L’organocatalyse : aminocatalyse asymetrique

Généralités sur la catalyse

La catalyse est un processus qui accélère une réaction chimique. En activant un ou plusieurs réactifs, le catalyseur ne modifie pas l’équation bilan de la réaction, mais le chemin réactionnel suivi : l’état de transition est remplacé par un autre, dont l’énergie d’activation est moins élevée. La réaction nécessite ainsi moins d’énergie pour s’effectuer. De plus, le catalyseur peut favoriser un produit plutôt qu’un autre et même contrôler la stéréosélectivité de la réaction. Cela implique que l’un des chemins réactionnels est favorisé par rapport aux autres ce qui se traduit par une sélectivité de la réaction en faveur du produit issu de cet état de transition. La catalyse, et tout particulièrement la catalyse asymétrique, a connu un développement considérable au cours des dernières décennies. Cet essor est dû à l’utilisation d’une faible quantité d’espèce chirale en tant que catalyseur, tout en étant en accord avec deux prérequis qui ont façonné la synthèse organique récente : la nécessité croissante d’obtenir des molécules chirales complexes de manières simple, rapide et efficace, et celle d’établir des méthodologies synthétiques plus respectueuses de l’environnement. La catalyse moléculaire peut être divisée en plusieurs catégories dépendant de la nature de la molécule employée comme catalyseur : par exemple, la biocatalyse, un mime des processus chimiques cellulaires et qui emploie des enzymes  comme catalyseurs ; la catalyse organométallique qui a recours à un centre métallique coordonné à un ou plusieurs ligands et l’organocatalyse qui utilise de petites molécules organiques comme catalyseurs.

Introduction à l’organocatalyse

Les organocatalyseurs sont de petites molécules organiques capables d’activer différentes fonctions chimiques grâce à leur(s) site(s) chimique(s) appelé(s) notamment site catalytique. Les différents modes d’activation peuvent être classés selon leur nature chimique (base de Lewis, base de Brønsted, acide de Brønsted, acide de Lewis ). Cette classification a été introduite par Benjamin List en 2005.Contrairement aux trois autres modes d’activation, les bases de Lewis se lient de manière covalente au substrat à activer. Certains catalyseurs sont dits « multifonctionnels », c’est-à-dire qu’ils présentent deux ou plusieurs groupements fonctionnels distincts capables d’interagir soit en tant qu’acide soit en tant que base avec les substrats mis en jeu. Il existe plusieurs grandes familles de catalyseurs organiques chiraux, telles que les acides phosphoriques, les carbènes N hétérocycliques (NHC), les (thio)urées ou les amines telles que les alcaloïdes, les acides aminés ou les peptides (Figure 2). Ces derniers sont au cœur des travaux décrits dans ce manuscrit.

En 1912, Georg Breding a utilisé des alcaloïdes naturels issus du quinquina, la (-)-quinine 4 ou son stéréoisomère la (+)-quinidine, comme catalyseur pour la réaction d’addition de l’acide cyanhydrique 2 sur le benzaldéhyde 1 .

L’utilisation des acides aminés ou de leurs dérivés est très efficace dans diverses réactions, néanmoins ces catalyseurs restent assez simples. Il existe plusieurs limitations telles qu’une charge catalytique élevée ou des durées de réaction longue. Afin de pallier ces limitations, il est possible d’envisager de modifier la structure du catalyseur en la rendant plus fonctionnalisée pour apporter une ou des interactions supplémentaires. Afin d’accroître le niveau de complexité des mécanismes catalytiques, des organocatalyseurs multifonctionnels, tels que les peptides, ont été introduits pour activer plusieurs substrats grâce à différents sites d’activation. A l’instar de la L-Proline, ils ont montré un potentiel tout à fait intéressant en tant qu’organocatalyseurs chiraux.  Cela permet de complexifier la structure du catalyseur 20 par une simple réaction de couplage peptidique et d’augmenter son activité, permettant ainsi de réduire la charge catalytique .

Dans ce cadre, les peptides ont été employés comme aminocatalyseurs asymétriques depuis plus d’une décennie. Résistants à l’air et l’eau, ils ne nécessitent donc pas de précautions particulières lors de leur utilisation, et sont compatibles avec un grand nombre de conditions réactionnelles. Ils donnent le plus souvent de très bons résultats, en particulier concernant l’énantiosélectivité de la réaction qu’ils catalysent.  Tout ceci en fait des catalyseurs de choix. Les travaux décrits dans ce manuscrit se concentreront sur l’utilisation de dérivés peptidiques en aminocatalyse asymétrique.

