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Les diplômes nationaux de l’enseignement supérieur.
Les diplômes nationaux de l’enseignement supérieur connaissent donc un régime qui diffère complètement des diplômes nationaux soumis aux Commissions Professionnelles Consultatives. Actuellement, ils dépendent de la loi n°84-52 du 26 janvier 1984 sur l’enseignement supérieur et plus précisément de son article 17.
Ce texte affirme solennellement le monopole de l’Etat en matière de collation des grades et titres universitaires. Véritablement instauré par la loi de 1880, ce monopole ne concerne pas la formation elle-même mais se manifeste par la légitimité des professeurs de l’enseignement public à examiner les candidats aux diplômes délivrés par l’Etat. La pertinence de ce principe fut remise en question en 1968 avec la loi d’orientation sur l’enseignement supérieur. Devenues autonomes, les universités y sont-elles toujours soumises ou peuvent-elles délivrer leurs propres diplômes ? En réalité, la loi de 1968, telle qu’elle était rédigée, ne remettait pas en cause la prérogative exclusive de l’Etat. Les universités se voyaient attribuer une certaine liberté en matière d’enseignement mais pas dans le domaine de la certification. La plupart des interrogations trouvaient leur origine dans l’abandon par la loi de 1968 de toute référence aux grades au profit d’une nouvelle notion, les diplômes nationaux 134: « les règles communes pour la poursuite des études conduisant à des diplômes nationaux relevant du ministère de l’éducation nationale, les conditions d’obtention de ces diplômes et les modalités de protection des titres qu’ils confèrent sont définies par le ministre (…) ». Cette référence au régime des diplômes nationaux ne s’accompagne d’aucune définition de cette catégorie de certifications. Ce n’est qu’en 1971135 que seront enfin définis les diplômes nationaux: « Sont considérés comme diplômes nationaux, les diplômes qui confèrent l’un des grades ou titres universitaires dont la liste est établie par décret pris sur avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche ». Pour autant, il n’est nullement question de monopole de délivrance de ces diplômes par l’Etat.
La confusion entre diplôme, grade et titre
La loi de 1984 rétablit donc solennellement la compétence exclusive des autorités publiques en matière de délivrance de diplômes136 mettant fin à toute illusion sur les compétences des établissements supérieurs. Suit une reprise de la définition posée par la loi de 1971 : « Les diplômes nationaux délivrés par les établissements sont ceux qui confèrent l’un des grades ou titres universitaires dont la liste est établie par décret pris sur avis du conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche. (…) Un diplôme national confère les mêmes droits à tous ses titulaires quelque soit l’établissement qui l’a délivré ». Deux éléments apparaissent pour définir un diplôme de l’enseignement supérieur.
Ce type de diplôme se définit d’abord par ses effets : il confère l’un des grades ou titres universitaires. Il parait donc nécessaire de s’arrêter sur les aspects sémantiques mis en jeu par une telle combinaison. Qu’est ce qu’un grade et un titre universitaire ? La notion de grade apparaît dans le Décret impérial du 17 mars 1808 portant organisation de l’université dans ses scientifiques conférés par l’Etat qui s’est réservé le monopole de leur collation »137. Jusqu’en 1999, les grades étaient au nombre de trois: le baccalauréat, la licence et le doctorat138 mais, dans un souci d’harmonisation européenne139, un décret est venu en créer un nouveau, le mastaire140.
La notion de grade présente une certaine connotation militaire ou, du moins, celle d’une forte hiérarchie141. Elle témoigne ainsi que celui qui le possède est parvenu à un niveau déterminé dans cette hiérarchie. Le grade est un concept générique désignant l’accès à un niveau d’études universitaires. « Celui ci ne donne pas le droit à la fonction publique ou à l’exercice de certaines professions; ce droit appartient virtuellement à tout citoyen qui réunit certaines conditions d’instruction, que le grade ne fait que constater: il est donc pour parler la langue du droit, déclaratif et non attributif »142. Si l’on en croit certains auteurs143, la constatation de l’accession à ce grade « conduirait à la délivrance du diplôme, pièce émanant de l’autorité universitaire ». Mais, si matériellement, la délivrance du diplôme intervient après la constatation du niveau atteint, ce rapport de cause à effet entre diplôme et grade est assez imprécis au regard des termes du décret impérial de 1808 et de la loi de 1984. L’article 96 du décret impérial dispose que le recteur délivre les diplômes des gradués144. Dans cette logique, le grade préexiste au diplôme, celui ci ne venant simplement qu’en constater la possession. Mais l’article 17 de la loi de 1984 spécifie que « les diplômes nationaux sont ceux qui confèrent l’un des grades ou titres universitaires » ce qui inverse les perspectives puisque l’acquisition du grade est, alors, une conséquence de la délivrance du diplôme national. Quelle solution retenir ? Du point de vue du droit, il convient de privilégier le texte le plus récent et donc l’interprétation découlant de l’article 17 de la loi du 26 janvier 1984, à savoir, le diplôme confère le grade.
