Le terme « audit » était autrefois réservé au domaine comptable et financier et consistait à faire des opérations de contrôle et de vérification des données de l’entreprise. Cependant, il s’est progressivement déplacé vers le domaine social. Parmi les premières applications en la matière nous pouvons citer la National First City Bank de New York en 1964 qui a cherché à appliquer les principes de l’audit comptable au suivi de la gestion humaine d’unités décentralisées. Quelques années plus tard Humble (1975) a publié l’ouvrage « L’audit social au service d’un management de survie ». L’Audit du Social est donc un domaine particulier d’application des méthodes d’audit largement utilisées dans le domaine financier, organisationnel, qualité, etc.… Il peut être pratiqué par des auditeurs externes spécialisés ou par des auditeurs internes, parfois en combinaison les deux à la fois.
L’AUDIT SOCIAL
Les théories des précurseurs
– Selon Aïm, (2010 : 21) l’axe horizontal part du système fermé au système ouvert. Cette démarche s’appelle « approche systémique ». Selon celle-ci, le système fermé correspond à une organisation dont le modèle universel forme un tout centré sur la gestion des paramètres internes à l’entreprise ; alors que le système ouvert considère que l’organisation de l’entreprise est dépendante de son environnement qu’il soit économique, politique, culturel, social etc. Elle nécessite donc un effort permanent d’adaptation.
– Selon le même auteur, l’axe vertical quant à lui part de l’approche rationnelle à l’approche sociale. La première conduit à la rationalisation du travail et correspond à une recherche d’efficacité technique et économique de l’entreprise. Cette recherche est rendue possible par la mise en œuvre d’une démarche d’organisation du travail rigoureuse, logique et formelle (mécanique), fondée sur la raison ; alors que la deuxième constitue une approche fondée sur le consensus et la motivation des individus. Elle correspond à la recherche de l’efficacité technique et économique de l’entreprise par la prise en compte de facteurs humains. Cette démarche s’inscrit dans une logique de sentiment.
L’interprétation du schéma donné par Aïm ne s’arrête pas aux deux axes mais continue avec la présentation de quatre phases qui découlent de la subdivision des deux axes. Ces phases expliquent mieux les différentes transitions qu’à subi la théorie des organisations à travers le temps. Ainsi, la première phase débute dans les années 1900 et se termine dans les années 1930 avec pour objectif « organiser pour produire efficacement ». Ici l’entreprise s’inscrit dans une approche rationnelle et fonctionne dans un système fermé. Il s’agira donc pour les écoles classiques, les écoles des ingénieurs et des praticiens d’utiliser les sciences pour atteindre leur objectif. Cette période est marquée par l’émergence de la division technique du travail mené par Taylor et la division administrative du travail mené par Fayol.
Selon Plane (2012 : 11-12), Taylor déclina quatre principes d’organisation qui subsiste jusqu’à ce jour. Il s’agit de la division horizontale du travail (où le travail y est parcellisé afin de faire ressortir « the one best way » ou la meilleure façon de faire), de la division verticale du travail (où l’on distingue les « cols bleus » ou exécutants des « cols blancs » ou concepteurs du travail. Ce principe incite à placer la meilleure personne à la bonne place), du système de salaire au rendement (on accorde au personnel des primes de salaires en fonction de leur rendement afin de les motiver) et du système de contrôle de travail (où chaque geste de l’ouvrier exécutant est surveillé).
Finalement le principe de Taylor qui cherchait à faire converger les intérêts des dirigeants et des salariés vers une paix durable tout en augmentant la productivité, à fait ressortir en fin de compte que l’homme est supprimé de son initiative et de son autonomie au travail.
Toujours selon Plane (2012 : 18-21), Fayol quant à lui effectue ses recherches sur la continuité des travaux de Taylor et développe cinq principes universels en réponse aux fonctions de dirigeants et des concepts liés à ces principes. Les principes développés par Fayol (1998) sont les suivants :
– prévoir et planifier : c’est-à-dire préparer de manière rationnelle l’avenir ;
– organiser : c’est-à-dire allouer différentes ressources indispensables au fonctionnement de l’entreprise (matériaux, capitaux, personnel) ;
– commander : c’est tirer le meilleur parti possible des agents qui composent l’entreprise ;
– coordonner : synchroniser l’ensemble des actions de l’entreprise pour garantir cohérence et efficacité ;
– contrôler : ce qui revient à vérifier si tout se passe conformément au programme adopté, aux principes admis.
