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Vers un apprentissage pratique de la citoyenneté (Les instructions officielles).
Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture
Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture ( Bulletin Officiel du 31 mars 2015) identifie les compétences et connaissances qui doivent être acquises à l’issue de la scolarité obligatoire dans le cadre d’une culture commune. Il s’articule autour de cinq domaines donnant une vision d’ensemble des objectifs des programmes de l’école élémentaire et du collège. Sa maitrise s’acquiert progressivement pendant les trois cycles de l’école élémentaire et du collège.7 Ce mémoire est en lien essentiellement avec le troisième domaine, intitulé la formation de la personne et du citoyen.
Ce dernier permet de définir du cycle 2 jusqu’à la fin du cycle 4, un ensemble d’aptitudes à vivre ensemble, à coopérer, à travailler et à exister dans une même société. C’est dans ce cadre que les élèves sont amenés à suivre un parcours citoyen8 visant à la construction d’un jugement moral et civique, à l’acquisition d’un esprit critique et d’une culture de l’engagement.
Les programmes
Les programmes en général
L’instruction morale et civique a été introduite en 1882 par Jules Ferry dans le but de remplacer l‘instruction religieuse. Il ne s’agit plus de former de « bons chrétiens » mais plutôt des citoyens éclairés défendant des idéaux et valeurs de la République : la dignité de l’homme, la solidarité, les libertés fondamentales acquises sous la révolution. Cette discipline a connu de multiples rebondissements dont sa disparition dans les programmes de 2002, puis son retour dans le bulletin Hors-série N°3 du 19 juin 2008, confirmant l’idée que la citoyenneté nécessitait une formation.
Les dernières instructions officielles datent du 26 juillet 2018 et insistent sur 3 finalités intimement liées entre elles :
• Respecter autrui et construire une « conscience de la dignité et de l’intégrité de la personne humaine » ;
• Acquérir et partager les valeurs de la République autour des « quatre principes majeurs de la République française : la liberté, l’égalité, la fraternité et la laïcité »
• Construire une culture civique dans un « espace démocratique ». Cette culture morale et civique prend en compte quatre dimensions correspondantes aux objectifs du socle commun de connaissances, de compétences et de culture détaillés ci- dessus.
– la sensibilité qui vise à l’acquisition d’une conscience morale par un travail sur l’expression, l’identification, la mise en mots et la discussion des émotions et des sentiments ;
– la règle et le droit qui visent à l’acquisition du sens des règles du vivre ensemble ;
– le jugement qui permet de comprendre et de discuter les choix moraux rencontrés par chacun au cours de sa vie ;
– l’engagement qui permet la mise en pratique de cet enseignement en insistant sur l’esprit d’autonomie, de coopération et de responsabilité vis-à-vis d’autrui.
Présentation du contexte et du profil de la classe
La classe compte 26 élèves de CE2 âgés de 8 ans environ provenant de deux classes différentes : un CP-CE1 et un CE1-CE2, à part égale. Deux élèves présentent des besoins particuliers : un élève handicapé moteur accompagné par une AVS et un élève au comportement difficile (impulsivité, gestion difficile des émotions) bénéficiant d’un protocole de soins plusieurs fois par semaine.
Dès les premières semaines après la rentrée, certaines problématiques liées au profil de la classe ont émergé.
J’ai constaté que les élèves éprouvent des difficultés en classe à travailler en groupe. La répartition des tâches est difficile. J’ai pu remarquer que souvent le travail se fait par coopération et non par collaboration. En effet, les élèves participent aux taches séparément sans un réel partage sur le travail final. J’arrive à en délaisser certaines modalités de travail afin d’éviter des débordements excessifs.
Dans le cadre de la méthode heuristique de mathématiques de N. PINEL, il est proposé d’organiser un rallye mathématiques constitué de 4 manches réparties tout au long de l’année scolaire. La classe est divisée en 4 groupes. L’objectif est collectif car c’est l’ensemble des points de toutes les équipes qui leur permettra de battre ou non la famille mathématiques (famille fictive). Chaque équipe est constituée de 6 à 7 élèves qui résolvent 3 problèmes sur les 4 proposés. Pour gagner un maximum de points, ils doivent écrire le calcul et expliquer comment ils ont fait. La première manche de ce rallye mathématiques illustre très bien le constat énoncé précédemment. En effet, les élèves se sont criés dessus. J’ai vu peu d’échanges, chacun défendait son idée sans écouter l’autre. J’ai pu voir que certains n’ont rien fait (exclusion par les autres, passivité) alors que d’autres ont pratiquement tout fait seul. L’atmosphère est pesante et non productive. Ici, cette situation questionne leur difficulté à répartir les tâches mais aussi le sens donné à un travail de groupe. Sont-ils conscients des forces d’un travail à plusieurs ? Je m’interroge également sur le rôle de l’enseignante dans ce cadre.
