Écologie et TIC : de faux amis ?
Les théories japonaises de management mettaient en avant l’importance de tendre vers les cinq « zéros » : zéro défaut, zéro stock, zéro délai, zéro papier, zéro panne. Les TIC permettant le zéro papier, censé réduire la bureaucratie au sein des organisations et permettre de préserver l’environnement. Des années après, le constat est mitigé : les TIC, ou tout du moins l’utilisation actuelle que l’on en fait, ne permettent pas la préservation de l’environnement : pire encore, cela aggrave sa détérioration !
La « dématérialisation est une bonne chose pour l’environnement » voila la prison cognitive qui nous touche. Nous pensons que l’utilisation des ordinateurs, du réseau, d’Internet nous permet de sauvegarder l’environnement : faux !
Une étude publiée par l’agence d’évaluation environnementale BIO Intelligence service pour la commission européenne en septembre 2008 met en évidence que les TIC contribuent à hauteur de 2 % aux émissions européennes de gaz à effet de serre, ce chiffre devrait doubler d’ici 2020 ! Bien que l’on pourrait croire que la consommation électrique est le point le plus important de l’effet néfaste des TIC sur l’environnement, ce n’est pas le cas, en effet on remarque après une étude plus approfondie, que c’est à cause d’actions que l’on peut désormais qualifier de « gestes du quotidien » que les TIC sont de plus en plus néfastes pour l’environnement.
De la solution de substitution à la solution complémentaire
Si on analyse plus en détail ce qui était prévu pour les TIC, c’est-à-dire une solution permettant d’éviter les déplacements (télétravail, e-commerce, email…) et de réduire la consommation de papier (dématérialisation), on se rend compte que l’utilisation que l’on en fait n’est pas du tout celle qui était « prévue ». Nous sommes alors passés d’une solution de substitution (qui devait réduire l’émission de gaz à effet de serre et permettre l’économie de papier, donc d’arbres) à une solution de complémentarité :
– Nous sommes en déplacement, nous prenons notre ordinateur portable : où est le télétravail dans ce cas ?
– Nous avons dématérialisé une grande partie de l’information : mais pour l’utiliser, nous l’imprimons.
– Nous souhaitons acheter un produit hi-fi ? Combien de recherches Google nous faudra-t-il pour nous renseigner sur les produits ? Les prix ? Les vendeurs ?…
Contre une seule visite en magasin.
C’est donc notre utilisation des TIC qui est « mauvaise » pour l’environnement, nous n’utilisons pas les TIC comme elles devraient l’être (pour ce qui est de la protection de l’environnement), nous les avons « ajoutées » à l’impact sur l’environnement que nous avions précédemment à leurs inventions. Pour limiter l’impact des TIC, il faut donc modifier nos attitudes professionnelles (et personnelles), pour cela, à l’aide d’une étude de l’ADEME nous allons chiffrer l’impact de l’utilisation de certaines fonctionnalités des TIC.
Étude de l’impact des TIC
À l’aide d’une étude de l’ADEME nous allons chiffrer l’impact des principaux usages des TIC dans un cabinet d’expertise-comptable :
– Email
– Requêtes web .
Comprenons tout d’abord la méthode utilisée par l’ADEME. L’ADEME utilise la méthode ACV (Analyse Cycle de Vie). Cette méthode établit un « scénario de référence » à pratique professionnelle constante (« Business As Usual ») et prend en compte tous les éléments depuis la conception des outils nécessaires jusqu’à leur élimination.
Les pratiques décrites ci-dessous sont extrêmement fréquentes en cabinet. En effet, les collaborateurs du cabinet Activance effectuaient régulièrement des recherches sur Google pour trouver une information, qu’elle soit fiscale, sociale, économique… De plus, nombreux sont les documents qui sont transmis d’un bureau à un autre, que ce soit par mail ou par clé USB. Le cabinet dispose d’ailleurs de nombreuses clés USB mises à la disposition des salariés.
Requêtes web
Les requêtes web sont le propre d’Internet : comment surfer sur internet sans faire de recherches sur un moteur de recherche (comme Google) ?
Les requêtes web prennent une place de plus en plus importante, notamment au sein des organisations qui sont de plus en plus « connectées ».
Réduire l’impact des requêtes est cependant possible, mais cela inclut une modification de nos comportements professionnels ; ainsi, l’ADEME met en évidence que taper directement l’adresse d’un site internet auquel on souhaite accéder (ou l’avoir en favoris) permet de réduire considérablement l’impact de nos recherches web.
En cabinet, sensibiliser les collaborateurs à l’impact de leurs recherches sur Google pourrait permettre de réduire cet impact. En mettant simplement les sites les plus consultés dans les favoris par exemple, ou avec des liens directs dans un dossier placé sur le bureau.
Email
Révolution d’internet, le nombre d’émail envoyés atteint des sommets, que ce soit les newsletters ou le spam, c’est 250 milliards de mails qui s’échangent chaque jour en 2009. Un chiffre en constante évolution, puisque selon Arobase, ce n’est pas moins de 500 milliards de mails qui s’échangeront chaque jour en 2012. Ainsi, l’ADEME pointe du doigt l’émission astronomique de gaz à effet de serre qu’engendrent ces milliards de mails. En effet, envoyer 33 courriels de 1 Mo à 2 destinataires par jour et par personne engendre des émissions de CO2 équivalentes à 180 kg, soit plus de 1 000 km en voiture.
