Consolidation normale des fractures
INTRODUCTION
Les fractures distales de la diaphyse humérale sont définies comme étant une solution de continuité de la diaphyse humérale au niveau de son tiers inférieur. [1].Les fractures du tiers distal de l’humérus sont relativement de faible incidence. Et le manque d’études sur la prise en charge de ces fractures, rend difficile de sortir avec une conclusion concernant leur traitement idéal. [2].La prise en charge de ces fractures est partagée entre partisans du traitementorthopédique et ceux du traitement chirurgical [3]. Les propriétés anatomiques du tiers distal de l’humérus, la localisation péri-articulaire des fractures à ce niveau et la fréquence de la comminution font que le traitement chirurgical soit controversé dans ses indications et ses techniques [4]. L’enclouage centromédullaire fait partie de l’arsenal thérapeutique des fractures du tiers distal de l’humérus.Notre travail est une étude prospective descriptive de 10 cas de fractures du tiers distal de la diaphyse humérale colligés au service de Traumatologie orthopédie B du CHU Mohamed VI de Marrakech, traitées par enclouage centromédullaire, durant une période de trois ans et s’étalant de mars 2014 au mois de Mars 2017. L’objectif du présent travail est l’évaluation de l’ostéosynthèse par enclouage centromédullaire des fractures distales de la diaphyse humérale sur les points suivants : les résultats anatomiques et fonctionnels à en attendre, et l’incidence des complications auxquelles elle expose.
causes de retard de consolidation osseuses :
On distingue différents types de facteurs :
– Ceux liés au patient.
– Ceux liés à la fracture.
– Ceux liés au geste chirurgical.
facteurs liés au patient :
• L’âge : le risque de non consolidation augmente avec l’âge. (Les autres facteurs comme l’anémie surtout si elle est associée à une hypovolémie, la malnutrition, le diabète, le sexe de l’individu ont été évoqués mais sont invalidés et ne sont donc pas à retenir) [25,26].
facteurs liés à la fracture :
oLe siège de la fracture : la localisation la plus impliquée dans la genèse de la pseudarthrose est le tiers moyen [27].
oL’importance de la comminution: plus il y a de fragments, et moins ça consolide [25,28].
oPerte de substance osseuse (ex : fracture ouverte avec morceau perdu dans l’accident).
oFracture ouverte.
oDégâts des parties molles (peau, muscle, périoste).
oSurvenue sur os infecté.
oSurvenue sur os irradié.
oLésion nerveuse tronculaire associée (fracture + paralysie du membre) [25,28].
facteurs liés au geste chirurgical :
oStabilité du montage (mobilité du foyer).
oPersistance d’un écart inter fragmentaire : si écart > 5-10 mm, cela augmente le risque de retard de consolidation ; le mieux est qu’il soit < 2mm.
oOstéosynthèse à foyer ouvert : on place une plaque d’ostéosynthèse en ouvrant la peau, on vide l’hématome (avec ses facteurs de croissance et ses cellules), on décolle le périoste (rôle important dans la consolidation) d’où le risque de retard de la consolidation et de pseudarthrose [26].
Le brassard de Sarmiento :
Dès 1963, Sarmiento énonçait les principes de la reprise précoce de la mobilisation. Cette méthode, bien codifiée par l’école strasbourgeoise, ne nécessite pas l’anesthésie ;l’hospitalisation est réduite, parfois absente. A l’admission, le malade bénéficie d’une immobilisation simple par bandage type Desault ou Gilchrist; en cas de déplacement important, la fracture peut être réduite par traction transolécrânienne. Le brassard est mis en place entre la 2 ème et la 4 ème semaine de telle façon que soit réalisé un appareillage quadrangulaire à effet hydraulique pour empêcher la rotation par un modelage soigneux au niveau des extrémités. Le plâtre peut être remplacé par un appareillage thermomalléable. La rééducation est alors débutée et surveillée de façon régulière avec contrôle radiographique tous les 8 jours les 3 premières semaines. Le délai de consolidation est de 9 à 11 semaines. Le taux de pseudarthrose est peu important (0 à 2,4 %) ; les défauts d’axe en varus, recurvatum, réalisent des cals vicieux dont la tolérance fonctionnelle est en règle excellente. Les raideurs des articulations de l’épaule et du coude sont en règle minimes. Cette méthode peut être utilisée en cas de paralysie radiale primitive. Les contre-indications sont représentées par les fractures ouvertes, les blessés polytraumatisés, les atteintes vasculaires initiales, et l’absence de coopération du malade [40].L’appareillage de Sarmiento est certainement la méthode orthopédique la mieux supportée par le patient coopérant ; elle peut s’appliquer à la grande majorité des fractures diaphysaires isolées. Le traitement fonctionnel des fractures fermées et isolées du tiers distal de l’humérus est largement accepté, vu le taux élevé de la consolidation et les bons résultats fonctionnels avec un taux minime de complications. La consolidation se fait, dans un très grand nombre de cas, en varus et angulation postérieure, mais la déformation est généralement bien tolérée et sans répercussion importante sur la fonction du membre supérieur.[41]La douleur et l’instabilité du foyer de fracture qui accompagnent le traitement fonctionnel sont à l’origine d’une restriction de la fonction du membre, avec risque de raideur de l’épaule et du coude.Les méthodes orthopédiques restent donc impraticables chez certains patients actifs, ainsi que les patients non coopérants, les fractures pathologiques et les patients polytraumatisés.