Ce premier constat m’a amené à définir précisément les termes de coopération et de collaboration. « Dans le cadre d’un travail réalisé de façon coopérative, il y aura une répartition claire du travail entre ses participants. De façon concrète, il sera assigné à chaque élève une tâche claire et concrète. Par la suite, les travaux individuels de chaque élève seront assemblés et formeront le travail final. Dans cette forme de travail l’apprenant sera responsable de sa propre production, mais il devra néanmoins apprendre à interagir avec les autres participants afin que le travail final puisse être cohérent. » Alors que dans le cadre « d’un travail réalisé de façon collaborative, il n’y aura aucune répartition du travail entre ses participants. En effet ces derniers travailleront tous ensemble à chaque étape de l’élaboration du travail. Il sera donc impossible, une fois le travail réalisé, d’identifier le travail fourni par chacun. Ce type de travail se base sur les capacités de communication et d’interaction de chacun. »10.
Le problème soulevé au sein de la classe réside dans les interactions avec les autres. Chacun est centré sur soi-même et ne trouve aucun intérêt dans le travail collectif. La vie collective est donc difficile et fait émerger une multitude de petits problèmes (conflits) entre élèves pouvant perturber la classe. Les élèves se comparent, se jugent.
Il m’est arrivé parfois de suspendre le cours de la séance pour régler des situations difficiles entre élèves souvent liées à une mauvaise communication. Par exemple, lors d’un travail individuel sur l’ardoise les élèves ayant commis une erreur sont victimes de remarques. On peut s’interroger sur leur rapport à l’erreur et l’estime de soi.
Ces comportements varient selon la nature de la tâche à effectuer. J’ai constaté que les élèves sont beaucoup plus dans un esprit de compétition lorsque le travail concerne du français ou des mathématiques. Alors que dans les matières secondaires, comme questionner le monde, l’art plastique ou en éducation musicale, les élèves s’ouvrent les uns ou autres. Ils semblent plus détendus. Est-ce qu’ils hiérarchisent les matières selon un degré d’importance ou de préférence ? Le climat de classe me semble un bon indicateur de l’efficacité de mon action.
Certainement en raison d’un manque de maturité, les élèvent ont sans cesse besoin de moi pour les moindres détails. Ils ne manifestent aucune autonomie. Cela questionne le rôle de l’enseignante : dois-je intervenir pour tout ? Ou ne pourrais-je pas déléguer quelques responsabilités ?
De plus, les problèmes perdurent hors de la classe (cour de récréation, garderie, cantine) avec en prime certaines violences physiques qui apparaissent. On peut se demander quelles sont les limites à ne pas franchir connues des élèves en termes de communication et de comportement. Face à ces constats, j’ai remarqué que ces attitudes inappropriées engendrent un climat de méfiance qui nuit aux apprentissages. Cet environnement ne permet pas aux élèves d’être attentifs, d’être concentrés, de comprendre ou de mémoriser correctement. Par conséquent, je souhaite réagir et travailler dans le but de créer une ambiance d’entraide, de collaboration, d’écoute afin que les élèves prennent du plaisir à travailler ensemble dans un respect réciproque. Vygotsky prétend que les interactions sociales sont primordiales dans un apprentissage. On apprend avec les autres. Ce climat d’échanges encouragera la communication entre eux, à tous les niveaux.
Je sais que pour que naisse le désir de collaborer, les élèves doivent pouvoir élaborer, dès le début de l’année, des projets collectifs motivants dont la réussite nécessite l’échange, la solidarité, la coopération et la participation de tous. Les enfants doivent apprendre à collaborer efficacement afin d’atteindre un but commun clairement explicité en amont. Pour développer ces compétences, le rôle de l’enseignant est essentiel. Je dois être à la fois exigeante et bienveillante pour favoriser l’estime de soi et la confiance en soi des élèves, cela signifie une attitude compréhensive et ferme. De plus, il est important d’être à l’écoute de chacun, d’encourager l’autonomie et de veiller à éviter toute discrimination et dévalorisation entre élèves.
