Comportement mecanique des sols granulaires

Les sols granulaires sont présents dans plusieurs types d’ouvrages dans le domaine du Génie Civil. Ils peuvent être d’origine naturelle, comme les sables et les graviers dans les aires fluviales, par exemple, ou bien artificielle, comme les ballasts ferroviaires et les enrochements des barrages, qui eux proviennent du broyage de la roche en carrière. L’étude du comportement mécanique de ces matériaux est donc fondamentale afin de développer et d’appliquer les méthodes de conception d’ouvrages géotechniques couramment utilisées à ce jour, comme les calculs des fondations des bâtiments, la stabilité des pentes et la construction des remblais. D’autres domaines peuvent aussi être concernés par la mécanique des matériaux granulaires, tels que la fabrication de matériaux de construction comme le béton, les technologies des poudres dans les industries pharmaceutique ou agro-alimentaire, ou encore le traitement des agrégats de roche dans les activités minières.

Ainsi, on sait que le comportement mécanique des matériaux granulaires sous confinement dépend du niveau de contrainte et engendre des changements de volume qui peuvent être dilatants sous cisaillement. Ce comportement est aussi une fonction des propriétés de l’arrangement granulaire et de sa teneur en liquide, ainsi que des caractéristiques mécaniques et géométriques des grains pris individuellement. En outre, sous certaines conditions, les forces de contact inter granulaires peuvent dépasser la résistance à l’écrasement des grains et provoquer la rupture d’une fraction des particules. En général, la rupture des grains, appelée aussi processus de comminution dans les activités du broyage, se produit dans des sols granulaires sous fortes contraintes, comme en pointe des pieux, sous des barrages de grande hauteur, ou bien quand les matériaux sont composés de grains à faible résistance. Ce phénomène implique que la taille des grains est réduite et que la granulométrie s’étale, ce qui génère un arrangement plus dense. Il a été largement démontré expérimentalement que, lors de la rupture des grains, la dilatance est diminuée, donc le matériau devient plus compressible et sa résistance au cisaillement au pic se réduit. De même, plusieurs modèles constitutifs ont été développés afin de prendre en compte ces effets.

Comportement mécanique des sols granulaires 

Pour tenir compte de la structure poreuse des sols, Terzaghi a postulé le principe des contraintes effectives, qui sépare les contraintes qui sont reprises par les grains solides dans le sol (qu’on désigne par l’exposant « ’ ») et celles qui sont subies par le fluide (nommées pression interstitielle u), généralement de l’eau. De cette façon, dans les sols saturés, la contrainte totale est la somme de ces deux composantes:

σ = σ ‘+ uI

où I est la matrice identité. L’intérêt du postulat de Terzaghi est que la résistance au cisaillement des sols est portée seulement par les contraintes effectives, puisque le fluide n’est pas capable de reprendre le cisaillement.

La résistance au cisaillement des sols dépend, non seulement du matériau, mais aussi du chemin des contraintes auquel le sol est soumis. Par exemple, l’angle de frottement mobilisé n’est pas le même si l’on compare un essai en déformation plane, un triaxial axisymétrique, un vrai triaxial (σ2≠σ3) ou si on prend en compte l’effet de la rotation des directions des contrainte principales (Roscoe, 1970 ; Arthur et al., 1980 ; Miura et al., 1986). Donc, il est important de fixer les conditions de l’essai afin de confronter des valeurs équivalentes.

Etat critique 

Depuis les premières études en mécanique des sols, il a été vérifié que le comportement des sols a un cadre commun, avec une condition ultime de résistance et volume constants en grandes déformations, condition nommée état critique ou plasticité parfaite. Cet état est unique pour un matériau donné et ne dépend donc pas de la densité initiale ni du chemin des contraintes suivi jusqu’à la rupture (Casagrande, 1936). L’état critique a été largement étudié afin d’établir des paramètres de caractérisation et de modélisation des sols (Castro, 1975; Been et Jefferies, 1985; Bolton, 1986; Biarez et Hicher, 1994; Verdugo et Ishihara, 1996).

Si on suppose qu’à grandes déformations, on peut considérer qu’on arrive toujours à l’état critique, pour une contrainte de confinement donnée, la réponse volumique peut être contractante pour les sols lâches et dilatante pour les sols denses. Il faut noter que les notions de « lâche » et « dense » sont relatives au niveau des contraintes. Ainsi, la contractance est la tendance à diminuer de volume en cours de chargement, ce qui s’accompagne d’une augmentation de la résistance de manière asymptotique jusqu’à l’état critique. Par contre, la dilatance est la tendance à augmenter de volume, ce qui entraine une augmentation de résistance jusqu’au pic, au dessus de l’état critique, pour finalement diminuer et atteindre un volume constant en cours de déformation à l’état critique.

