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L’incidence fiscale ou charge fiscale excédentaire en équilibre partiel
Si on veut déterminer qui supporte le fardeau fiscal il convient tout d’abord de distinguer le point d’impact d’une taxe et son point d’incidence.
Les points d’impact et d’incidence fiscale
Le point d’impact d’une taxe correspond à l’agent identifié par la loi fiscale comme devant remettre le montant de la taxe à l’Etat; c’est celui qui écrit le chèque par exemple. On désigne parfois le point d’impact par le terme d’incidence légale.
En ce qui concerne le point d’incidence d’une taxe, il s’agit de l’agent qui supporte véritablement le fardeau de la taxe, celui dont le bien-être est réduit à cause de la taxe. On utilise aussi le terme d’incidence économique dans ce cas. L’impôt sur les bénéfices des sociétés a comme point d’impact les sociétés. En effet ce sont les sociétés qui doivent remettre l’impôt à l’Etat. Mais tout impôt est en dernier ressort supporté par des personnes non pas des institutions.
Modèle de base et les déterminants de l’incidence fiscale en équilibre partiel
L’approche la plus simple de l’incidence fiscale consiste à isoler le marché considéré. Supposons qu’on crée une taxe sur un certain bien dont le prix d’équilibre était jusqu’alors P*(7). Le prix payé par les acheteurs P0=(P*+t) et le prix perçu par les vendeurs (C0) différeront donc du montant de la taxe. Si les vendeurs répercutent entièrement la taxe sur leurs prix de vente en maintenant P0=P*, ils ne parviendront pas à écouler toute la quantité de bien qu’ils souhaitent vendre, puisque l’instauration de la taxe réduit la demande. Un nouvel équilibre ne peut donc pas s’établir que si les vendeurs acceptent de réduire leur prix de vente.
Ainsi l’incidence fiscale ne dépend pas de l’identité de l’agent qui doit remettre la taxe à l’Etat. Elle dépend plutôt des conditions du marché. Précisément il s’agit de l’élasticité de l’offre et de la demande. Ce sont ces élasticités qui déterminent dans quelle mesure une taxe se répercute sur le prix du produit taxé. Une taxe est supportée par l’acheteur dans la mesure même où elle se traduit par une hausse de prix. Elle est supportée par le vendeur lorsque le prix n’augmente pas. Théoriquement, suivant Dalton(8), plus les agents sont en mesure de modifier leur comportement, c’est à dire plus leur demande ou leur offre est élastique, plus ils évitent la taxe; celle-ci est alors répercutée sur leurs partenaires dans l’échange. De l’acheteur et du vendeur, celui qui est le plus flexible peut le plus éviter la taxe et la répercuter à l’autre. Si l’acheteur accepte de consommer moins du produit taxé quand son prix augmente, cela force le vendeur à absorber lui-même la taxe plutôt que d’augmenter son prix et de perdre ses clients. Le vendeur choisit alors de réduire sa marge bénéficiaire plutôt que de perdre des clients. En revanche, si l’acheteur est peu sensible au prix, le vendeur peut lui répercuter la taxe sous forme de hausse de prix, sans crainte de perdre beaucoup de clients.
Pour être fixé sur l’effet des élasticités sur le partage de la charge fiscale et l’équilibre économique nous allons faire une analyse graphique de quelques situations suivant les présentations de Gillespie et Vermaeten (9). Dans tous les cas la perte de bien-être est toujours illustrée par le triangle hachuré et la taxe est identique dans les quatre cas.
Dans tous les cas, la courbe d’offre se déplace vers le haut du montant de la taxe(10). Le consommateur supporte l’effet de la taxe car le prix payé augmente de P* à P0. Le producteur subit aussi l’effet de la taxe car le prix reçu diminue de P* à C0. Comme les courbes d’offre et de demande sont également inélastiques, la hausse du prix payé par les consommateurs est identique à la baisse de prix reçu par les producteurs et les recettes fiscales (rectangles A et C) sont réparties également entre les deux agents (rectangle A pour les consommateurs et rectangle C pour les producteurs). La perte de bien-être illustrée par le triangle hachuré ou triangle de Dupuit, qui représente la charge excédentaire ou perte sèche de la collectivité engendrée par le transfert de ressources du secteur privé vers le secteur public et les distorsions qu’il a crées, est faible car les quantités transigées ont peu diminué.