Les modes d’activation 

Trois grands modes d’activation sont actuellement admis : l’activation via une énamine ou via un iminium et l’activation SOMO.

Activation énamine 

L’activation par une énamine met en jeu un dérivé carbonylé (cétone ou aldéhyde) énolisable et le plus souvent une amine secondaire conduisant à la formation d’un intermédiaire iminium. L’acidité du proton en position α devient, par conséquent, plus importante (diminution de la LUMO) permettant une prototropie pour l’équilibre imine/énamine conduisant à l’énamine correspondante. Cette entité nucléophile peut alors réagir avec des entités électrophiles permettant ainsi de réaliser des additions ou des substitutions nucléophiles (Figure 4). L’hydrolyse de l’iminium D résultant permettra de régénérer le catalyseur en libérant le nouveau dérivé carbonylé.

Le cycle catalytique débute par l’addition de l’aminocatalyseur sur un composé carbonylé (ici dans notre cas, un aldéhyde), formant l’hémiaminal A. L’iminium B est ensuite formé et donne l’énamine C correspondante. Cette énamine C est favorisée par rapport à la forme iminium B car l’équilibre B/C iminium/énamine est en faveur de la forme tautomère énamine du fait de sa stabilité par rapport à la forme iminium .La nucléophilie du centre en position α est alors exaltée. Cette position peut donc être fonctionnalisée par un électrophile de façon irréversible. C’est durant cette étape de fonctionalisation que l’énantiosélectivité est induite par la présence du catalyseur chiral. Après l’addition nucléophile, l’hydrolyse de l’iminium intermédiaire D permet la régénération du catalyseur et l’obtention du produit attendu .

L’activation énamine peut également être effectuée à l’aide d’une amine primaire . Dans ce cas, le cycle catalytique est légèrement modifié par deux équilibres imine/iminium B qu’on ne retrouve pas dans le cycle catalytique avec une amine secondaire.

Le cycle catalytique débute par la formation d’un hémiaminal A. L’iminium B est ensuite formé et donne l’énamine C correspondante comme dans le cas d’une amine secondaire. Cependant lors de l’étape B un équilibre imine/iminium est en jeu. Après l’addition nucléophile, l’hydrolyse du composé intermédiaire D permet la régénération du catalyseur et l’obtention du produit. Cependant, un équilibre iminium/imine est en jeu. Il est alors nécessaire de se placer en milieu acide afin de favoriser la formation de l’intermédiaire iminium qui est plus facilement hydrolysable que l’intermédiaire imine. En conclusion, l’étape limitante est l’équilibre imine/iminium où l’apport d’un proton acide est nécessaire pour former l’intermédiaire iminium qui est la forme la plus favorable pour l’hydrolyse acide (Figure 5). Ce mécanisme de formation d’énamine est universel pour les amines secondaires et primaires et par conséquent le terme de catalyse énamine a été attribué à ce type d’activation. Il intervient principalement dans les réactions d’aldolisation et de Mannich asymétriques.

Activation énamine : stéréoselectivité 

En général, l’excellent énantiocontrôle de la réaction est dû principalement à deux paramètres :
– Le rôle du groupement orienteur, porté par le catalyseur.
– La configuration et la conformation de l’énamine intermédiaire.