Moyens chirurgicaux:
Le traitement chirurgical semble assurer un alignement fiable et prédictible, et une restauration plus rapide de la fonction. Les lésions iatrogènes du nerf radial restent une préoccupation majeure.Le traitement chirurgical comporte 2 temps cardinaux qui sont la réduction du foyer de fracture et la fixation par un matériel d’ostéosynthèse. Cette ostéosynthèse peut être selon les cas mise en juxta focal, en intra focal ou en extra focal. L’avantage indéniable des deux derniers procédés étant la possibilité du foyer fermé.
a. Ostéosynthèse à foyer ouvert
a.1. Voie d’abord :
Pour le tiers distal l’abord postérieur se prête bien à une ostéosynthèse par plaque. Ce pendant l’installation est en décubitus ventral avec le bras posé sur une planchette. Il a été décrite par BOUSQUET: l’incision est médiane postérieure, le passage entre les éléments du triceps se fait en interne pour éviter le nerf radial. La corticale et le foyer sont atteints en passant en dedans du tendon du triceps et en clivant les fibres du vaste interne. Cette partie distale peut aussi être abordée en antérolatérale avec neurolyse du nerf radial mais la plaque doit être étroite et la règle des trois cortical est difficilement satisfaite vu que l’espace est insuffisant en distal avec risque d’impact de la plaque au niveau de la fosse olécranienne.
a.2. Plaque LCP /DCP à 4,5 mm :
Après la réduction du foyer, la fixation est assurée par une plaque vissée et la compression inter-fragmentaire est obtenue soit par le tendeur de plaque ou par auto compression, et maintenue par un minimum de six prises corticales (soit trois vis) de part et d’autre du foyer de fracture. Les vis de diamètre 4,5 doivent être utilisées, de même que les plaques dites plaques « à tibia » ou plus larges pour fémur à orifice en quinconce pour prévenir les risques de démontage.
a.3. Plaque LCP , pré contournée
Caractérisée par une épaisseur de plaque basée sur la plaque LCP 4.5/5.0 étroite, une extrémité amincie près de l’articulation et une angulation propre des trous de vis, la plaque est positionnée d’une manière à ce que son corps soit appliqué au centre de la face postérieure de l’os, et que l’extrémité incurvée distale soit appliquée sur l’arrière de la colonne latérale. La plaque est à une distance sûre de la fosse olécrânienne de manière à ne pas empêcher une extension complète du coude. La position de la plaque doit permettre l’insertion de la vis distale par la bride latérale, loin dans la trochlée. Un léger cintrage peut être nécessaire pour l’adaptation à l’anatomie du patient.
a.4. Deux plaques parallèles ou orthogonales :
Indiqué dans les fractures extra-articulaires de l’humérus distal, le système de plaques parallèles est adopté et permet une fixation rigide grâce à la possibilité d’insérer un nombre suffisant de vis au niveau du fragment distal, mais cette technique demande une dissection importante des parties moles pour exposer les deux colonnes médial et latéral et un temps opératoire plus long.
