Validation du positionnement en puissance par le contexte
b. Différents paramètres pour le design du cœur
c. L’importance de la source froide du point de vue de la masse
2. Limites de l’étude
a. Cœur du réacteur et bouclier anti radiations
b. Cycles de conversion et sources froides
3. Propositions de systèmes du réacteur à la source froide
a. Système le plus réalisable
b. Système le plus performant
c. Système de compromis
4. Perspectives et suites possibles
a. Etude chimique du cœur : corrosion et transitions de phases
b. Etude dynamique du cœur : couplage neutronique-thermohydraulique
c. Etude mécanique et thermique du cœur : dilatation, vibrations au lancement
d. Réalisation de méta modèle du cœur et du bouclier
e. Optimisation de la masse du système entier en utilisant les métas modèles
VII. Résumé général
1. Résumé en français
2. Résumé en anglais
VIII. Références
IX. Annexes
1. Premier principe de la thermodynamique en système ouvert
2. Calculs pour la recharge (ISRU) d’un vaisseau Starship
3. Graphite nucléaire, propriétés, applications
4. Script de calcul de composition de sel en at/b.cm pour TRIPOLI-4®
5. Guide pratique pour le calcul TRIPOLI-4® évoluant
6. Détails sur les scripts à l’étude thermohydraulique du cœur
a. Construction du maillage pour le calcul CFD
b. Modification du champ de taux de fission en champ de puissance volumique
7. Elaboration de corrélations sur les propriétés du mercure et du potassium
a. Expression de la température de saturation en fonction de la pression
b. Expression de l’entropie spécifique de la vapeur sèche
c. Expression de la masse volumique de la vapeur sèche
d. Expressions des entropies spécifiques du liquide et de la vapeur à la saturation pour le mercure e. Expression de l’enthalpie massique de vaporisation du mercure
8. Script de la méthode de calcul de cycle Brayton
9. Démonstration de l’expression de la surface rayonnante d’un radiateur dans le cas d’un refroidissement du fluide
10. Logigramme de l’algorithme de calcul de cycle Rankine
11. Prise en main de PYMOO
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