L’autisme en quelques mots

L’utilité de l’analyse qualitative de contenu

L’utilité d’adopter comme méthode l’analyse qualitative de contenu dans ma recherche est celle d’obtenir des tendances concernant un élément précis : le type de discours qu’une personne produit en parlant d’une thématique spécifique. Pour faire cela, il a été nécessaire d’établir des catégories discursives précises, de délimiter des thématiques précises et d’attribuer à chaque interlocuteur la « catégorie discursive » utilisée pour parler de la thématique en question. Nous comprenons que l’analyse de contenu permet d’effectuer un travail très systématique et ordonné qui pourrait à la fois sembler excessivement répétitif. Mais c’est en partant des résultats obtenus par cette méthode qu’il est possible d’étendre l’analyse à un niveau successif, et de passer « du spécifique au général ». Cette méthode se divise en deux moments distincts mais complémentaires: « l’organisation des données impliquant une « segmentation » et entraînant une « dé-contextualisation », d’un côté, et, leur interprétation, menant à une « re-contextualisation », de l’autre (Savoie-Zajc. 2000. In : Waslin. 2007 : 252). Cet aller-retour entre « particulier et général » est le vecteur qui véhicule la recherche des relations entre les résultats dans une configuration d’ensemble, dans une vision globale qui puisse amener à effectuer des abstractions généralisables à propos de l’objet de recherche (Mucchielli. 2006).

Le discours et la valeur de son interprétation « Dès qu’il y a discours il y a sens et toute construction de sens implique discours » (Vignaux. 1976 : 198) Pour Vignaux le discours est « l’opération globale d’un sujet construisant une représentation » ou un « ensemble de stratégies d’un sujet dont le produit sera une construction caractérisée par des acteurs, des objets, des propriétés, des événements » (1976 : 232). Dans cette définition nous retrouvons le concept de « construction » et de «représentation » ; le défi de l’enquêteur est donc celui d’avoir accès à ces représentations, à ces constructions. Boudon affirme dans ce sens que « le fonctionnement normal de la connaissance repose sur un travail incessant d’interprétation » et que « l’homme ordinaire ne déforme pas, il donne pour produire du sens, de la vérité (sa vérité) » (Boudon In : Kauffmann. 2006 : 63). Nous ne nous intéresserons par de tester la véridicité du discours élaboré par les locuteurs, il sera plutôt pertinent de réfléchir à quel type de discours ce dernier construit. Lakoff à son tour propose de définir le discours comme un « ensemble de jugements portés par un sujet dans le but de condenser localement la logique d’ensemble des représentations d’une situation, d’un état de choses donné » qui « assure le passage de la situation concernée à d’autres situations du domaine hypothétique » (Lakoff In : Vignaux. 1976 : 55). Ce passage rend compte des enjeux qui tournent autour du discours. Ce dernier est un produit élaboré par un locuteur avec ses propres représentations, ses savoirs ses valeurs. Le discours donne accès aux informations détenues par un individu particulier dans un contexte de production spécifique. La « situation » dont parle Lakoff acquiert une importance cruciale ; nous pouvons par exemple imaginer que selon le type de questions posées dans l’entretien la construction de sens produite par le locuteur prend des proportions plus ou moins importantes.

À partir de ces considérations, nous pouvons comprendre que le processus de «traduction » de l’entretien est un aspect très délicat qui prend en considération un multitude d’éléments qui s’enchainent mutuellement dans une contexte d’interaction spécifique entre « enquêteur et interviewé ». Vasile explique que la « traduction » du discours « est un processus complexe qui suppose un acte d’interprétation, un autre de choix des stratégies de traduction, et le dernier de retextualisation » (2003 : 14). Il y a donc un va-et-vient permanent, qui suppose des remises en question et des démarches d’adéquation constantes à partir de matériaux différents (le « discours parlé », le « discours retranscrit, » et le « discours interprété »). Comme le souligne Grize, nous agissons sur le discours et « agir sur lui, c’est chercher à modifier les diverses représentations qu’on lui prête, en mettant en évidence certains aspects des choses, en en occultant d’autres, en en proposant de nouvelles » (Grize. 1990 : 41). Dans ce sens, il sera nécessaire de réfléchir à la production du discours élaboré par le locuteur par l’interprétation des éléments textuels qui sont à considérer comme des traces discursives9 en ayant toujours à l’esprit les objectifs de la recherche, celle de comprendre quel type de discours élabore une famille ayant un membre autiste pour « reconnaître» le trouble. Le processus d’interprétation est aussi bien résume par Ballard : « à l’origine il y a un texte qui est une matérialité discursive, et la traduction vise à recréer un autre texte, autre matérialité discursive, qui est censé entretenir avec l’original un rapport de fidélité (2003 : 246). Nous comprenons que le processus d’interprétation demande une première sélection apte à retenir ce qui peut être mis au profit de l’analyse et une deuxième, qui rend compte du caractère dynamique de la recherche, qui se construit dans le va-et-vient nécessaire entre la particulier et le général.

