La riziculture face aux changements climatiques en basse casamance

Partout dans le monde, l’agriculture constitue la principale source de revenu pour 80% de la population vivant en dessous du seuil de la pauvreté (BanqueMondiale, 2018). En effet, en 2014, elle représentait encore un tiers du produit intérieur brut (PIB) mondial. En Afrique de l’ouest, l’agriculture demeure un élément central de l’économie. Elle contribue à hauteur de 60 % de la main d’œuvre totale, 30 à 40 % du PIB de la plupart des pays et représente la plus grande source de revenus et de moyens d’existence pour 70 à 80 % de la population (CILSS, 2011). Par ailleurs, la plupart des pays dépendent de l’agriculture pluviale qui dépend lui-même du climat qui a une influence très forte sur la production agricole. Certains pays d’Afrique de l’Ouest connaissent une grande variabilité climatique (Sultan, 2008). Toutefois, le déclin des rendements agricoles, en particulier en Afrique, est susceptible de laisser des centaines de millions de personnes dans une situation d’incapacité à produire ou à acheter des aliments en quantité suffisante (ClimateChange, 2013) . Le Sénégal reste donc un pays vulnérable compte tenu de l’importance de sa population rurale, qui vit essentiellement de l’agriculture pluviale, de la forte présence de maladies climato-sensibles (Sagna et al., 2015). Les céréales comme le riz occupent une place prépondérante dans les habitudes culinaires des Sénégalais. Avec une consommation de riz de 90 kg/ habitant/an, le Sénégal est l’un des plus gros consommateurs de riz de l’Afrique de l’Ouest. Sa part dans la consommation céréalière des sénégalais est de 42% (PNAR, 2009; CGER, 2014; ROPPA, 2016). Elle compte pour 54 % des céréales consommées en milieu urbain et 24 % en milieu rurale (FALL & DIEYE, 2008) Le riz, au Sénégal, est au centre de la politique d’autosuffisance alimentaire. Il est principalement cultivé en irrigué dans la Vallée du Fleuve Sénégal (Saint-Louis) avec 57% des superficies emblavées, il est aussi cultivé en pluvial à Ziguinchor et à Sédhiou avec respectivement 17% et 15% des surfaces en riz. La région de Ziguinchor consacre 70% de ses superficies céréalières à la culture du riz (CGER, 2014a). Cependant, la Casamance, qui jadis était considéré comme le grenier du Sénégal et principale région productrice de riz, connaît une baisse de la pluviométrie dont les effets se sont profondément répercutés sur l’environnement biophysique et socioéconomique (SY & SANE, 2008). En effet, à partir de la fin des années 1950, on a assisté à une sécheresse sur toute la bande du Sahel qui s’est traduit par une baisse des pluies et une accentuation de la salinité des rizières. Les conséquences de ces années de sécheresse sont une réduction des terres aptes à la riziculture du à leur hyper salinisation et une forte baisse de la production de riz (Bassene, 2017; Descroix et al., 2018). La baisse des rendements attestée par le fait que le système qui consistait, jadis, à garder les récoltes de riz dans les greniers pendant des années voire des décennies, n’existe plus. L’insécurité alimentaire quasi chronique s’est définitivement installée un peu partout dans les campagnes de la Basse-Casamance. En plus, le Diola ne consommait pas le riz importé mais aujourd’hui la majeure partie du riz consommé en pays diola est importé (SANÉ et al., 2010; Badiane, 2012; SANÉ, 2017) .