Comme les courbes d’offre et de demande sont également élastiques, les recettes fiscales (A+C) sont réparties également entre les deux agents. La perte de bien-être illustrée par le triangle hachuré est importante car les quantités transigées ont fortement diminué.
Comme les courbes d’offre et de demande sont également élastiques, les recettes fiscales (A+C) sont réparties également entre les deux agents. La perte de bien-être illustrée par le triangle hachuré est importante car les quantités transigées ont fortement diminué.
Comme nous le voyons sur le graphique n°5 le fardeau fiscal est partagé par le vendeur et le consommateur. Cette analyse graphique confirme encore une fois que l’incidence ne dépend pas de celui que la loi désigne mais des élasticités relatives.
Il se dégage une conclusion fondamentale de l’analyse précédente : peu importe la personne désignée par la loi comme devant payer une taxe au gouvernement, peu importe le point d’impact d’une taxe, son incidence dépend des élasticités relatives de l’offre et de la demande du bien taxé. Ce résultat est mal compris par nombre d’intervenants en matière de taxation. Cela explique probablement que la plupart des régimes fiscaux prévoient des cotisations patronales et des cotisations salariales pour financer les programmes de sécurité sociale. Or ce n’est pas parce qu’une cotisation est patronale qu’elle est supportée par le patron; elle peut fort bien être supportée par le salarié. Et ce n’est pas parce qu’une cotisation est salariale qu’elle est supportée par le salarié. Dans les deux cas, les parts respectives du salarié et du patron dépendent essentiellement de l’élasticité relative de l’offre et de la demande de main-d’oeuvre.
L’analyse qui a été faite en équilibre partiel suppose que les intervenants se conduisent de manière parfaitement concurrentielle. Mais il convient de remarquer que lorsque les producteurs jouissent d’un pouvoir de marché, les résultats sont assez différents. Le cas du monopole a été pris par Salanié pour illustrer cette situation .Il se trouve que le prix toutes taxes comprises augmente de plus que le montant de la taxe, ce qui est impossible sur un marché concurrentiel (13).
Le critère de neutralité sous l’angle de l’optimalité économique
Comme nous l’avons démontré dans la section précédente l’introduction d’un impôt comporte automatiquement une perte de revenu de la part des agents économiques en fonction de l’élasticité de l’offre et de la demande. Le prélèvement fiscal entraîne donc forcément un effet de revenu. Un impôt qui entraîne uniquement un tel effet est neutre par rapport à l’allocation des ressources. Toutefois il engendre une charge fiscale excédentaire.
Le critère de neutralité de l’impôt permet donc de préciser les conditions d’une affectation optimale des ressources malgré l’intervention fiscale du secteur public. La neutralité serait donc un critère essentiel qu’un impôt devrait satisfaire (14).
Mais pour être neutre, un impôt ne doit pas modifier les conditions d’équilibre atteintes sur les trois marchés(15). Une violation de ces conditions se produit lorsque l’introduction d’un impôt entraîne un effet de substitution. C’est par exemple le cas d’un impôt sur la consommation qui frappe deux biens de manière différente (à des taux différents).
En d’autres termes l’impôt le plus efficace en théorie est celui qui ne peut être répercuté et qui ne déforme pas la structure des prix relatifs. Il n’exerce qu’un effet revenu (une ponction sur le pouvoir d’achat de l’individu) et pas d’effet de substitution. En effet on considère qu’en modifiant les choix des agents économiques, par effet de substitution, un impôt(16) occasionne une charge sur l’économie hors budget de l’État.
Il faut noter que la position d’équilibre est définie par les conditions d’optimalité de Pareto:l’optimum économique se définit par l’égalité entre les taux marginaux de transformation (TMT) et de substitution (TMS) et cela dans les trois marchés,des produits, des facteurs de production et des capitaux. Prenant comme exemple le marché des produits, les deux taux s’expliquent de la façon suivante :
– taux marginal de substitution: il s’agit de la quantité supplémentaire d’un bien qu’un agent accepte d’acquérir en sacrifiant une unité d’un autre bien lorsque les prix relatifs varient;
– taux marginal de transformation: il s’agit de la quantité supplémentaire d’un bien qu’un agent peut techniquement acquérir ou produire en sacrifiant une unité de l’autre bien.