Plusieurs projets ont vu le jour, un exposé en anglais par groupe, l’écriture et la mise en scène de saynètes pour la fête de Noël et la création d’une œuvre collective en art plastique (la colombe de la paix de PICASSO).
J’ai aussi pris l’initiative de commencer un cycle de danse dans le cadre de l’éducation physique et sportive. La danse permet d’apprendre à mieux communiquer grâce à la pratique d’une activité artistique. Cette activité physique permet d’exprimer corporellement seul ou en groupe des sentiments, des émotions ou des états d’âmes aux autres. Cette expression est possible seulement si certaines conditions sont respectées comme l’écoute, le respect et l’empathie.
Ces projets ont su créer de l’émulation, de la motivation et quelques moments forts d’interactions. Mais ils ne suffisent pas à créer un bon climat de classe durable 16 et propice aux apprentissages. Les bagarres (violences physiques), les taquineries et les moqueries (violences verbales) persistent. Les élèves restent centrés sur eux-mêmes et expriment peu leurs ressentis, leurs émotions. J’ai la sensation d’être un gendarme plutôt qu’une maitresse.
En résumé, par rapport à ces lectures, je fais le choix de mobiliser quelques principes forts dans ma pratique :
– Exiger un vocabulaire adapté dans la cour et dans la classe ;
– Aider les élèves à verbaliser leur ressenti dans différentes situations, que ce soit leurs réussites, leurs progrès, leurs erreurs mais aussi d’un point de vue social ;
– Amener les élèves à se décentrer d’eux-mêmes en prenant en compte d’autres points de vue et en faisant preuve d’empathie ;
– Mieux anticiper les moments de jeux collectifs : expliciter ce que j’attends du comportement des élèves ;
– Retravailler la place de la valorisation, de l’enrôlement et la place de l’erreur ;
– Accompagner mes élèves à apprendre à travailler en groupe. Cette modalité n’est pas innée, elle s’apprend.
J’ai donc cherché comment outiller mes élèves pour les faire évoluer et les aider à gérer les petits conflits du quotidien qui parasitent les apprentissages et le climat de classe. Les dispositifs choisis devront être en cohérence avec les finalités de l’enseignement moral et civique. Ils doivent permettre : d’éduquer les élèves à l’expression des émotions, des sentiments et des valeurs en ayant recours aux expériences de vie. L’ensemble des dispositifs devront se compléter dans le but d’amener les élèves à traiter de façon autonome les différends ou les petits conflits.
Après quelques recherches, je me suis rendue compte qu’il existait une multitude d’outils, d’astuces ou de dispositifs plus ou moins chronophages pouvant contribuer à mon objectif. Mais comment faire mon choix ?
Mes premières hypothèses émergeantes sont :
– Envisager de mettre en place un outil de gestion individuel du comportement, ce qui permettrait de valoriser le savoir-être de chaque élève.
J’aimerai mettre en place un outil dans lequel l’élève évaluerait son comportement en fin de semaine. Je noterai également mon avis. De plus, cela permettrait de créer un lien avec les familles en laissant une trace pour les parents qui se demandent souvent « Comment ça se passe en classe ? ».
– Proposer une séquence sur le vocabulaire des émotions. Dans le but, d’amener les enfants à affiner la perception de leurs émotions et de celles des autres.
– Organiser la mise en place de conseils d’élèves avec l’élection d’un bureau (président, secrétaire …). L’idée serait d’ouvrir un espace de discussion pour améliorer la vie de la classe en réglant les conflits, en parlant des projets ou en félicitant les camarades.
– La mise en place des messages clairs serait un levier pour doter les élèves d’une technique leur permettant de commencer à autogérer leurs petits conflits entre eux.
– La mise en place de médiations par les pairs serait un complément apporter à la technique des messages clairs. Le médiateur pourrait intervenir en tant que régulateur pour aider les auteurs du conflit à trouver une solution.