Changer nos habitudes devient alors une priorité compte tenu de ces chiffres. En cabinet, les collaborateurs échangent des informations par mail, ainsi je remarquais souvent que les collaborateurs de mon service envoyaient des mails aux collaborateurs des autres services, alors que ces services ne sont qu’à 30 mètres de distance. Ce phénomène semble ne pas être une exception du cabinet où j’ai effectué mon stage, on peut remarquer que les managers « dénoncent » le nombre de mails qu’ils reçoivent par jour, facteur de stress pour eux !
Remarquons que le but n’est pas ici, de revenir aux courriers « traditionnels », mais de développer une meilleure prise en compte des impacts de notre utilisation des mails. Ainsi réduire le nombre de destinataires, ou le temps de stockage des mails est un moyen de réduire ces émissions et donc, de protéger notre environnement sans nuire aux besoins de performances et de flexibilité de l’entreprise.
De plus, un cabinet « écologiquement responsable » pourrait s’adjuger de nouveaux clients désireux de respecter l’environnement, tout n’est pas si néfaste dans l’impact des TIC sur l’environnement, étant donné que l’on peut le limiter, et tirer un avantage de cette limitation.
Une source d’avantages concurrentiels
Il est alors possible que l’écologie devienne un enjeu pour se distinguer de ses concurrents. On peut aisément imaginer un cabinet d’expertise se distinguer des autres grâce à sa « responsabilité environnementale ». La SARL Activance, pour sa part, mettait en avant en interne l’impact de l’utilisation des outils informatiques. C’est comme cela que j’ai « découvert » le rapport de l’ADEME utilisé dans la partie précédente pour chiffrer les impacts des TIC. On peut imaginer que la sensibilisation interne faite par Activance puisse contribuer à améliorer son image de marque en externe. On pourrait même imaginer dans les prochaines années, la mise en place d’un tableau de bord environnemental dans le cadre de la responsabilité sociale de l’entreprise.
Ainsi nous pouvons en conclure que les TIC sont aussi des « supports » de la dégradation de notre environnement, la dégradation à proprement parler venant de notre utilisation de ces supports. Il nous faut alors modifier notre culture et l’utilisation faite des TIC pour réduire leur impact négatif sur l’environnement. Ainsi, les cabinets d’expertise comptable, rompus à l’utilisation des TIC, peuvent constituer des zones d’innovation organisationnelle en matière de gestion écologique des outils informatiques. Il en ressort une fois de plus, une double mission pour l’expert-comptable : mettre en place des processus, des consignes, une culture d’entreprise qui permettent à son cabinet de préserver l’environnement. Ainsi, au fait des conséquences négatives de l’utilisation des TIC pour l’environnement, l’expert-comptable pourra alors conseiller son client sur les nouveaux modes d’organisation interne qui permettent de réduire ces impacts. Voilà la naissance d’une nouvelle mission de l’expert-comptable, source d’avantages concurrentiels, qui trouve particulièrement sa place dans le cœur du métier d’expertise : les PME/TPE.
Néanmoins, remarquons qu’actuellement, l’écologie, au niveau de l’utilisation des TIC n’est une limite qu’a celui qui se l’applique. Sauf, si le client la prend en compte aussi, dans ce cas là, comme nous l’avons souligné dans la partie précédente, l’écologie devient un avantage concurrentiel. Mais c’est parfois le client qui est lui-même réfractaire à la mise en place de solutions « nouvelles » liées aux TIC. Le type de clientèle de l’expert comptable est donc une limite à l’intégration des TIC au sein des cabinets.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE 1 : PRÉSENTATION DE L’ENTREPRISE ET DES MISSIONS EFFECTUÉES
A) Fiche signalétique
B) Historique et situation actuelle du cabinet
C) Clientèle
D) Organisation du travail
E) Système d’information
F) Missions effectuées pendant le stage
PARTIE 2 : LES ENJEUX DES TIC
1) Les avantages des TIC dans un cabinet d’expertise
1.1) Approche en termes de réseau
1.2) Étude du réseau Activance
1.2.1) Vers plus d’accessibilité
1.2.2) Vers plus de portabilité
1.2.3) Vers plus de productivité
1.3) Externalisation
1.3.1) Intérêts de l’externalisation
1.3.2) Les moyens de l’externalisation
1.3.3) Mise en place d’une saisie externalisée
1.4) La modification de la profession face aux TIC
1.4.1) Vers une nouvelle gestion de l’information
1.4.2) Un besoin constant de transversalité
1.4.3) Intelligence Économique (IE) et TIC
1.5) L’Ordre : un soutien aux cabinets
2) Les limites des TIC dans un cabinet d’expertise
2.1) Réseau et sécurité informatique
2.1.1) Risque de pertes et d’altérations des données
2.1.2) Risque de vol des données
2.1.3) Cartographie des risques des TIC d’Activance
2.2) Les couts cachés de l’utilisation des TIC
2.2.1) Les coûts cachés au sein du cabinet
2.2.2) Les coûts cachés : Mission de l’expert-comptable
2.2.3) Les autres coûts cachés (pour le cabinet et pour ses clients)
2.3) Écologie et TIC : de faux amis ?
2.3.1) De la solution de substitution à la solution complémentaire
2.3.2) Étude de l’impact des TIC
2.3.3) Une source d’avantages concurrentiels
2.4) Le client : limite potentielle
2.4.1) Des méthodes de travail contingentes de la clientèle du cabinet
2.4.2) Un système d’information flexible, à faible coût et performant ?
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
TABLE DES ILLUSTRATIONS
ANNEXES
