Etude comparative entre religion et politique à Madagascar
En réalité, la laïcité n’était jamais pratiquée dans chaque régime successif à Madagascar.
Laïcité à l’époque coloniale
Avant l’époque coloniale, la légitimité des détenteurs du pouvoir provient de leurs rapports avec les ancêtres royaux.
« L’importance des reliques royales sur le plan sociopolitique dans le nord ouest de l’ile, à Mahajanga, est un exemple éclairant des rapports profonds entre religion traditionnelle et la politique » . Ainsi, la reine RANAVALONA I (1782-1861), dans son discours du 1er mars 1835, a déclaré que ses ancêtres ont fait régner les rois de l’Imerina, y compris elle. « Ce discours témoigne de sa fidélité è ses ancêtres et de son attachement à leur culte pour consolider son pouvoir et légitimer son autorité » .
Après la conversion de la Reine RANAVALONA II (1829-1883) et des dignitaires du royaume merina au protestantisme, conversion scellée par le baptême de la Reine le 21 février 1896, le pouvoir semble favoriser les missions des reformés.
« Lors de l’intronisation de la reine, le 03 septembre 1886, la Bible es substituée aux idoles royales qui, sur son ordre, on été brulées » . Mais à l’époque coloniale, l’idée d’une séparation des affaires religieuses et des affaires politiques commence à surgir dans le paysage politique malgache, même si les rapports en témoignent. « La lettre circulaire de Mgr Jean Batiste Cazet, vicaire apostolique de Madagascar de 1892 à 1898, adressée le 19 février 1897 aux missionnaires catholiques reflète les rapports complexes entre la politique et la religion à la fin de XIXème siècle et au début du XXème siècle » . Cette déclaration surgit dans un contexte de consolidation du régime colonial sur la grande ile. On se rappelle que pour la loi de 06 aout 1896, Madagascar était devenu colonie Française. Et aussi sous le gouvernorat d’Albert Picquié, la loi de séparation des Eglises et de l’Etat est entrée en vigueur à Madagascar par le décret du 11 mars 1913.
Et même, les Eglises étaient et demeurent l’un des acteurs majeurs de la vie politique. De nombreuses déclarations l’illustrent, à l’exemple de celle des évêques catholiques affirmant le 23 janvier 1934, un soutien des mouvements par l’indépendance de Madagascar que «l’Eglise approuve et favorise un juste nationalisme, celui qui veut à son pays sa sécurité, le respect de ses droits, sa vraie place dans le concert mondial » .
Ainsi, depuis la colonisation la religion et la politique vont de pair pou la société Malgache.
La religion et la politique pendant la première république
Sous la première république (1960-1972), le principe de la laïcité de l’Etat est inscrit dans l’article 2 de la constitution. « La république malgache affirme sa neutralité a l’égard des différent religions. L’Etat et les églises jouissent de leur autonomie dans le domaine respectif. Ils s’interdisent toute immixtion dans le domaine qui n’est pas de leur ». la laïcité s’articule dans ce sens sur la neutralité du pouvoir public à l’égard de toutes les religions. Ainsi, le président Philibert TSIRANANA (1910-1972) s’efforce d’adopter des rapports équilibrés avec la différente confession religieuses. Peu après son accession au pouvoir, il rend visites au Pape Paule VI au Vatican. Puis il se rend au siège du conseil œcuménique des Eglises à Genève. « ces deux visites montrent que Tsiranana, en tant que Président d’une république laïque, entend entretenir des liens équilibrés avec les différentes confessions religieuse » .
Malgré la constitutionnalisation de la neutralité religieuse de l’Etat, l’ordre spirituel et la vie politique étaient dans une logique d’imbrication. De grandes figure politiques et de hauts fonctionnaire de l’Etat, parmi lesquels le pasteur Richard Andriamanjato, exerçaient des responsabilités de premier plans dans leur églises. Depuis la veille de l’indépendance, Andriamanjato s’était engagé dans la vie politique. Lors du referendum de 1958, il faisait voter « non » contre Philbert Tsiranana. Depuis 198, il présidait le parti du congrès de l’indépendance de Madagascar, l’AKFM, dont il était l’un des fondateurs. De 1959 à 1972, il était maire d’Antananarivo, tout en étant pasteur du temple FJKM d’Ambohintately (de 1957 à 2001). En 1972, il était l’un des leaders des opposants au régime en place, celui dirigé par Philibert Tsiranana. Ses engagements et ses activités politiques se sont étendus au-delà de la Première République. Sous le premier régime Didier Ratsiraka (1975-1991), il était membre du conseil suprême de la révolution. Durant les manifestations pour la démocratie au début des années 1990, il soutenait le professeur Zafy Albert et créait l’AKFM-Renouveau (1989). Lors de la transition vers la troisième République, il présidait, de 1991 à1993, avec Manandafy Rakotonirina le Comité de redressement économique et social (CRES). Elus député lors des législatives du 16 juin 1993, il devenait le premier président de l’assemblée nationale de la troisième république. Le passage suivant résume l’impressionnant parcours politico-religieux de cette personnalité qui a marqué l’histoire politique contemporaine de Madagascar : « Richard Andriamanjato, pasteur d’une paroisse de l’Eglise réformez, homme de lettres, et aussi chef de parti et homme politique,[est] toujours en premier ligne de la vie politique malgache depuis 1958. » .
Le pasteur Daniel Rajakoba fait partie des hauts fonctionnaires et des politiques qui sont en même temps des hommes d’Eglise. Sous le gouvernement transitoire du général Gabriel Ramanantsoa (1972-1975), sous celui de l’éphémère régime du colonel Richard Ratsimandrava( 5 juin 1975), il était pasteur de FJKM et ministre de la Fonction publique, du travail et des Lois sociales ; il garda ce poste jusqu’à l’arrivée de Didier Ratsiraka au sommet de l’Etat en juin 1975. Pendant ce temps, comme pasteur, il prêchait hebdomadairement l’Evangile sur les ondes de la Radio nationale malagasy.
Même si ce parcours politiques des pasteurs Richard Andriamanjato et Daniel Rjakoba est incomplet, il reflète le visage d’hommes politiques et hauts responsables de la République exerçant des missions parallèlement aux seins des communautés ecclésiales. Ces deux personnalités illustrent l’imbrication de la religion et la politique à Madagascar ; mais leur cas n’est pas isolé comme le montrent les pasteurs Michel Fety et Rakotovao Razakaboana qui ont un parcours politico-religieux similaire.
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Table des matières
INTRODUCTION GENERALE
-PREMIERE PARTIE : Considération théorique et organisationnel
Chapitre I : Les différentes considérations théoriques sociologiques
Chapitre II : Les organisations des religions
Chapitre III : Etude comparative entre religion et politique à Madagascar
-DEUXIEME PARTIE : Analyse des résultats
Chapitre IV : Recours aux médecines traditionnelles
Chapitre V : Pratiques des guérisons par les mouvements religieux
Chapitre VI : Analyses des réalités sur le syncrétisme et la profusion des nouveaux groupements religieuses
-TROISIEME PARTIE : Approche prospective
Chapitre VII : Vérifications des hypothèses
Chapitre VIII : Force, faiblesse, opportunités et menaces (FFOM)
Chapitre IX : Recommandations
CONCLUSION GENERALE
-BIBLIOGRAPHIE
-TABLE DES MATIERES
-ANNEXE
-RESUME
