Contexte du domaine automobile
Alterno-démarreur
L’alterno-démarreur ou Belt Starter Generator (BSG) est un système de type P0. Il est particulièrement intéressant car il ne nécessite pas de modification du train de propulsion. La réduction d’émissions polluantes est possible grâce aux fonctions suivantes :
— la récupération d’énergie au freinage réalisée lors des phases de décélération afin de stocker l’énergie sous forme électrique dans la batterie;
— la fonction start and stop permettant l’arrêt du MCI lorsque le véhicule est à l’arrêt ou en roue libre;
— l’assistance de couple réalisée afin d’accompagner le MCI lors des fortes sollicitations;
C’est avec ces objectifs qu’ont été développées les gammes de produits integrated Starter Alternator Reversible System (iStARS) et integrated Belt Starter Generator (i BSG) de Valeo. Les produits iStARS sont la première génération de systèmes réversibles. Les fonctions start and stop et récupération d’énergie durant les phases de décélération peuvent être réalisées. L’iStARS est un système 12V dont l’électronique de puissance est composée d’un onduleur réversible avec des composants MOSFET. La première version, figure 1.7, est lancée en 2004. L’électronique de puissance est d’abord localisée dans un boitier externe afin d’assurer le respect des contraintes thermiques. Puis à partir de 2010, l’électronique est intégrée dans la machine comme pour les alternateurs classiques. Les systèmes i-BSG permettent d’augmenter la puissance électrique disponible jusqu’à 10kW . Ces machines sont toujours installées sur la courroie accessoire du véhicule mais elles nécessitent un réseau 48V en complément du réseau 12V existant. Le réseau 48V est alimenté par une batterie afin de stabiliser la tension et la connexion vers le réseau 12V est réalisée par un convertisseur DC/DC. L’ensemble de ces convertisseurs sont sources de PEM qu’il est nécessaire de maîtriser. Les méthodes de simulation développées au cours de ce travail de thèse ont pour objectif de modéliser le comportement en haute fréquence de ces systèmes. En effet, les systèmes i-BSG possèdent une architecture électrique plus complexe que les alternateurs, cela peut poser des problèmes de non conformité aux normes CEM tel que nous le décrivons maintenant.
Notions de compatibilité électromagnétique
La CEM est une science récente née au XIXe siècle suite à l’apparition des télécommunications [13]. En effet le transport d’informations peut être parasité par l’environnement électromagnétique. Pour ces raisons, des institutions telles que le Comité International Spécial des Perturbations Radioélectriques (CISPR) ont été créées afin de fixer un cadre normatif à l’utilisation des télécommunications. De plus, afin de satisfaire les exigences normatives, les produits électriques et électroniques sont soumis à la directive 2014/30/UE qui définit la CEM de la manière suivante [14]:
« L’aptitude d’équipements à fonctionner dans leur environnement électromagnétique de façon satisfaisante sans produire eux-mêmes de perturbations électromagnétiques intolérables pour d’autres équipements dans cet environnement. »
Les deux aspects nécessaires à la compatibilité électromagnétique sont abordés dans cette définition :
— l’immunité qui représente l’aptitude d’un système à fonctionner correctement en présence de perturbations électromagnétiques;
— l’émission qui correspond au niveau de perturbations produit par un système en fonctionnement.
Les systèmes électriques sont de plus en plus intégrés, les éléments perturbateurs et sensibles sont parfois regroupés sur la même carte électronique ce qui peut engendrer une auto-perturbation du système. Dans le cas d’une chaîne de conversion, il est nécessaire de s’assurer que l’électronique de puissance ne perturbe pas l’électronique de commande, les capteurs ou le réseau de communication. Pour appréhender un problème de CEM, les ouvrages [5, 15, 16] s’appuient sur une décomposition en trois éléments telle que l’illustre la figure 1.9. En effet, les PEM sont générées par une source et se transmettent à la victime, l’élément sensible, par un couplage. Nous pourrons alors agir sur ces trois entités pour résoudre un problème de CEM :
— limiter les perturbations générées par la source;
— réduire le couplage entre la source et la victime;
— augmenter le seuil d’immunité de la victime.