Les résultats des recherches de Fayol montrent que pour une meilleure gestion, chaque ouvrier ne devrait avoir qu’un seul supérieur hiérarchique contrairement à Taylor qui en recommande plusieurs. De plus, Fayol introduit la notion de prévoyance, c’est-à-dire la planification stricte, générale, autoritaire et contrôlée. Nonobstant, ces deux auteurs se complètent dans la mesure où Taylor étudie et organise le travail de l’ouvrier, tandis que Fayol fait de même mais depuis le directeur général jusqu’à l’atelier de production. Comme autre auteurs de cette période, ont peut également citer Weber et Ford.
La seconde phase selon Aïm, débute dans les années 1930 et se termine dans les années 1960. Son objectif est « de motiver l’individu ». Ici, l’entreprise s’inscrit dans une approche sociale et fonctionne dans un système fermé. Elle donnât le jour à l’école des relations humaines ce qui marque un grand pas dans l’évolution de l’organisation de l’entreprise. En effet, on passe des sciences de l’ingénieur aux sciences humaines et l’Homme devient le centre du fonctionnement de l’entreprise. Des recherches prouvent que la motivation de l’individu et la compréhension de ses besoins sont favorables à l’atteinte des objectifs de l’entreprise. Il s’agira principalement des recherches menées par Mayo, Lewin, Maslow, Gregor et Herzberg. Il faut savoir que cette école ne remet pas en cause les fondements de l’organisation taylorienne, en ce qui concerne la division verticale du travail, mais qu’elle la complète en intégrant la dimension psychologique dans les organisations.
En effet, c’est au lendemain de la deuxième guerre mondiale, que les relations humaines ont été enseignées. L’initiateur de cette école est Mayo avec ses expériences réalisées aux ateliers Hawthorne de la Western Electric Company dont il attribue le nom aux résultats de ses recherches. Selon Plane (2012 : 31), qui s’exprima sur les recherches menées par les autres auteurs, l’effet « d’ Hawthorne » est une réaction positive, du groupe de travail observé, liée à la prise en compte de facteurs psychologique en situation de travail. Ce qui veut dire que pour que le travail soit valorisant et pour maintenir une bonne relation de travail avec les supérieurs, le dirigeant doit prendre en compte le système formel (structure, ordre) et le système informel (sentiment, relation entre le personnel).
Toujours selon Plane (2012 : 34-35), Kurt Lewin distingue trois sortes de leadership. Il s’agit du leadership autoritaire, du leadership démocratique et du leadership laisser-faire. Ses résultats convergent vers celles de Mayo en ce sens que le leadership démocratique est le plus approprié au management.
Définition de l’audit social
Selon Allouche & al. (2003 : 103-106) l’audit social fait l’objet d’une évolution qu’il regroupe en quatre phases. La première marque l’origine avec l’audit financier qui devient par la suite une dimension de l’audit interne. Plus récemment l’audit social développe des certifications tel que la norme SA 8000 ou Investor in People (au Royaume-Uni). Enfin, il montre un nouveau développement en raison de l’apparition de fonds socialement responsables. De nouveaux clients sont apparus de ce fait. On retrouve parmi eux des hôpitaux, des ONG, des associations.
Le lien entre l’Audit social et la Gestion des ressources humaines
Audit social par excellence, l’audit des politiques sociales ou de la GRH correspond à l’audit traditionnel qui a pendant longtemps servi de modèle aux enseignements de l’audit social selon les dires de Igalens & al. (2008 : 31).