a.5. MIPO : Ostéosynthèse mini invasive par plaque :
La technique d’Ostéosynthèse mini invasive par plaque a été développée pour permettre une fixation biologique et minimiser les complications liées au techniques d’ostéosynthèse par ouverture du foyer ; à savoir l’endommagement des tissus mous et l’interruption de la vascularisation, responsables de pseudarthrose. La MIPO est réalisée par deux petits abords postérieurs distants du site de la fracture (Figure 43). Le nerf radial est individualisé et repéré par l’abord proximal. La fracture est fixée par une plaque verrouillée de 4,5/5,0 mm placée au niveau de la colonne latérale de l’humérus. L’abord antérieur n’est pas faisable en cas de fracture proche de la fosse olécranienne ou coronoïde et plus adapté aux fractures proximales et du tiers moyen de la diaphyse humérale.Selon certaines études, la MIPO représente une option fiable pour le traitement des fractures du tiers distal de l’humérus, mais le risque de lésion du nerf radial fait qu’elle soit une technique chirurgicale potentiellement dangereuse. Pour l’ostéosynthèse à foyer ouvert, le cal est per premium, sous dépendance de l’ostéogenèse corticale permettant un montage très stable et une reprise fonctionnelle précoce mais le risque paralysie radiale iatrogène est entre 2-5 % selon les séries, la dévascularisation osseuse lors de la désinsertion musculaire et du dépériostage exposent à la pseudarthrose avec un taux entre 2-6% selon les séries. Le risque d’infection profonde est plus élevé par rapport aux méthodes fermées avec un taux entre 2-5 %. La qualité osseuse médiocre au niveau du tiers distal chez les patients âgés expose au risque de démontage avec un taux entre 2-5% selon les séries de littérature.
b. Ostéosynthèses à foyer fermé :
Plusieurs modalités ont été décrites, mais les techniques varient en fonction de l’abord de la cavité médullaire et du principe de fixation. Ainsi, on décrit :
b.1. Embrochages:
-Embrochage fasciculé selon Hackethal :
Cette technique stabilise l’humérus grâce à un contact inter-fragmentaire étroit, l’autoblocage mutuel d’un nombre maximal de broches endomédullaires, leur divergence métaphysoépiphysaire proximale dans l’os spongieux céphalique et l’obstruction de la fenêtre d’entrée corticale distale. C’est une solution simple et peu coûteuse, se singularise par sa rapidité de mise en œuvre, son coût modeste, sa fiabilité et son innocuité lors de l’ablation. De plus, Le foyer fermé respecte l’hématome fracturaire. Mais les performances biomécaniques de l’embrochage apparaissent modestes selon certains auteurs. Le mode d’ostéogenèse serait proche de celui après traitement orthopédique caractérisé par un cal périosté important.
-Embrochages sus-tubérositaires :
Il s’agit de l’embrochages par voie postéroexterne sus-épicondylienne décrit par De La
Caffinière [42] et l’embrochage par voie interne sus-épitrochléenne proposé par Rogez.
b.2. Fixation externe :
Classiquement réservée aux lésions largement ouvertes, la fixation externe a été aussi appliquée par certains auteurs aux fractures fermées humérales. Les nouveaux fixateurs externes à fiches volumineuses non transfixiantes possèdent une fiabilité de prise proximale et distale, une rapidité de pose. Les indications correspondent à des cas bien particuliers : polytraumatisé, fracture largement ouverte.
b.3. Enclouages centromédullaires :
Les enclouages peuvent être utilisés par voie rétrograde ou antérograde. La mise en place d’un tuteur dans la diaphyse d’un os long nécessite d’aborder l’épiphyse pour se trouver dans son axe longitudinal endo-luminal. Pour l’humérus et vu le débord antérieur, l’axe théorique d’un clou rectiligne passe en haut par le pôle supérieur de la tête et émerge inévitablement de l’os en arrière dans la zone sus-olécrânienne en bas. S. Babin [43] a codifié l’enclouage centro-médullaire proximo-distal huméral avec alésage par clou de Kuntscher. La cavité centro-médullaire devenant étroite à sa distalité permet un certain blocage de la rotation ; mais une meilleure stabilisation est indispensable en cas de comminution en raison du risque d’impaction et surtout de rotation du foyer. Le verrouillage est obtenu par vissage en proximal et en distal (clou de Russell-Taylor, de Grosse et Kempf modifié) ou par un système mixte associant vissage et palettes expansibles (clou de Seidel) ou broches multiples (clou de Marchetti) [44]. Le clou de Seidel, creux, sans fente, verrouillable en proximal par deux vis frontale et sagittale et en distal par son système original de palettes est le plusrépandu. Le verrouillage distal se fait à partir de son point d’introduction et ne nécessite aucune visée radiologique. I. Kempf souligne l’intérêt de ce matériel utilisé de principe dans les fractures ouvertes, dans celles avec atteinte vasculaire ou paralysie radiale, et après échec du traitement orthopédique. Mais il souligne que les fractures distales nécessitent 4 à 5 cm de cavité médullaire intacte au-dessous du foyer pour assurer un verrouillage distal efficace.L’enfoncement disto-proximal du clou s’affranchit de cette limite d’indication, supprime tout risque de raideur de l’épaule mais expose à celui de flexum du coude. Le verrouillage proximal par vis nécessite un repérage radiologique. Le danger d’atteinte du nerf axillaire n’est pas que théorique [44]. L’enclouage centro-médullaire à foyer fermé nécessite une « logistique » importante ; il n’est possible que si la fracture est réductible à foyer fermé. L’alésage peut induire ou augmenter la comminution. La stabilité est excellente permettant une mobilisation immédiate ; il n’expose pas (ou peu) aux complications septique ou neurologique. Cependant, il ne faut pas négliger le risque iatrogène sur le nerf radial : manipulations laborieuses du foyer pour obtenir la réduction, fausses routes, augmentation de la comminution ou du déplacement de fragments intermédiaires. En cas de paralysie préopératoire, beaucoup contre-indiquent l’alésage, car la position précise du nerf radial ne peut être établie L’enclouage centromédullaire n’était pas accepté comme méthode thérapeutique chez l’adulte dans les fractures distales de l’humérus vu que le fragment distal est court, le canal médullaire est étroit à ce niveau et le risque de comminution lors de l’insertion du clou.