Cette distinction diplôme national/grade nous parait à l’heure actuelle avoir perdu tout son intérêt. La notion de grade n’a jamais été définie en tant que telle et la situation des grades n’a été modifiée qu’à une seule reprise depuis 1808145. Qu’en est-il des autres diplômes de l’enseignement supérieur ? Ne peuvent-ils conférer de grade à leur titulaire ? La loi de 1968 avait évité cet écueil en écartant la notion de grade et en s’attachant à la notion de diplôme national. Il semble que le législateur, à cette époque, ait surtout voulu consacrer de cette façon la désuétude de la notion de grade. Mais celui de 1984, devant la volonté des universités de délivrer leurs propres diplômes nationaux, a réaffirmé la compétence exclusive de l’Etat en reprenant la vieille formule de monopole de collation des grades. Cette solution présente toujours le même inconvénient: maintenir une confusion qui n’a plus lieu d’être. La suppression pure et simple de la notion de grade et la simple affirmation du monopole étatique de délivrance des diplômes nationaux pourraient résoudre ce problème. Certes, cette question ne contient aucun aspect pratique. Mais peut-être permettrait-elle d’éviter une confusion sémantique que nous retrouvons aussi au niveau de la notion de titre.
Le titre universitaire dont le monopole est affirmé par la loi, est aussi une conséquence de la délivrance du diplôme. Ce dernier confère un titre à celui qui en est muni : bachelier, docteur… La confusion entre les notions réside encore dans la rédaction de l’article 17 de la loi de 1984 et de ses décrets d’application: « les diplômes nationaux (…) confèrent l’un des grades ou titres universitaires ». Ce « ou » est-il exclusif ou fait-il une assimilation ? Le titulaire d’un diplôme national se voit-il attribuer un grade et pas de titre, ou vice versa ? Cette hypothèse doit être écartée. Prenons le cas du diplôme de doctorat. Celui-ci est un grade selon les termes inchangés du décret de 1808. Or, l’article 16 de la loi évoque aussi le titre de docteur. Il est donc bien des cas où on peut avoir et un grade et un titre pour le même diplôme. Faut-il alors confondre grade et titre ? A cette nouvelle question, il convient de répondre par la négative. Il y a en effet plus de diplômes nationaux que de grades. Or la rédaction de la loi suggère que tous les diplômes nationaux sont concernés.
La validation des référents de diplômes et titres privés.
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Table des matières
INTRODUCTION.
PREMIÈRE PARTIE. LE DIPLÔME RÉFÉRÉ À L’ÉTAT.
TITRE I. L’ÉTAT DIPLÔMANT.
Chapitre 1. Les modes d’intervention des autorités publiques dans la conception des diplômes.
Section 1. La validation des référents du diplôme ou du titre.
Section 2. L’élaboration des diplômes professionnels par les autorités publiques.
Chapitre 2. Le processus de délivrance des diplômes.
Section 1. L’évaluation des acquis.
Section 2. La délivrance du diplôme ou du titre .
Chapitre 3. La protection pénale des diplômes et des titres.
Section 1. Du faux à la fraude.
Section 2. L’usurpation des titres et diplômes.
Section 3. Les délivrances illicites.
TITRE II. LE STATUT DU DIPLÔMÉ.
Chapitre 1. Les caractères juridiques des droits des diplômés.
Chapitre 2. Les droits garantis du diplômé.
Section 1. Le diplôme et la poursuite d’études.
Section 2. Le lien imposé entre diplôme et activité professionnelle : La réglementation étatique des professions.
Chapitre 3. Les droits éventuels du diplômé.
Section 1. Le lien négocié entre diplôme et activité professionnelle : la réglementation conventionnelle de l’emploi.
Section 2. Le diplôme et le « traitement social » du chômage .
DEUXIÈME PARTIE. LE DIPLÔME ÉMANCIPÉ DE L’ÉTAT.
TITRE 1. LES NOUVELLES LOGIQUES PROFESSIONNELLES.
Chapitre 1. Les effets formateurs du travail : la validation des acquis professionnels.
Section 1. Une logique individuelle.
Section 2. Une séparation entre formation et diplôme.
Section 3. Vers un dispositif national de validation des acquis professionnels.
Chapitre 2. La rupture du monopole étatique de délivrance des certifications professionnelles : les certificats de qualification professionnelle.
Section 1. Un processus paritaire sans véritable définition légale.
Section 2. Une diversité d’approche pour certifier différents types de professionnels.
Section 3. Une logique de titre.
Chapitre 3. L’émergence de la notion de « compétence » : une reconsidération de la place du diplôme ?
Section 1. Une conception commune fondée sur des logiques différentes.
Section 2. La place du diplôme au regard de la notion de compétence.
TITRE II. LES NOUVELLES LOGIQUES COMMUNAUTAIRES.
Chapitre 1. Les limites d’une approche collective des diplômes.
Section 1. Une méthode adaptée aux professions réglementées.
Section 2. Les insuffisances de l’approche collective des diplômes.
Chapitre 2. Des actions européennes fondées sur le caractère individuel du diplôme.
Section 1. la construction d’accessoires au diplôme.
Section 2. La promotion de nouveaux modes individuels de validation des compétences.
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