Dans cette perspective, l’analyse de contenu permettra le premier type de sélection dans le but de réfléchir aux catégories discursives rencontrées dans le discours des locuteurs10 pour ensuite pouvoir tracer une vision plus globale sur le type de discours produit par les différents membres de la famille.

Discours scientifique

Un discours trouve ses racines dans la culture, dans les apprentissages que chacun de nous accumule dans sa propre vie. Pour interpréter des phénomènes complexes, ou des ! ! « +! phénomènes auxquels les individus n’ont jamais été confrontés, il est possible de faire référence aux discours des experts. Le discours scientifique peut être transformé par la personne qui entre en contact avec ce dernier selon ses valeurs, ses croyances et ses connaissances. Clémence souligne à ce propos que « l’homme de la rue pense nombre de grands problèmes (le travail, l’enfance, la justice, la maladie, les nouvelles technologies, les droits humains, la génétique, etc.) à partir de théories savantes, mais en suivant un raisonnement qui lui est propre » (2002 : 1). L’idée n’est donc pas de distinguer des individus savants et des individus naïfs, mais plutôt de comprendre comment ces derniers utilisent un type de discours plutôt qu’un autre pour parler d’Eric et du chemin parcouru jusqu’au diagnostic et à la prise en charge de ce dernier. Pensons par exemple à la phrase de Pasquale lorsqu’il utilise le discours scientifique pour faire référence au cours qu’il a suivi avec Samia « comprendre la sexualité des personnes autistes ». Il affirme, en parlant du problème lié à la gestion de la sexualité : « je sais maintenant que c’est un problème qu’ils ont ».

Pasquale s’approprie de la nouvelle information reçue par un expert du secteur, en l’intégrant à ses connaissances anciennes. Cette information est certaine, « on sait que c’est comme ça », on a des épreuves, et l’avis d’une personne experte lui donne une validité scientifique. Les interlocuteurs font référence aux discours des experts pour donner sens aux conduites qu’ils observent chez Eric, ils utilisent les « résultats scientifiques comme éclairage de l’action » en se positionnant « entre la rigueur du discours scientifique (et son universalité) et ce qui se joue dans les activités quotidiennes » (Chancerel. 2008 : 4). L’utilité de la prise en compte du savoir scientifique prend sens grâce à l’effort de transposer ces derniers aux expériences qu’ils ont vécues avec Eric ; seulement en trouvant un référentiel valable dans l’environnement qui les entoure, ces savoirs peuvent se révéler comme plausibles dans une situation, celle de la vie de tout les jours « qui ne peut pas être dictée par des algorithmes » (Chancerel. 2008 : 4).

Le discours rationnel

Pour paraître logique, un discours doit persuader la personne qui l’écoute de sa nature pertinente, il doit avoir un message précis à transmettre et vise « sinon à toujours convaincre du moins à établir la justesse d’une attitude, d’un raisonnement, d’une conclusion ». (Vignaux. 1976 : 58). Grize s’intéresse aussi à la relation entre le locuteur et son récepteur en considérant ce dernier « non comme un objet à manipuler mais comme un alter ego auquel il s’agira de faire partager sa vision » (1990 : 41). L’idée de Kerbrat-Orecchioni se situe dans le même sens; le chercheur souligne à ce propos que « l’homme respecte autant dans sa conduite que dans son discours un principe supérieur, qui fait partie des invariants de la pensée : celui de se montrer rationnel et raisonnable dans les comportements interactifs » (1986 :196). Le discours rationnel présente une structure précise et cohérente, un début, un développement et une fin. On peut s’attendre à une structuration classique en quatre parties: exorde, narration, argumentation et péroraison (Boulakia. 2009). Il est donc « logique, argumenté apte et à persuader » (Boulakia. 2009 : 124). Un autre aspect qui intéresse ce type de discours est celui concernant l’engagement du locuteur dans l’émission du message et des modalités qu’il utilise pour l’élaborer de façon rationnelle. Toulmin construit un modèle qui met en premier plan la rationalité du discours et sa nature justificative : « il s’agit de caractériser la technique par laquelle un locuteur apporte une justification à une assertion qu’il avait avancée, et qui se trouve mise en doute par l’interlocuteur. Dans ce modèle dialectique une assertion raisonnable est d’abord une assertion ayant affronté la critique, une assertion que le locuteur est capable d’intégrer à un certain schéma procédural se déroulant selon un certain nombre d’étapes » (Toulmin. 1993 : 26).