Synthèse bibliographique

Etat de la riziculture au Sénégal et en Basse Casamance 

La riziculture au Sénégal 

L’agriculture sénégalaise est une agriculture multifonctionnelle et vulnérable (PNUD, 2009a). Elle ne représente que 17 % du PIB, expliquant, ainsi, que 54 % de la population vivant audessous du seuil de pauvreté dont 70 % sont concentrés en milieu rural (FAO, 2009). Le riz joue un rôle prépondérant dans la satisfaction des besoins alimentaires et son importance ne cesse de croître. Au fil du temps, les populations sénégalaises se sont accommodées à la consommation du riz à tel point que le Sénégal est devenu un des plus gros importateurs de brisures de riz en Afrique de l’Ouest après le Nigéria (Gueye, 2004). L’évolution de la consommation de riz du pays a été très rapide depuis la fin de la deuxième guerre mondiale (ISE, 2003; PNUD, 2005). Sa consommation moyenne annuelle par tête est estimée à 90kg/hab/an au niveau national (Mendez et al., 2019). En effet, si la consommation apparente en riz au Sénégal était de 400 000 tonnes en 1995 (PNAR, 2009), en 2002 ils ont augmenté de près de 63 % passant de 435 500 tonnes à 709 575 tonnes soit en valeur de 59 à 110 milliards de F CFA. Les parts de marché se situent respectivement pour le riz local entre 7 et 13 % et de 87 à 93 % pour le riz importé. Il faut souligner que près de 30 % du riz local est autoconsommé. L’évolution de la consommation de riz du pays a été très rapide depuis la fin de la deuxième guerre mondiale (ISE, 2003; PNUD, 2005). De ce fait, le riz, à lui seul, est responsable pour 16% du déficit de la balance commerciale et ce phénomène a tendance à s’amplifier dans le temps car la production nationale progresse moins vite que la consommation qu’elle ne couvrait qu’à hauteur de 20% seulement (PNAR, 2009; SANÉ, 2017) .

Les principales zones de production du riz au Sénégal, par ordre d’importance sont : le Bassin du Fleuve Sénégal qui fournit en moyenne 65 % de la production nationale de riz paddy sur 34 % des superficies cultivées en riz, la Région de Kolda qui fournit 17 % de la production nationale de riz paddy sur 30 % des superficies cultivées en riz, la région de Ziguinchor qui fournit en moyenne 15 % de la production nationale de riz paddy sur 31 % des superficies cultivées en riz et les autres zones de moindre envergure, regroupant les régions de Kaolack, Fatick et Tambacounda, qui fournissent 3 % de la production nationale de riz paddy sur 5 % des superficies cultivées en riz (Gueye, 2004; CGER, 2014) .

La riziculture en Basse Casamance 

La Basse Casamance a une longue tradition de riziculture. Elle remonte à au moins 1500 ans (SALEM, 2013) Durant la période coloniale, le riz était utilisé pour payer l’impôt et pour participer à l’effort de guerre. Plus tard, Il est devenu dans certains milieux diola un des critères de richesse (MENDY, 2015). Durant cette même période, la culture de l’arachide a été introduite dans le pays du fait des revenus importants qu’elle permettait d’avoir, son développement a connu un rythme très rapide au détriment des cultures vivrières. En 1996, la zone éco géographique de la Casamance au Sud du Sénégal occupe 61 % de l’ensemble des terres destinées à la riziculture. Mais sa contribution à la production nationale n’est cependant que 29%(FALL & DIEYE, 2008). Le taux de couverture des besoins alimentaires par la production nationale révèle une situation de déficit, compensé par des importations (riz, blé). Contrairement au contexte actuel, en 1965, HABAS considérait la Casamance comme la principale région rizicole du Sénégal avec 66.000 hectares de rizières fournissant 67.000 tonnes de paddy, sur les 95.000 tonnes produites pour l’ensemble du Sénégal, la part de la Casamance dans la production totale du pays atteignait 70 010 tonnes. En 1968, pour une superficie de 65 000 hectares, était de 82 000 tonnes de riz alors que la production nationale du Sénégal s’élevait à 125 000 Tonnes pour une superficie de 88 000 hectares(HABAS, 1965a). Les rizières en Basse Casamance sont exposées à la salinisation. En effet la vallée du fleuve Casamance est envahie par l’intrusion des eaux marines. L’avancée de la langue salée explique la salinisation et l’acidification des terres surtout au niveau des vasières et de certains bas-fonds. Selon la FAO (2007) et les estimations les plus récentes, elle affecte au moins 400 millions d’ha et en menace gravement une surface équivalente. L’une des conséquences majeures de la perte des terres rizicoles est la baisse des productions agricoles en général et celles rizicoles en particulier(J.P. MONTOROIA. DOBOS’ et al., 2008; SANÉ et al., 2010). Cette baisse des récoltes est attestée par le fait que le système qui consistait, jadis, à garder les récoltes de riz dans les greniers pendant des années voire des décennies, n’existe plus. L’insécurité alimentaire quasi chronique s’est définitivement installée un peu partout dans les campagnes de la Basse-Casamance (Sané, 2008). La riziculture traditionnelle de bas-fonds, malgré son importance locale au niveau social et alimentaire, a reçu très peu d’appui bien qu’elle soit confrontée à de grands problèmes à court et long terme (Gueye, 2004). Les pertes de productivité découlant des changements climatiques aggraveront les crises alimentaires et par la même occasion la vulnérabilité des communautés déjà récurrente dans la zone (Barrat, 2012).