Pour être au plus proche de la réalité du terrain, j’ai choisi de créer une enquête en ligne (Janvier 2019) visant à interroger d’autres enseignants. Après avoir partagé celle-ci sur un réseau social, j’ai réussi à recueillir 32 témoignages. De par mon peu d’expérience, cette démarche me semblait très intéressante pour recueillir un maximum de problèmes, de solutions et de résultats auprès d’enseignants plus ou moins expérimentés.
Les compétences développées par le conseil d’élèves
La pratique du conseil d’élèves à l’école primaire ne bénéficie pas d’une institutionnalisation officielle qui permettrait de dégager facilement les compétences qui lui sont liées. J’ai donc choisi de m’appuyer sur les effets du conseil d’élèves décrits par C. MARSOLLIER15 au regard de son expérience en classe afin définir des compétences travaillées par le conseil d’élèves.
Certaines compétences travaillées par le conseil d’élèves selon C.MARSOLLIER permettent de montrer que ce dispositif repose sur des compétences et des attitudes en regard des textes officiels : du socle commun de connaissances, de compétences et de culture et des programmes de 2018 de l’enseignement moral et civique.
Lors de l’écriture de son livre C.MARSOLLIER était maitre de conférences en sciences de l’éducation à l’IUFM de la Réunion ( 2004). Il a mené des recherches sur les rapports des enseignants à l’innovation, sur la relation pédagogique et notamment sur la mise en œuvre de la démocratie à l’école. Ses résultats se basent sur des données statistiques et permettent un éclairage sur l’impact de la pratique du conseil sur les compétences et comportements des élèves.
Les obstacles et les limites liés au conseil d’élèves
Les obstacles que rencontrent les enseignants dans la pratique du conseil sont multiples et peuvent venir des trois pôles fondateurs du triangle pédagogique17 (le savoir, les élèves et l’enseignant) ainsi que des deux principaux partenaires de la communauté éducative (les parents d’élèves et les collègues de l’école) :
Le savoir : difficulté concernant la nature des sujets et des questions traités en conseil. Il s’agira d’identifier précisément le savoir en jeu en amont.
HOUSSAYE
Les élèves : problèmes de gestion des comportements verbaux et non-verbaux au cours des réunions.
L’enseignant : difficulté à assumer un nouveau rôle ( structurer les débats, gérer les conflits et le temps) et à maitriser son propre comportement lors du conseil.
Par sa vocation démocratique, le conseil d’élèves est une rupture totale avec l’enseignement traditionnel, où le maitre planifie, organise et dirige seul les activités des élèves et leurs échanges verbaux. La relation pédagogique avec l’enseignant est donc reconsidérée. En effet, le discours du maitre n’est plus à sens unique, il suscite des échanges. C’est n’est plus l’adulte qui détient le pouvoir exclusif des activités pédagogiques et dicte la loi. La parole des enfants prend un poids considérable et se trouve déterminante pour la vie de la classe. L’esprit de compétition doit laisser place à la solidarité et à la coopération.
Les parents d’élèves : manque de soutien, incompréhension voire désaccord de leur part, difficulté à faire face au changement de comportement de l’enfant à la maison.
Les collègues de l’école : remise en question, marginalisation, désaccord de principe, absence de continuité pédagogique.
La technique des messages clairs
Les messages clairs ont été inventés par Danielle Jasmin, enseignante en primaire au Québec, et ses élèves. Lors du conseil de coopération, ses élèves avaient tendance à vouloir régler des conflits personnels rencontrés avec d’autres camarades. Elle a donc mis en place cet outil de communication. Le message clair peut se définir comme un échange verbal entre deux élèves en relation duelle visant à la résolution de petits conflits entre pairs. Le principe est de s’intéresser aux solutions plutôt qu’aux raisons du conflit. On oriente la discussion vers la résolution non-violente de petits différends, de manière à désamorcer de petits conflits entre pairs, dans un esprit de responsabilité, de respect mutuel et de construction de l’autonomie18.
L’exploration pédagogique des dispositifs en lien avec la pratique
La mise en œuvre du conseil d’élèves
Le conseil d’élèves est adaptable à tous les cycles et peut prendre des formes diverses, mais dans tous les cas, sa mise en place ne s’improvise pas. Il faut faire des choix quant à sa fréquence, sa durée, son dispositif ou bien encore ses objectifs.