Origines des perturbations électromagnétiques
De manière générale, les sources de PEM sont liées aux fortes variations de courant et de potentiel. Nous décrivons maintenant les sources classiques présentes dans l’environnement puis, plus particulièrement, celles liées aux convertisseurs statiques en électronique de puissance.
Sources naturelles et artificielles de perturbation
Nous pouvons distinguer deux principaux types de source de perturbations : naturelles et artificielles. Les sources naturelles de PEM ne sont pas liées à l’activité humaine. L’exemple le plus commun correspond aux Décharges ElectroStatiques (DES). Lorsque deux conducteurs possédant des potentiels différents sont suffisamment proches alors un arc électrique s’amorce. Ce type de perturbation est particulièrement étudié en immunité afin de s’assurer que les composants électriques ne soient pas détruits par surtension ou surcourant suite à une DES [17]. L’ensemble des systèmes électriques sont générateurs de PEM dont le degré de nuisance est relatif à l’amplitude et la fréquence des signaux électriques. Il s’agit ici de sources artificielles. Nous pouvons également distinguer deux types de sources artificielles de PEM :
— intentionnelle, les émissions répondent à un besoin fonctionnel comme par exemple pour un four à micro-ondes ou dans les télécommunications;
— non-intentionnelle lorsqu’elles sont une conséquence du traitement appliqué aux signaux.
Dans les deux cas, les niveaux de PEM générés sont soumis à des réglementations et doivent être maîtrisés dans une certaine mesure. Par exemple, pour les sources électromagnétiques intentionnelles, des bandes de fréquences sont allouées pour chaque type d’application afin de limiter le niveau de nuisance des systèmes les uns par rapport aux autres. Lorsque les PEM générées par un système ne répondent pas à un besoin fonctionnel, il est nécessaire de connaitre leurs caractéristiques afin d’éviter l’auto perturbation du système ou la perturbation des systèmes environnants.
Cas de l’électronique de puissance
En électronique de puissance, la conversion d’énergie électrique est réalisée grâce à des composants semi-conducteurs. Leur commutation permet de moduler les niveaux de courant et de tension. Les signaux en électronique de puissance possèdent généralement les caractéristiques suivantes [15, 18] :
— une périodicité relative à la fréquence de découpage du convertisseur;
— des transitoires rapides dus aux commutations des composants semi conducteurs, l’ordre de grandeur de ces variations est de quelques 10kV/µs et quelques 100A/µs.
Chemins de propagation
Dans les systèmes de conversion électrique, nous avons vu que les PEM étaient générées par les variations de courant et de tension. La diffusion de ces perturbations peut s’effectuer de deux manières :
— conduite, les courants circulent dans les conducteurs;
— rayonnée, le circuit électrique agit comme une antenne qui émet un champ électromagnétique.
Les couplages en champ proche, par diaphonie, sont généralement dits conduits bien que le support de transmission soit un champ électrique ou magnétique. Nous détaillons à présent les différents moyens de couplage.
Couplages capacitifs et inductifs
Ces couplages sont réalisés par des champs électromagnétiques proches. Cela signifie que la distance entre les conducteurs perturbateurs et sensibles est relativement courte par rapport à la longueur d’onde. En champ proche, nous parlons de champ électrique E ou magnétique H suivant la nature du circuit :
— Un circuit à haute impédance est équivalent à une antenne de E ;
— Une boucle à faible impédance correspond à une antenne de H.
Perturbations électromagnétiques dans l’automobile
En France, le premier arrêté relatif aux perturbations radioélectriques dans le domaine automobile est diffusé en 1957 [22]. L’objet de ce texte est de limiter les interférences sur les bandes de fréquences réservées à la radio et à la télévision. Dans l’automobile, les PEM sont dues à l’allumage électrique des MCI. En effet cette fonction nécessite une impulsion de quelques kV afin de générer un arc électrique sur la bougie. La solution mise en œuvre consiste à blinder le faisceau d’allumage. La prise en compte de la CEM dans la conception des véhicules n’est donc pas récente. Cependant, les enjeux et les méthodes de développement ont changé. En effet, l’électronique est devenue omniprésente à bord des véhicules comme nous l’avons vu dans la partie 1.1, ainsi, son intégration requiert une attention particulière afin que :
— l’ensemble des équipements électriques à bord du véhicule puisse fonctionner simultanément;
— l’environnement ne soit pas perturbé par les PEM générées par le véhicule;
— l’automobile ne soit pas susceptible aux PEM présentes dans son environnement.