Les systèmes de production rizicole en Basse-Casamance 

Le riz est une plante extrêmement plastique. Elle se cultive dans des environnements aussi bien variés que contrastés (Pélissier, 1966). Les systèmes de production du riz sont presque uniquement dominés par des exploitations familiales de petite taille (Manzelli et al., 2015). Schématiquement, partant des plateaux et en se dirigeant vers les estuaires et les marigots, on rencontre 4 types de rizières : le riz pluvial cultivé avec le seul secours de l’eau de la pluie, les rizières hautes (riziculture pluviale assistée par la nappe phréatique ou riziculture de nappe), les rizières moyenne (la riziculture de bas-fonds sur sols hydromorphes et les rizières basses (riziculture de mangrove ) HABAS (1965).

La riziculture pluviale stricte 

Le riz pluvial ou pluvial strict est cultivé dans des parcelles non inondables et sans l’intervention de la nappe phréatique. Il ne bénéficie donc que de l’eau de pluie. En Afrique de l’Ouest, selon l’ADRAO (2008), la riziculture pluviale est prépondérante, elle représente environ 40% des superficies cultivées en riz avec des rendements généralement faibles se situant entre 0,5 et 1,0 tonne/ha en Afrique. La culture du riz est tributaire du climat (pluviométrie totale et pluviosité). La pluviométrie détermine la période de culture du riz pluvial. Cette dernière est beaucoup plus sensible à la répartition des pluies qu’à la quantité totale de pluies pendant une saison. Le déficit hydrique pendant la campagne rizicole réduit considérablement les rendements, surtout au stade de reproduction(Akintayo et al., 2008). La riziculture traditionnelle (ou pluviale) représente une importante exploitation agricole dans la région Casamançaise (Bacci & Tarchiani, 2013) .

Riziculture pluviale assistée par la nappe phréatique (riziculture de nappe) 

La riziculture pluviale de nappe se pratique au niveau intermédiaire du topo séquence, en bas de pente. Sa principale caractéristique est que l’apport hydrique est assuré par la pluie et par la nappe phréatique qui affleure pendant certaines périodes de l’année (Bacci & Tarchiani, 2013; Manzelli et al., 2015b) Les terres sont ainsi temporairement submergées pendant des périodes plus ou moins longues. Elles sont relativement plus fertiles que celles où se pratique la riziculture pluviale stricte. La pression des mauvaises herbes, des maladies et des insectes (foreurs de tige) y est plus importante.

Riziculture submergée d’eau douce (riziculture de bas- fond) 

La riziculture pluviale submergée se fait sans aucune maîtrise de l’eau et la submersion résulte de l’accumulation des eaux de pluie. Elle est pratiquée sur sols hydromorphes de transition (Manzelli et al., 2015b) dans les vallées intérieures et sur sols de transition entre le plateau et la mangrove.