L’organisation des conseils
La première tâche consiste à procéder à l’élection du bureau pour faciliter la gestion des discussions entre élèves. Ce bureau doit assurer le bon fonctionnement du conseil, mais n’a aucun pouvoir. L’élection s’est déroulée dans la classe de la façon suivante : trop d’élèves étaient intéressés par un poste, nous avons donc procédé à un tirage au sort de 5 prénoms. Les 5 élèves candidats ont mené une campagne pendant une semaine (affiche, discours) puis la classe a procédé à un vote écrit et anonyme. Celui qui a obtenu le plus de voix a été élu président, le deuxième : vice-président, le troisième : secrétaire, le quatrième : maitre du temps et le cinquième : remplaçant.
Puis nous avons pensé ensemble à des règles régissant ces conseils. Cette recherche collective a permis à chacun de contribuer à construire les « lois » du conseil, pour pouvoir ensuite l’interroger, l’amender et veiller à son respect lors des moments d’échanges. Les premières règles concernent le devoir de respecter la parole et donc la possibilité d’être entendu (l’écoute). Ils ont ajouté spontanément : on ne se moque pas et on demande la parole en levant le doigt. Ce cadre permet à de nombreux élèves de progresser dans la prise d’initiatives et de responsabilités, de se sentir plus confiants et motivés à participer à la vie de la classe. Ces lois ont été écrites sur une affiche et les élèves ont apposé leurs signatures dessus. Cette trace écrite 21permet de s’y référer en cas de non-respect et permet d’illustrer l’engagement de tous. Elle sera affichée dans la classe.
J’ai expliqué et mis à la disposition des élèves trois boites : je félicite, je souhaite parler de…, j’ai un problème. Les élèves annotent un papier et le glissent dans la boite correspondante. L’objectif de départ était de lire et traiter un maximum de demandes et de trouver des solutions collectivement lors des conseils.
La disposition des élèves est en rond afin que l’ensemble des élèves puisse voir le visage de ses camarades.
D’après Dominique BUCHETON22, la posture adoptée par l’enseignant face à sa classe a une grande influence. Ce geste professionnel a des effets tant sur les élèves que sur les modalités d’apprentissages . Ce professeur a identifié 6 postures possibles. Lors de ces conseils, j’ai choisi de prendre deux postures différentes : une posture professionnelle d’ accompagnement mais aussi une posture de lâcher-prise. BUCHETON définit la posture d’accompagnement comme une aide ponctuelle (individuelle ou collective), en fonction de la tâche et des obstacles à surmonter. L’enseignant provoque des discussions entre élèves. Il se retient d’intervenir et observe plus qu’il ne parle. J’ai choisi de m’assoir parmi les élèves et de demander la parole à chaque fois que je souhaite m’exprimer. Mon but est aussi de me retirer pour faire place aux élèves. J’ai donc adopté une posture de lâcher-prise ( de mise en retrait) à différents moments. BUCHETON définit cette dernière comme un gage de confiance envers les élèves. L’enseignant assigne aux élèves la responsabilité de leur travail et les autorise à expérimenter les chemins qu’ils choisissent.
L’exercice de l’esprit critique, la découverte de la démocratie et du respect des droits dégagent des horizons de liberté chez les enfants qui retentissent parfois sur leur comportement en famille. Nous avons donc choisi avec le titulaire de la classe de tenir informées les familles par un blog 23sur internet mis à jour régulièrement, intitulé « Mieux vivre ensemble ».
Le premier conseil
Lors de la préparation du premier conseil, j’ai assisté à un déferlement de plaintes en tous genres dans la boite à problèmes (27 papiers). 24J’ai eu le sentiment que les élèves avaient besoin d’expurger en quelque sorte une part des mal-être accumulés au cours des années précédentes. J’ai donc décidé de redistribuer un papier par élève avant le conseil dans le but de recueillir les demandes les plus importantes à traiter. Après la lecture de seulement deux papiers, le conseil d’élèves s’est transformé en un véritable tribunal nourri par des dénonciations, une mauvaise communication et un mutisme complet chez certains.