Le groupement orienteur contrôle la stéréosélectivité en favorisant par liaison hydrogène ou en défavorisant par encombrement stérique l’approche de l’électrophile sur une face de l’énamine par rapport à l’autre (Figure 6). Si le catalyseur possède un groupement très encombrant, comme c’est le cas pour le catalyseur de Hayashi-Jørgensen (Figure 6), alors l’encombrement de ce groupement va défavoriser l’approche de l’électrophile sur la face supérieure Ré de l’énamine.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
CHAPITRE I : L’ORGANOCATALYSE : AMINOCATALYSE ASYMETRIQUE
1.Généralités sur la catalyse
2.Introduction à l’organocatalyse
2.1. L’essor de l’aminocatalyse asymétrique
3.Les modes d’activation
3.1. Activation énamine
3.2. Activation énamine : stéréoselectivité
3.3. Cas particulier : l’utilisation d’une hydroxycétone
3.4. Activation iminium
3.5. Activation SOMO
4.La réaction d’aldolisation croisée énantiosélective
4.1. La réaction d’aldolisation intramoléculaire
4.2. La réaction d’aldolisation intermoléculaire
4.2.1. Cas particulier : Utilisation d’un aminocatalyseur contenant une amine primaire
4.2.2. Utilisation de catalyseur sur support
4.2.2.1. Catalyse sur support solide
4.2.2.2. Catalyse sur support soluble
5.Conclusion
CHAPITRE 2 : GENERALITES : LIQUIDES IONIQUES
1.Définition des liquides ioniques
2.Nomenclature
3.Propriétés physico-chimiques des liquides ioniques
3.1. Densité
3.2. Température de fusion
3.2.1. Nature du cation
3.2.2. Nature de l’anion
3.2.3. Longueurs de la chaîne alkyle
3.3. Pression vapeur saturante
3.4. Viscosité
3.5. Polarité
3.6. Solubilité
3.7. Stabilité thermique
4.Synthèse de liquides ioniques
4.1. Réaction de quaternisation
4.2. Réaction d’échange d’anions (métathèse d’anion)
5.Applications des liquides ioniques
5.1. Electrochimie
5.2. Applications industrielles
5.3. Application en synthèse
5.3.1. Synthèse asymétrique
5.3.2. Catalyse asymétrique
5.3.2.1. Catalyse organométallique
5.3.2.2. Catalyse enzymatique
5.3.2.3. Organocatalyse
5.3.2.3.1. Organocatalyse sur support ionique
6.Conclusion
CHAPITRE 3 : ELABORATION D’ORGANOCATALYSEURS CHIRAUX SUR SUPPORT IONIQUE A BASE D’HISTIDINE
1.Stratégie de la construction des organocatalyseurs chiraux
2.Résultats et discussion
2.1. Synthèse de la plateforme histidinium
2.1.1. Formation de l’ester méthylique
2.1.2. Formation de l’urée cyclique
2.1.3. Alkylation en position N-1
2.1.4. Ouverture de l’urée cyclique et protection en position N-3
2.1.5. Alkylation en position N-2
2.1.6. Métathèse d’anion
2.2. Formation de sels histidinium de types dérivés aminoacide
2.2.1. Déprotection totale du sel histidinium
2.2.2. Déprotection sélective en position N-terminale
2.2.3. Déprotection sélective en position C-terminale
2.3. Choix du partenaire acide aminé
2.3.1. Synthèse de la N-Boc-(L)-proline 109
2.3.2. Synthèse de la N-Boc-(L)-alanine 110
3.Synthèse de dérivés peptidiques
3.1. Rappel bibliographique
3.1.1. Les peptides : structure et nomenclature
3.1.2. La synthèse peptidique
3.1.3. Activation de l’extrémité C-terminale
3.1.4. Les agents de couplage
4.Formation de dérivés dipeptides
4.1. Le couplage peptidique
4.2. Déprotection sélective des composés 115 et 116 en position N-terminale
4.3. Déprotection totale des sels 114 et 115
5.Formation de tripeptide
5.1. Formation des dipeptides linéaires
5.2. Couplage peptidique entre le composé 127 et la plateforme histidinium 105
5.3. Déprotection sélective du composé 129 en position Nterminale
6.Conclusion
CHAPITRE 4 : APPLICATION SUR LA REACTION D’ALDOLISATION CROISEE
1.Réaction d’aldolisation croisée énantiosélective en milieu organique
1.1. Catalyse avec les composés possédant une fonction ester méthylique
1.1.1. Catalyse avec le dérivé aminoester 107
1.1.2. Influence de l’ajout d’un additif
1.1.3. Catalyse avec les dérivés dipeptides 116 et 119
1.1.4. Catalyse avec le dérivé tripeptide 131
1.2. Catalyse avec les composés possédant une fonction acide carboxylique libre
1.2.1. Catalyse avec le dérivé aminoacide 102
1.2.2. Catalyse avec le dérivé dipeptide 120
1.2.2.1. Influence du solvant
1.2.2.2. Influence de la charge catalytique
1.2.2.3. Influence de l’ajout d’un additif sur la réaction
1.2.3. Catalyse avec le dérivé dipeptide
1.2.3.1. Influence du solvant sur la réactivité
1.2.3.2. Etude sur l’Influence du substituant de l’aldéhyde
1.2.3.3. Influence de la nature de la cétone
2.Réaction d’aldolisation en milieu liquide ionique
2.1. Catalyse par le composé 121 en milieu ionique
2.1.1. Utilisation de liquides ioniques contenant l’anion NTf2
2.1.2. Catalyse avec des liquides ioniques contenant un anion différent
2.1.3. Influence de l’effet électronique de l’aldéhyde
2.1.4. Catalyse entre le benzaldéhyde et l’acétone dans différents liquides ioniques
2.2. Essais de catalyse avec le composé
2.3. Recyclage du catalyseur supporté
2.3.1. Etude sur l’influence de la charge catalytique
3.Conclusion
CONCLUSION GENERALE

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