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Table des matières

1INTRODUCTION 
1.1LAUTISME EN QUELQUES MOTS
1.2 LINTERET DE LA RECHERCHE
1.3 PLAN DU MEMOIRE
2 METHODOLOGIE
2.1LA POPULATION DES PERSONNES FAMILLE) AUPRES DESQUELLES
NOUS AVONS RECUEILLI DES INFORMATIONS
2.2 PROTOCOLE EXPERIMENTALE
2.3 CONSIDERATIONS ETHIQUES
3 CADRE THEORIQUE
3.1LANALYSE QUALITATIVE DE CONTENU
3.1.1La pré-analyse
3.1.2 L’exploitation du matériel
3.1.3 Interprétation des résultats
3.2 LUTILITE DE LANALYSE QUALITATIVE DE CONTENU
3.3 LE DISCOURS ET LA VALEUR DE SON INTERPRETATION
3.4DISCOURS RATIONNEL/EMOTIONNEL ; DISCOURS SCIENTIFIQUE/NAÏF
3.4.1Discours scientifique
3.4.2 Discours naïf
3.4.3 Discours émotionnel / discours rationnel
3.4.3.1Le discours rationnel
3.4.3.2 Le discours émotionnel
4ANALYSE
4.1ATTRIBUTION DES CATEGORIES DISCURSIVES A PARTIR DES THEMATIQUES ABORDEES PAR LES LOCUTEURS. APPLICATION DE LANALYSE DE CONTENU
4.1.1Autonomie
4.1.2 Motricité
4.1.3 Communication verbale
4.1.4Interactions sociales
4.1.5Rigidité liée à la routine
4.1.6Stéréotypie
4.1.7Manque dinitiative
4.1.8Les difficultés alimentaires
Barbara Loria MASPE
4.2 RECAPITULATIF DE LATTRIBUTION DES CATEGORIES DISCURSIVES A PARTIR DES THEMATIQUES ABORDEES PAR LES LOCUTEURS
4.2.1Analyse du tableau récapitulatif
4.2.1.1Le discours de Chiara
4.2.1.2 Le discours de Samia
4.2.1.3 Le discours de Pasquale
4.3 NORMES ADMISES ET TRANSGRESSEES
4.3.1Le concept de déviance
4.3.2 Autisme et déviance : des variations dans la visibilité de la « différence
4.3.2.1La perception de Chiara
4.3.2.2 La perception de Samia
4.3.2.3 La perception de Pasquale
5CONCLUSION
5.1UNE METHODOLOGIE PARTICULIERE
6BIBLIOGRAPHIE
6.1OUVRAGES
6.2 ARTICLES
6.3 REVUES
6.4MEMOIRES
6.5ARTICLES EN LIGNE
6.6SITES INTERNET
7TABLE DES MATIERES : LES IMAGES
8ANNEXES
I. DEFINITION DE LAUTISME SELON LE DSM-IV
II. SCHEMATISATION DU PROCESSUS DANALYSE
III. RESUME DU CONTENU DE LENTRETIEN AVEC CHIARA
IV. RESUME DU CONTENU LENTRETIEN AVEC PASQUALE
V. RESUME DU CONTENU LENTRETIEN AVEC SAMIA
VI.RESUME DE LENTRETIEN AVEC ERIC
VII. CANEVAS DENTRETIEN
DIAGNOSTIC
DESCRIPTION DERIC
VIII.RETRANSCRIPTION DES ENTRETIENS

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