Un premier constat peut être fait. C’était une mauvaise idée de redonner un papier avant le conseil car certains problèmes étaient trop récents pour les traiter. Les élèves n’avaient aucune prise de distance. De plus, ce phénomène de délation lié aux prénoms sur les papiers, déclenche la libération de la parole individuelle et la possibilité de porter publiquement une plainte. Ces petits problèmes du genre «untel a bavardé avec untel », « untel a piqué la gomme d’untel »… pourraient être gérés différemment. Comme l’évoque C. MARSOLLIER 25« En grandissant, la vie relationnelle à l’école, avec ses joies et ses conflits quotidiens, prend souvent tellement le pas, dans l’esprit de nombreux élèves, sur leurs apprentissages, que lorsqu’ils rentrent à leur domicile, c’est bien souvent le premier sujet qu’ils évoquent spontanément avec leurs parents ou leurs frères et sœurs .C’est à l’occasion de récit de tous ces événements relationnels (blagues, rencontres, conflits, menaces, etc.) que jalonnent plus ou moins leur quotidien scolaire qu’ils conscientisent et affirment leur propre personnalité et se construisent en ajustant et adaptant leurs regards sur les comportements sociaux. ».
En effet, le conseil permet de consacrer une durée significative à l’analyse collective et institutionnelle de certains de ces problèmes et permet à chacun d’interroger et développer son sens de la justice, du respect des biens et des personnes, du respect de la loi et de la responsabilité individuelle et collective. En revanche, j’ai constaté que tous les problèmes n’ont pas la même gravité et qu’ils ne peuvent être traités de façon identique. De plus, le but des conseils n’est pas de régler exclusivement des conflits interindividuels présents ou passés. Je dois revoir mon accompagnement afin d’amener les élèves à construire leur futur et éviter que le conseil ne devienne un tribunal.
Dans une logique de projet interdisciplinaire en art visuel et en Enseignement Moral et Civique, nous avons étudié le film « Vice-Versa » 26. D’après Mateus JOFFILY, 27neuroscientifique spécialiste des émotions, ce film souligne à quel point nos émotions sont liées à notre vécu, à notre expérience ; « Telle sensation provoque un cocktail de sensations, lesquelles vont susciter une émotion particulière ». L’étude de ce film avait pour objectif pédagogique de réfléchir sur les émotions : de les décrire, d’expliquer leurs rôles et leurs évolutions.
Dans le prolongement, les élèves ont créé un livret des émotions 28avec des émoticônes représentant le dégout, la peur, la tristesse, la joie, colère et la surprise. Ces deux activités permettent aux élèves de mieux comprendre leurs ressentis et de mettre des mots sur leurs émotions.
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Table des matières
Remerciements
Introduction
1. Cadre de l’étude : les conflits
A. La notion et les rôles du conflit
B. Les types de conflits
C. Les causes du conflit
D. Les différentes attitudes face au conflit
2. Qu’attend-on de l’enseignement moral et civique aujourd’hui ?
A. Pourquoi les enfants apprennent-ils à devenir citoyens ?
3. Vers un apprentissage pratique de la citoyenneté (Les instructions officielles).
A. Le socle commun de connaissances, de compétences et de culture
B. Les programmes
1. Les programmes en général
2. Les attendus de fin de cycle 2
3. Présentation du contexte et du profil de la classe
4. Les dispositifs retenus
A. Le conseil d’élèves
1. Les compétences développées par le conseil d’élèves
2. Les intérêts de mener des conseils d’élèves en classe
3. Les obstacles et les limites liés au conseil d’élèves
B. La technique des messages clairs
1. Les compétences développées par la technique des messages clairs
2. La démarche des messages clairs
C. Les médiations entre élèves
1. Les compétences développées par les élèves médiateurs
2. Les intérêts et les dérives à éviter avec les élèves médiateurs
5. L’exploration pédagogique des dispositifs en lien avec la pratique
A. La mise en œuvre du conseil d’élèves
1. L’organisation des conseils
2. Le premier conseil
3. Deuxième conseil
4. Troisième conseil
5. Le quatrième conseil
B. La mise en œuvre de la technique des messages clairs
6. Qu’est-ce qu’un message clair ?
7. Dans quelles situations utilisées les messages clairs ?
8. Apprendre et mémoriser la formulation dans le cadre de jeux de rôle.
C. La mise en place de la médiation entre élèves
6. Analyse des dispositifs utilisés en classe
A. Les observations initiales
B. L’évaluation des compétences en enseignement moral et civique
C. Les avancées observées grâce à ces dispositifs de manière générale
Conclusion
Bibliographie
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