Bertin (2007 : 271) quant à elle fait une remarque sur les différences de périmètres et d’objectifs entre l’audit social et l’audit de la fonction ressources humaines. D’après ses observations, le périmètre de l’audit social s’étend à l’ensemble des relations de l’entreprise. Et son objectif est de s’assurer de la conformité des données sociales, de leur efficacité et de la pertinence de leurs liens avec la stratégie de l’entreprise. En revanche, l’audit de la fonction des ressources humaines a pour périmètre uniquement la fonction ressources humaines et ne s’intéresse essentiellement qu’au fonctionnement de ce service. Elle ajoute que l’objectif de cette fonction opérationnelle réside dans l’analyse et l’optimisation de ce service.
Ainsi, faire l’audit des ressources humaines, revient à faire un audit de fonction, au même titre que ceux des fonctions logistique, finance ou encore de la comptabilité .
Le lien entre l’audit social et la Responsabilité Sociale des Entreprises
Considérée comme la grande question du XXIème siècle la RSE n’a pas encore de définition universellement admise. Selon Dwight (2003 : 1-4) il ressort de ses différentes définitions certains éléments communs que sont sa nature volontaire, l’accent mis sur les initiatives prises par la direction et sur la gestion de l’impact social ainsi que l’idée selon laquelle les intérêts des entreprises ont des parties prenantes doivent être pris en compte. Toutefois, la RSE ne peut en aucun cas être un substitut au gouvernement parce que ce dernier à l’obligation de faire respecter aux entreprises les normes internationales de l’Organisation Internationale de travail (OIT). L’Union Européenne elle aussi, intéressée par ce concept a mis en place des unités pour promouvoir la RSE. Ainsi le concept de RSE a donné naissance à une prolifération de rapports de plus en plus élaborés sur sa responsabilité sociale ou sur sa performance en matière de développement durable de sorte que toute une série d’agences de notification et de certification sociales ont déjà commencé à occuper ce terrain et à vendre leurs services aux entreprises.
Parmi elles on peut citer Voynnet Fourboul (Audit des Ressources humaines : 21) qui dit que la RSE comprend des normes telle que la norme SA 8000 portant sur les responsabilités sociales. Elle défend les conditions de travail décentes et reprend les principes du BIT que sont le travail forcé, le travail des enfants, la certification, la norme ISO 9001 portant sur l’assurance qualité. Elle montre des exigences sur la responsabilité de la direction, le système de qualité, la gestion des processus et l’amélioration continue.
La norme ISO 14000 portant sur le management environnemental assure une meilleure maîtrise des questions environnementales, donne un outil de gestion à intégrer au management global de l’entreprise au même titre que la qualité et la sécurité. Et la norme ISO 26000 portant sur la responsabilité sociétale des organisations développe deux volets. D’une part, elle définit comment les organisations peuvent et doivent contribuer au développement durable. Bien que la démarche RSE soit souvent volontaire, la normalisation ISO 26000 permet de l’encadrer et rendre opérationnels et cohérents les efforts des entreprises engagées. D’autre part elle développe la responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et de ses activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant ainsi par un comportement transparent et éthique (développement durable) par le dialogue avec parties prenantes.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : CADRE THEORIQUE
INTRODUCTION PREMIERE PARTIE
CHAPITRE 1 : L’AUDIT SOCIAL
Introduction
1.1. Les théories des précurseurs
1.2. Définition de l’audit social
1.2.1. Le lien entre l’Audit social et la Gestion des ressources humaines
1.2.2. Le lien entre l’audit social et la Responsabilité Sociale des Entreprises
1.3. Les typologies de l’audit social
1.3.1. L’audit de conformité