CONCLUSION
Les fractures distales de l’humérus sont généralement traitées par méthodes orthopédiques ou par plaque vissée.Le fragment distal est court, le canal médullaire est étroit, ce qui rend ces fractures inappropriées pour un traitement par enclouage centro médullaire.Le traitement par plaque vissée est accompagné d’un taux élevé de pseudarthrose, infection et paralysie radiale iatrogène. Les patients traités par méthodes orthopédiques peuvent avoir une douleur persistante et une limitation des mouvements du coude au cours du traitement.A vue de nos résultats, la nouvelle technique chirurgicale d’enclouage centro médullaire que nous avons décrite ; avec introduction du clou au niveau de la colonne latérale de l’humérus, permet une stabilisation du foyer de fracture avec de bons résultats fonctionnels, sans d’infection ni paralysie radiale post opératoire.
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Table des matières
INTRODUCTION
PATIENTS ET MÉTHODES
RÉSULTATS
I. Etude épidémiologique
1. Le sexe
2. L’âge
3. Répartition selon l’étiologie
4. Répartition selon la profession
5. Répartition selon le mécanisme
II. Etude diagnostique
1. L’interrogatoire
2. Etude clinique
3. Etude para clinique
III. Etude anatomopathologique
1. Répartition selon le côté atteint
2. Répartition selon le type de fractures
3. Lésions associées
IV. Traitement
1. Traitement d’accueil
2. Bilan préopératoire
3. Antibioprophylaxie
4. Le délai d’intervention
5. L’anesthésie
6.L’installation du malade
7. Voie d’abord
8. Alésage et introduction du clou
9. Verrouillage
10. Incidents peropératoires
11. Suites postopératoires
12. Durée d’hospitalisation
V. Complications postopératoires
1. Paralysie radiale
2. Infection
3. Pseudarthrose :
4. Raideur de l’épaule ou du coude
5. Douleurs résiduelles de l’épaule et algodystrophie
VI. Résultats thérapeutiques
1. Recul
2. Consolidation
3. Résultats fonctionnels
4. Résultats globaux
ICONOGRAPHIE
DISCUSSION
I. Rappel anatomique
1. Les trois faces de l’humérus
2. Les trois bords de l’humérus
3. Le tiers distal de la diaphyse humérale
4. Le canal médullaire
5. Vascularisation
6. L’insertion humérale de la coiffe des rotateurs
7. Rapports du nerf radial avec la diaphyse humérale
8. Les voies d’abord du tiers distal de la diaphyse humérale
II. Rappel sur la consolidation osseuse
1. Consolidation normale des fractures
2. causes de retard de consolidation osseuses
III. Données épidémiologiques
1. Age
2. Sexe
3. l’Etiologie :
4. Mécanisme :
IV. Données cliniques
1. Diagnostic
2. Bilan radiologique
V. Anatomopathologie et classification
1. le côté atteint
2. le siège
3. Le trait
4. Classification
VI. COMPLICATIONS PRIMAIRES
1. L’ouverture cutanée
2. Paralysie radiale
VII. Traitement
1. Buts
2. Les moyens thérapeutiques
VIII. Évolution et complications post opératoires
1. Le délai de consolidation
2. La Pseudarthrose
3. La Paralysie radiale iatrogène
4. L’infection postopératoire
5. la Raideur de l’épaule
6. la Raideur du coude
IX. Résultats thérapeutiques
1. Résultats anatomiques
2. Résultats fonctionnels
CONCLUSION
ANNEXES
RESUME
BIBLIOGRAPHIE
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