La riziculture de bas-fonds sur sols hydro morphes 

Elle est caractérisée par la submersion du riz due à l’accumulation des eaux de pluie et pratiquée dans les vallées intérieures et long les cours d’eau principaux sur sols de transition entre le plateau et la mangrove/tanne .

La riziculture de mangrove 

Ce type de riziculture est pratiqué dans des plaines récupérées de la mangrove et sur des sols sableux situés à proximité de la mangrove (ZINGORE et al, 2014). Sa principale caractéristique est la forte présence de sel dans le sol. Ce qui constitue la contrainte majeure. L’autre contrainte associée à ce type de riziculture est l’acidité du sol. Toutefois, cette forme de riziculture n’est pas diffuse dans la région même si les agriculteurs utilisent de variétés de riz spécifiquement sélectionnées pour la mangrove.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1: Synthèse bibliographique
1.1. Etat de la riziculture au Sénégal et en Basse Casamance
1.2. Les systèmes de production rizicole en Basse-Casamance
1.3. Les changements climatiques
1.4 Impact des changements climatiques sur la riziculture
1.5. La vulnérabilité des communautés aux changements climatiques au Sénégal
Chapitre 2: Matériels et méthodes
2.1 Présentation de la zone d’étude
2.1.1 Situation administrative
2.1.2 Caractéristiques climatiques
2.1.3 Relief
2.1.4 Les sols
2.1.5 Végétation
2.1.5 Caractérisation socio-économique de la zone d’étude
L’agriculture
Les cultures vivrières
Les cultures rentières
2.2 Méthodologie
2.2.1. Echantillonnage des enquêtés
2.2.2. Collecte des données de perception
2.2.3. Collecte de données climatiques
2.2.4. Collecte des données de rendement en riz
2.2.5. Prospection de terrain
2.3 Traitement et analyse des données
2.3.1. Analyse des données climatiques et de la production rizicole
2.3.2. Analyse des données d’enquêtes
Chapitre 3: Résultats
3.1. Analyse des données climatiques
3.1.1. Evolution de la pluviométrie et de la durée de la saison des pluies
3.1.2. Analyse des ISP de la série 1951-2018 de la région de Ziguinchor
3.1.3. Relation entre production, durée de la saison des pluies et les ISP : Test de régression
3.2. Caractéristiques socioéconomiques des enquêtés
3.2.1. Age et activités principales des enquêtés
3.2.2. Niveau d’instruction
3.2.3. Destiné de la production en riz
3.2. Perceptions paysannes sur les changements et les impacts sur les systèmes agricoles et les communautés
3.3.1. Perception paysanne sur l’évolution du climat
3.3.3. Perception des impacts du changement climatique
3.3. Typologie des casiers rizicoles
3.4. Stratégies d’adaptation des communautés aux changements climatiques
3.5.1. Identification des stratégies d’adaptation
3.5.2. Aménagement des rizières et gestion de la salinité (digues et diguettes)
3.5.3. Utilisation de variétés de riz adaptées
3.5.4. Gestion de la fertilité des sols
3.5.5. L’agroforesterie
3.6. Les stratégies d’adaptation, leurs avantages et leurs contraintes
3.6.1 Avantages et contraintes dans la mise en œuvre des différentes stratégies d’adaptation
3.6.2. Contraintes à la mise en mise en œuvre des stratégies d’adaptation
o Contraintes financières
o Contraintes sociales
3.7. Cas du remembrement village de Diagobel (commune de Niamone) : une stratégie d’adaptation prometteuse (piloté par l’ANCAR)
Chapitre 4: Discussion
4.1 Pluviométrie et température
4.2. Baisse des rendements et perte de superficies rizicoles
4.3. Stratégies d’adaptation aux changements climatiques
Conclusion et perspectives
Bibliographie

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