De plus, les enjeux liés au développement du véhicule du futur tendent à durcir les contraintes de CEM dans ce domaine puisque :
— le véhicule communicant et les nouveaux moyens de communication devant être intégrés;
— la voiture autonome soulevant encore plus la question de la sûreté de fonctionnement.
Ainsi, nous allons dans la partie suivante discuter des méthodes et outils connus pour traiter les problématiques de CEM. Nous nous limiterons au domaine des émissions électromagnétiques conduites.
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Table des matières
Introduction générale
1 Contexte et état de l’art
1.1 Contexte du domaine automobile
1.1.1 Systèmes embarqués dans les véhicules
1.1.2 Hybridation du groupe motopropulseur
1.2 Notions de compatibilité électromagnétique
1.2.1 Origines des perturbations électromagnétiques
1.2.2 Chemins de propagation
1.2.3 Perturbations électromagnétiques dans l’automobile
1.3 Quantification des niveaux d’émissions
1.3.1 Cadre normatif
1.3.2 Méthodes de mesure des perturbations électromagnétiques
1.4 Modélisation du comportement électromagnétique
1.4.1 Méthode de caractérisation des composants
1.4.2 Modèles des composants électriques
1.4.3 Modèles des connexions électriques
1.4.4 Modélisation par sources équivalentes des systèmes d’électronique de puissance
1.5 Conclusion et positionnement des travaux
2 Méthodes de caractérisation et modélisation pour l’électronique de puissance
2.1 Méthode des pinces de courant
2.1.1 Principe de fonctionnement
2.1.2 Amélioration du processus de calibration
2.1.3 Validation expérimentale
2.2 Modélisation de type circuit électrique
2.2.1 Stratégie d’établissement du modèle circuit
2.2.2 Ajustement des paramètres du modèle
2.2.3 Validation de la méthode
2.3 Modèle des inductances parasites dans les connexions
2.3.1 Modélisation des couplages inductifs
2.3.2 Validation de la méthode
2.3.3 Comparaison avec le logiciel ADS
2.4 Caractérisation et modélisation des composants actifs
2.4.1 Caractérisation de la capacité de jonction d’une diode
2.4.2 Caractérisation d’un transistor dans un module de puissance
2.5 Conclusion
3 Modélisation des émissions conduites d’un alternateur
3.1 Modélisation d’un alternateur automobile
3.1.1 Constitution du système d’alimentation automobile
3.1.2 Validation expérimentale
3.2 Modélisation du processus d’acquisition des signaux
3.2.1 Transformée de Fourier à Court-Terme
3.2.2 Fenêtrage du signal
3.2.3 Modes de détection
3.3 Validation expérimentale du modèle de récepteur de mesure
3.3.1 Spectres de signaux usuels
3.3.2 Mesure d’émissions conduites en courant d’une chaîne de conversion
3.4 Application au modèle de l’alternateur pour évaluer le niveau des émissions conduites en tension
3.5 Conclusion
4 Méthode de modélisation fréquentielle
4.1 Méthode de modélisation par sources équivalentes à topologies multiples
4.1.1 Problématique liée à la représentation par sources équivalentes
4.1.2 Construction des topologies
4.1.3 Processus d’association des topologies
4.2 Contribution à la représentation d’une cellule de commutation
4.2.1 Topologies pour la représentation des commutations
4.2.2 Modèle des signaux de perturbations
4.2.3 Organisation globale des simulations fréquentielles
4.2.4 Application à un convertisseur Buck
4.3 Application aux convertisseurs de type onduleur
4.3.1 Développement de la méthode de modélisation
4.3.2 Application à un bras d’onduleur
4.3.3 Validation expérimentale
4.4 Conclusion
Conclusion générale
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