1.3.2. L’audit d’efficacité
1.3.3. L’audit stratégique
Conclusion
CHAPITRE 2 : DEMARCHE D’UNE MISSION D’AUDIT SOCIAL
Introduction
2.1. La première étape de la démarche de l’audit social
2.1.1. La phase de planification de la mission
2.1.1.1. L’ordre de mission
2.1.1.2. La prise d’identification
2.1.1.3. Identification et évaluation des risques
2.1.1.4. Définition du référentiel
2.1.1.5. Le programme de travail
2.1.2. Les moyens
2.1.2.1. Questionnaire de prise de connaissance (QPC)
2.1.2.2. Questionnaire de contrôle interne (QCI)
2.1.2.3. Les plans d’échantillonnages
2.2. La deuxième étape de la démarche de l’audit social
2.2.1. La phase d’accomplissement de la mission
2.2.1.1. La réunion d’ouverture
2.2.1.2. Mise en œuvre du programme d’audit
2.2.1.3. La phase de terrain
2.2.2. Les moyens
2.2.2.1. Tableau de répartition des responsabilités (TRR)
2.2.2.2. Flow-chart ou diagramme de circulation des documents
2.2.2.3. L’observation
2.2.2.4. L’entretien
2.2.2.5. Le bilan social
2.2.2.6. Le tableau de bord social
2.2.2.7. Le tableau de bord prospectif
2.3. La troisième étape de la démarche d’une mission d’audit social
2.3.1. La phase de la communication des résultats
2.3.1.1. Le projet de rapport
2.3.1.2. La communication des résultats et plan de suivi des recommandations
2.3.2. Les outils
Conclusion
CHAPITRE 3 : MÉTHODOLOGIE DE LA RECHERCHE
Introduction
3.1 Modèle d’analyse
3.2. Outils de collecte et d’analyse des données
3.2.1. Les outils de collecte des données
3.2.1.1. L’analyse documentaire
3.2.1.2. Questionnaire de prise de connaissance (QPC)
3.2.1.3. L’entretien individuel
3.2.1.4. L’observation
3.2.1.5. Le Flow-chart ou diagramme de circulation des documents
3.2.1.6. Les FRAP (Feuille de Révélation et d’Analyse de Problème)
3.2.2. Les outils d’analyse des données
3.2.2.1. L’arbre des causes
3.2.2.2. L’analyse de contenu
Conclusion
CONCLUSION DE LA PREMIERE PARTIE
DEUXIEME PARTIE : CADRE PRATIQUE
INTRODUCTION DE LA DEUXIÈME PARTIE
CHAPITRE 4 : PRESENTATION DE ECOBANK SENEGAL
Introduction
4.1. Historique
4.2. Produits et services
4.3. Organisation de Ecobank Sénégal
4.3.1. La direction de l’audit interne
4.3.2. La direction du contrôle interne
4.3.3. La direction de la compliance
4.3.4. La direction de la trésorerie
4.3.5. La direction du domestic bank
4.3.6. La direction du corporate bank
4.3.7. La direction des finances
4.3.8. La direction des risques
4.3.9. La direction juridique
4.3.10. La direction des opérations et de la technologie
4.3.10.1. Le service Trade
4.3.10.2. Le service Transfert
4.3.10.3. Le service Trops and Loan
4.3.10.4. Le service portefeuille local
4.3.10.5. Le service compense
4.3.11. La direction des ressources humaines
Conclusion
CHAPITRE 5 : DESCRIPTION DE L’EXISTANT
Introduction
5.1. Le dress code
5.2. La hiérarchie
5.3. La formation et la compétence
5.4. Gestion du personnel
5.5. Sécurité
5.6. La direction de l’audit interne
Conclusion
CHAPITRE 6 : MISE EN ŒUVRE DE L’AUDIT SOCIAL ET RECOMMANDATIONS
Introduction
6.1. Test de conformité
6.2. Test de Permanence
6.3. Analyses et mise en œuvre de notre mission
6.3.1. Dress code
6.3.2. Hiérarchie
6.3.3. Formation et compétence
6.3.4. La gestion du personnel
6.3.5. Sécurité
6.3.6. La direction de l’audit interne
6.4. Les flow-charts ou diagramme de circulation des documents
6.4.1. Le recrutement
6.4.2. La formation
6.4.3. Evaluation du personnel
6.4.4. Conflits
6.4.5. Cessation de travail
6.5. Tableau de répartition des responsabilités (TRR)
6.6. Les recommandations
6.6.1. Recommandations aux directions de l’entreprise
6.6.2. Recommandations aux organes de décisions
6.6.3. Recommandations portant sur les droits d’accès
6.6.4. Recommandations portant sur les documents et supports magnétiques
6.6.5. Recommandations portant sur la sécurité environnementale
6.6.6. Recommandations portant sur la gestion des communications et opérations
Conclusion
CONCLUSION DE LA DEUXIEME PARTIE
CONCLUSION GENERALE
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE
