Effets des PGPB (Plant Growth Promoting Bacteria) sur les plantes
Les PGPB sont des bactéries qui ont des effets positifs sur les plantes avec lesquelles elles s’associent. Lors de ces interactions, On observe une stimulation du développement des organes végétatifs des plantes à graines ainsi qu’une induction de la résistance aux pathogènes et aux stress abiotiques. La stimulation de la croissance de l’appareil aérien, via une augmentation de la surface totale des feuilles, de leur biomasse et d’une précocité de l’émergence des pointes foliaires, aboutit dans certains cas à une augmentation du rendement grainier (Berge et al., 1990). L’inoculation par des PGPB provoque des changements marqués de l’architecture racinaire tel que l’augmentation de la longueur des racines latérales (Mantelin et Touraine, 2004). Cette modification morphologique est accompagnée d’un accroissement de la densité et de la longueur des poils absorbants ainsi que d’une modification de leur rythme de croissance. Ces transformations morphologiques aboutissent toutes à une plus grande surface d’échange entre les racines et le sol, ce qui pourrait conduire à l’augmentation du prélèvement des nutriments. Cette hypothèse est communément proposée pour expliquer les effets bénéfiques des PGPB sur la croissance des plantes. L’amélioration de la nutrition minérale peut ainsi expliquer la stimulation de la croissance des plantes. Les modifications morphologiques consécutives à l’inoculation de la plante par une PGPB sont donc susceptibles d’expliquer, au moins en partie, les effets bénéfiques des PGPB sur la croissance des plantes (Mantelin et Touraine, 2004).
Arabidopsis thaliana / Phyllobacterium STM196 : le modèle d’étude de l’équipe « Réponses des Plantes aux microorganismes »
L’équipe « Réponses des plantes aux microorganismes » dirigée par Bruno Touraine s’intéresse particulièrement à Phyllobacterium STM196, une PGPB efficace sur le colza (Brassica napus) mais aussi sur l’Arabette (Arabidopsis thaliana) (Mantelin et al., 2006). Le génome de l’Arabette est entièrement séquencé et de très nombreux outils permettant des approches de génomique fonctionnelle sont disponibles. Phyllobacterium STM196 appartient à la famille des Phyllobacteriaceae, ordre des Rhizobiales dans la classe des α-Protéobactéries. L’organisation génomique du genre Phyllobacterium est différente des autres genres de Rhizobia ; elle consiste en un seul chromosome et en quatre méga plasmides pour une taille totale de 5330 kb (Jumas-Bilak et al., 1998 ; Moreno, 1998). Ce génome, malgré sa taille réduite, n’a pas encore été séquencé. Bien que le genre Phyllobacterium ait été peu étudié, il apparaît clairement comme un genre fréquemment associé aux plantes. Certaines souches de Phyllobacterium fixent librement l’azote atmosphérique de l’air mais, en dehors des souches isolées par notre équipe et par Chanway (1998), peu ont une action positive sur la croissance des plantes.
La souche Phyllobacterium STM196, isolée de la rhizosphère du colza (Brassica napus) est une PGPB très efficace (Larcher et al., 2003). Elle induit une augmentation de 66% du poids sec de l’appareil aérien et de 52% du poids sec du système racinaire après 15 jours d’inoculation en tubes d’attapulgite. Cette souche stimule l’absorption du nitrate par le colza : une augmentation de 56% de la quantité totale d’azote absorbée est observée dans des plantules de colza inoculées (Larcher, 2002). Le groupe de Bruno Touraine utilise le système biologique modèle A. thaliana / Phyllobacterium comme outil pour essayer de comprendre quelles sont les réponses moléculaires mises en place par la plante en réaction à la bactérie expliquant les effets bénéfiques sur sa croissance. Dans une première étape, l’équipe a abordé l’impact de Phyllobacterium sur le métabolisme azoté. Ce choix se justifie par le fait que l’azote est un nutriment souvent limitant pour la croissance des plantes et que la régulation de ce métabolisme affecte le développement racinaire. Classiquement, le développement racinaire d’A. thaliana est réprimé par des fortes concentrations en azote. L’inoculation par Phyllobacterium atténue fortement cette répression. Il en résulte que le développement racinaire des plantes cultivées en présence de fortes concentrations d’azote est plus important lorsque les plantes sont inoculées. Cette observation indique que la voie de signalisation impliquée dans l’interaction avec Phyllobacterium affecte également la régulation azote dépendante du développement racinaire. D’autres mécanismes pourraient être impliqués dans l’action bénéfique de Phyllobacterium STM196 sur le colza et l’Arabette. Par exemple, Phyllobacterium pourrait avoir une action sur la croissance des racines via l’amélioration de la nutrition phosphatée (Mantelin et al., 2006). Phyllobacterium pourrait aussi, en réponses aux exsudats racinaires, excréter des substances capables de modifier la production d’hormones par la plante (par exemple, l’auxine), du tréhalose ou des molécules similaires à des facteurs nods (Douay, 2007). Bien que l’équipe continue de développer chacune de ces pistes, le développement d’approches massives telles que des analyses de transcriptomes (puces CATMA) a permis de dégager d’autres voies métaboliques potentiellement modifiées par l’inoculation par Phyllobacterium. L’équipe souhaite ainsi étudier l’implication des thiorédoxines et des glutarédoxines de plantes (ainsi que de leurs protéines régulatrices) dans l’interaction Phyllobacterium / Arabidopsis.
Les régulations par oxydo-réduction pourraient être importantes dans la réponse des plantes aux PGPB
L’amélioration de croissance de la plante par la PGPB nécessite un changement en profondeur du métabolisme carboné mettant en jeux des régulations multiples conduisant à la modification de l’activité de nombreuses enzymes (Tasselli, 2007). Chez les plantes, un mode de régulation important consiste en l’activation des enzymes par réduction (Figure 1). Des enzymes clés des voies aussi différentes que le cycle de Calvin, la synthèse d’amidon, l’assimilation de l’ammonium ou la biosynthèse d’acides gras (Geigenberger et al., 2005) sont modifiées de cette manière. Le large spectre des modifications induites par une PGPB pourrait être couvert par une simple modification du système rédox. Il est ainsi envisageable que les modifications observées dans la nutrition azotée chez A. thaliana inoculée par Phyllobacterium soient dues à des modifications du statut rédox qui à son tour régulerait l’activité d’enzymes clés dans l’assimilation de l’ammonium comme la GS (Glutamine Synthase) ou la GOGAT (Glutamate Synthase) (Figure 2). Une autre indication de l’implication du statut rédox dans l’interaction plante/bactérie est que lorsque les A. thaliana croissent in vitro sur un milieu non supplémenté en sucre, les portions de racines issues d’une croissance nocturne se révèlent quasiment imberbes alors que celles produites durant une période diurne présentent de nombreux poils bien développés. Les poils racinaires poussent par alternance. Après inoculation par Phyllobacterium STM196, les poils poussent aussi bien la nuit que le jour : le phénomène d’alternance est ainsi supprimé (Desbrosses, communication personnelle). Le fait que l’état rédox des cellules au cours d’une journée évolue et que l’application de glutathion exogène (molécule réductrice) stimulent la croissance du poil (Sanchez-Fernandez et al., 1997) pose naturellement la question du contrôle de l’allongement des poils racinaires ainsi que l’alternance nycthéméral via le système rédox. Des expériences d’analyse de promoteur fusionné au gène rapporteur GUS montrent clairement que certains gènes codant des thiorédoxines h cytosoliques sont fortement exprimés dans les poils racinaires (Reichheld et al., 2002), cellules très sensibles et réactives à la présence de bactéries. La transcription du gène codant la thiorédoxine cytosolique h 5 est stimulée par la présence de bactéries (Laloi et al., 2004) confortant l’hypothèse d’une influence bactérienne. D’autre part, des données d’analyse d’expression de gènes justifient que l’équipe s’intéresse au rôle du statut rédox. La comparaison de transcriptomes entre Arabidopsis témoins et Arabidopsis inoculées par Phyllobacterium STM196 ou d’autres bactéries montre clairement une modification d’expression de gènes impliqués dans le maintien du statut rédox.
|
Table des matières
1 Introduction
1.1 Effets des PGPB (Plant Growth Promoting Bacteria) sur les plantes
1.2 Arabidopsis thaliana / Phyllobacterium STM196 : le modèle d’étude de l’équipe « Réponses des Plantes aux microorganismes »
1.3 Les régulations par oxydo-réduction pourraient être importantes dans la réponse des plantes aux PGPB
1.4 Objectifs du stage
2 Résultats
2.1 Analyse de l’expression des gènes impliqués dans le statut rédox par RT-PCR quantitative dans des plantules d’A.thaliana, 7 jours après inoculation par Phyllobacterium STM 196
2.1.1 Recherche de gènes surexprimés dans les plantes inoculées dans les données CATMA
2.1.2 Validation des résultats CATMA
2.1.3 Expression des gènes candidats dans les racines 7 jours après inoculation
2.1.4 Cinétique d’expression des gènes impliqués dans le statut rédox, entre 30 minutes et 24 heures après inoculation
2.1.5 Niveau d’expression des gènes candidats au cours d’une journée sans inoculation
2.1.6 Niveau d’expression des gènes candidats au cours d’une journée avec inoculation
2.2 Caractérisation phénotypique
2.2.1 Caractérisation phénotypique des lignées cad2 ; ntra-ntrb ; trx h (∆1,2,3,5)
2.2.2 Impact des mutations cad2 ; ntra-ntrb ; trx h (∆1,2,3,5) dans la réponse d’Arabidopsis à l’inoculation
3 Discussion
3.1 Apport de notre phénotypage à la compréhension du rôle des thiorédoxines et glutarédoxines dans les plantes
3.2 Les voies des thiorédoxines et des glutarédoxines sont impliquées dans la réponse d’Arabidopsis à Phyllobacterium
4 Matériel et méthodes
4.1 Matériel biologique
4.1.1 Arabidopsis thaliana
4.1.2 Phyllobacterium STM196
4.2 Méthode
4.2.1 Caractérisation phénotypique
4.2.2 RT-PCR quantitative
4.2.3 Analyse statistique
5 Conclusion