Les impôts ayant pour effet de modifier les prix des biens et des facteurs de production, les distorsions seront d’autant plus fortes que les décisions des agents économiques seront sensibles au prix. Encore une fois l’importance de leurs réactions à l’impôt dépend de la valeur de l’élasticité de leurs offres et de leurs demandes par rapport aux prix et revenu.
Ainsi un impôt sur la consommation qui ne s’appliquerait qu’à un seul bien de première nécessité, sans substitut, ne créerait quasiment pas de distorsions car la demande de ce bien est rigide par rapport au prix. C’est ainsi que la règle de taxation optimale de Ramsey-Boiteux, précise que les taux d’imposition des biens doivent être inversement proportionnels à l’élasticité de leur demande afin de minimiser l’effet de substitution et de ce fait les distorsions.
Effet d’un impôt sur le choix des consommations
La question de la neutralité de l’impôt est expliquée ici sur le seul marché des biens de consommation. Pour être fixé sur la neutralité d’un impôt sur le comportement d’un agent économique nous allons prendre l’application d’un impôt général et sélectif sur deux biens X et Y à travers une analyse graphique.
Hypothèses
Les agents économiques n’ont à choisir qu’entre deux biens X et Y.
La décision dont il est question n’affecte pas leur comportement en matière de loisirs et d’épargne.
La situation initiale est formalisée dans un marché de concurrence pure.
Le rendement fiscal est supposé constant.
Les courbes d’indifférence I1, I2, I3 sont homogènes et représentent les préférences d’un individu type.
Equilibre initial
L’équilibre initial se trouve en E, au point de tangence entre la ligne du budget ab et la courbe d’indifférence I3. Avec son revenu, le consommateur type peut acheter une quantité (0a) de produit Y ou (0b) de produit X. Compte tenu de ses préférences, il choisit la combinaison (0l) de bien Y et (0m) de bien X.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : DE L’EFFICACITE ECONOMIQUE D’UN IMPOT AUX VERTUS DE LA TVA
Chapitre 1. Les effets économiques de la fiscalité : incidence et neutralité fiscale
1.1. L’incidence fiscale ou charge fiscale excédentaire en équilibre partiel
1.1.1. Les points d’impact et d’incidence fiscale
1.1.2. Modèle de base et les déterminants de l’incidence fiscale en équilibre partiel
1.2. Le critère de neutralité sous l’angle de l’optimalité économique
1.2.1. Effet d’un impôt sur le choix des consommations
1.2.1.1. Impôt général sur la consommation de X et Y
1.2.1.2. Impôt sélectif sur la consommation du seul bien X
1.3. Des critères complémentaires d’évaluation d’un impôt :
1.3.1. Le critère de rendement
1.3.2. Le critère de simplicité
1.3.2.1. La transparence et l’accessibilité des règles fiscales
1.3.2.2. L’information condition d’acceptation de l’impôt
1.3.3. Le critère de flexibilité
1.3.4. Le critère de stabilité
Chapitre 2. Les principes vertueux de la Taxe sur la Valeur Ajoutée
2.1. La TVA, un impôt neutre
2.1.1. La neutralité de la TVA par rapport au circuit économique
2.1.2. La neutralité par rapport au coût des intrants de production
2.1.3. La neutralité au plan international de la TVA
2.2. La TVA, levier de la performance fiscale
2.2.1. Le caractère « leader » de la TVA
2.2.2. Le caractère réactif de la TVA
Chapitre 3. Des effets induits des vertus de la TVA
3.1. Le caractère informatif de la TVA sur le recouvrement des autres impôts
3.2. La TVA dans la modernisation de la pratique des affaires
3.2.1. Les obligations relatives à la TVA
3.2.2. Les incidences des obligations sur la normalisation des affaires
3.3. La transition fiscale, nécessité du développement
3.4. La TVA pilier de la transition fiscale
CONCLUSION PARTIELLE
DEUXIEME PARTIE : DES REALITES CONTRAIRES AUX FONDEMENTS DE LA TVA A MADAGASCAR
Chapitre 1. De l’importance du secteur informel :incapacité à collecter la TVA
1.1. Hétérogénéité du niveau de développement de la pratique des affaires
1.1.1. Importances socio-économiques du secteur informel
1.1.2. L’incapacité du secteur informel à collecter la TVA
1.1.3. Des micros entreprises au seuil de la légalité
1.2. Insuffisance d’information des contribuables
1.2.1. Les actions d’information de l’administration fiscale
1.3. Influence des contraintes socio-économiques dans la politique fiscale
1.3.1. Des considérations économiques dans la politique fiscale
1.3.2. Des considérations sociales dans la politique fiscale
Chapitre 2. Des entorses au fondement de la TVA et au principe de simplicité
2.1. Des distorsions et limitations de la neutralité de la TVA
2.1.1. Des rémanences, sources de distorsions
2.1.1.1. Les distorsions des choix de production
2.1.1.2. Les distorsions des choix de consommation
2.1.1.3. Des distorsions de concurrence sur le marché domestique et au niveau international
2.1.1.4. Un coût de gestion accru pour les assujettis et redevables partiels
2.2. Les causes des distorsions et limitations du droit à déduction
2.2.1. Les causes de la limitation du champ des opérations taxables
2.2.2. Des causes à l’origine de la limitation du droit à déduction
2.2.2.1. La limitation du droit à déduction, contre partie des limitations du champ des opérations taxables
2.2.2.2. La limitation du droit à déduction propre à certaines catégories de dépenses
2.3. Des entorses à la logique de la TVA à Madagascar
2.3.1. La dualité de TCA(), source de distorsions de concurrence
2.3.2. Des limitations au droit à déduction
2.3.3. Des butoirs au remboursement de crédit de TVA
2.4. Des imperfections dans le texte légal de la TVA
2.4.1. Des lacunes dans la rédaction du dispositif de la TVA à Madagascar
Chapitre 3. Des performances limitées de la TVA
3.1. Performance fiscale insuffisante de la TVA
3.1.1. Des manques à gagner sur les mesures exceptionnelles
3.1.2. Des insuffisances comparatives de la performance de la TVA
3.2. Généralisation insuffisante de la TVA
3.2.1. Importance de la fraude en matière de la TVA
3.2.2. Des actions insuffisantes sur la lutte contre les fraudes
3.3. Hypothèque de la transition fiscale
CONCLUSION PARTIELLE
TROISIEME PARTIE : DES AJUSTEMENTS NECESSAIRES AU MODELE ET A LA GESTION DE LA TVA MALGACHE
Chapitre 1. Des ajustements dans l’application des principes sous tendant la TVA
1.1. Elargissement du champ d’application de la TVA
1.1.1. La suppression de la TST optimisation du rendement de la TVA
1.1.2. L’assujettissement des micros-activités à la TVA
1.1.3. Assujettissement du secteur agricole à la TVA
1.2. La réduction des exonérations en matière de TVA
1.2.1. Portée limitée des exonérations en matière d’investissement
1.2.2. Révision des exonérations conventionnelles
1.3. Optimisation du remboursement du crédit de TVA
1.3.1. Amélioration du dispositif de remboursement des crédit de TVA au profit des entreprises
1.3.2. Une meilleure neutralité de la TVA sur les projets à financement extérieur
Chapitre 2. Des ajustements qualitatifs au dispositif et à la gestion de la TVA
2.1. L’amélioration du dispositif de la TVA
2.1.1. Rédaction homogène et précise du dispositif
2.1.2. Adoption de textes d’application accessibles
2.2. L’accessibilité au dispositif de la TVA
2.2.1. Adoption de la démarche Information – Education- Communication
2.2.2. Stratégie de proximité à travers les centres de gestion
2.3. Des ajustements qualitatifs à la gestion de la TVA, des conditions d’efficacité
2.3.1. Fondements d’un seuil d’imposition relativement élevé avec possibilité d’option pour l’assujettissement à la TVA
2.3.2. Rationalisation du contrôle fiscal en matière de TVA
2.3.3. Nécessité de l’identification des contribuables, instrument de gestion de la TVA
Chapitre 3. Les impacts de l’élargissement du champ d’application de la TVA
3.1. Des effets d’amélioration de l’administration fiscale
3.2. Les effets de la TVA sur la lutte contre la pauvreté
3.2.1. Des effets sociaux inconnus des exonérations de TVA
3.2.2. Les effets des tranches sociales de TVA sur la lutte contre la pauvreté
3.2.3. Le nombre de taux optimal et augmentation de prix
3.3. Les impacts budgétaires de l’élargissement du champ d’application de la TVA
3.3.1. L’efficacité budgétaire de la TVA suivant la règle de PARETO
3.3.2. Manque à gagner « limité» lié à la suppression de la TST
3.3.3. Les activités frauduleuses, potentielles de recettes de TVA
CONCLUSION PARTIELLE
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
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