Il s’agit de 2 échantillons de sable d’Hostun à différentes densités initiales, un échantillon à l’état dense (e0≈0,65) qui dilate et un autre lâche (e0≈0,75) qui se contracte. On constate que les deux cas ont le même p’ initial et arrivent aux mêmes points q-p’ et e-p’ à l’état critique, mais selon deux chemins différents, un dilatant et un autre contractant. Le même exercice pourrait se faire avec deux échantillons de même densité initiale, mais cette fois à différents confinements, de façon à avoir un comportement dilatant et un autre contractant. A grandes déformations, les deux arriveraient, non pas au même point e-p’, mais sur la même ligne d’état critique.

Le même cadre de comportement à l’état critique peut être obtenu à l’aide des essais de cisaillement non drainés (e=constant.) au cours desquels le volume est constant mais des variations de pression interstitielle sont générées. Le cas non drainé est marquant puisque les chemins dans les plans e-ε1 et e-p’ sont horizontaux et il suffit d’observer ce qui se passe dans le plan q-ε1. Lorsqu’un matériau dilatant est empêché de changer son volume, il y aura des pressions interstitielles négatives, donc une augmentation des contraintes effectives et de la résistance au cisaillement. En revanche, dans un sol contractant, le sol ne pourra plus diminuer son volume et le fluide monte en pression, avec une diminution des contraintes effectives et donc aussi de la résistance au cisaillement.

Par conséquent, si on teste des échantillons non drainés à la même densité initiale mais à différents confinements, indépendamment de la dilatance ou de la contractance, on devrait arriver toujours au même état critique. Ce type de comportement est observé sur la Figure 4a pour le sable de Toyoura (Verdugo et Ishihara, 1996). La Figure 4b montre des essais drainés sur le même matériau, cette fois au même confinement mais à différentes densités initiales, en arrivant toujours au même état critique en grandes déformations (ε1>20%). Finalement, la Figure 4c montre que tous ces chemins mènent au même état critique, qui peut être considéré comme unique pour chaque matériau.

Toutefois, l’état critique dans les sols denses est difficile d’obtenir expérimentalement, car on observe une localisation des grandes déformations (Biarez et Hicher, 1994). Ces déformations locales sont dues à la formation de discontinuités cinématiques. Par exemple, la Figure 5 montre les résultats d’essais triaxiaux drainés sur un sable dense (indice des vides de l’ordre de e=0,6). On observe qu’après d’essais à confinements de 0,04 à 0,4 MPa, la localisation apparait autour de ε1=10% et après l’indice des vides reste constant, donnant un faux état critique. Dans ces cas, une meilleure estimation de l’état critique peut être obtenue en traçant une ligne parallèle aux état de compression isotrope ou oedométrique sur le plan e-log(p’), passant par les points obtenus lors des essais à faible densité (Biarez et Hicher, 1994). Ainsi, même si un vrai état critique, selon sa définition stricte de changement de volume nul, se produit seulement dans des bandes de localisation (Hall et al., 2010), le concept persiste grâce à sa simplicité et puisqu’il donne des résultats satisfaisants en termes pratiques.

Rupture des grains

Effets de la rupture des grains sur le comportement mécanique 

Il existe de nombreuses situations dans lesquelles les sols granulaires sont soumis à de fortes contraintes, comme par exemple à l’extrémité des pieux ou dans les fondations des barrages de grande hauteur. Ces niveaux de contrainte peuvent engendrer la rupture des grains, même pour des particules relativement résistantes (Billam, 1971; Vesic et Clough, 1968; Marsal., 1967). Inversement, les sols formés par des grains de faible résistance peuvent présenter de la rupture des grains sous faibles contraintes, comme les matériaux calcaires (McDowell et Amon, 2000; Hu et al., 2011a), les sols de cendres volcaniques, ou des matériaux carbonatés (Coop et al., 2004; Biarez et Hicher, 1994). Ainsi, on peut affirmer que le taux de rupture des grains dépend du rapport entre la résistance des particules individuelles et les contraintes macro-mécaniques: si ce rapport est faible, la rupture des grains est augmentée.

La rupture des grains a un effet sur la relation contrainte-déformation des matériaux granulaires (Marsal., 1967; Marachi et al., 1969, 1972; Lê Long, 1968; Leps, 1970; Charles et Watts, 1980; Barton et Kjaernsli, 1981; Hardin, 1985; Kim , 1995; Lade et al., 1996; Biarez et Hicher, 1997; Frossard, 2009 ; Frossard et al., 2012), à savoir, une diminution de la dilatance (augmentation de la compressibilité) et une diminution de la résistance au cisaillement, les deux phénomènes étant liés. La rupture des particules est plus importante dans les matériaux de granulométrie plutôt uniforme, d’indice des vides élevé, sous fortes contraintes, avec une faible résistance des particules, une teneur en eau élevée et une angularité élevée (Marachi et al., 1969). Par ailleurs, la granulométrie est mesurée avant et après un chargement mécanique, mais aucune information n’est généralement disponible dans les états intermédiaires, à quelques exceptions près.

L’état critique peut être représenté par une ligne droite dans le plan e-log(p’) dans une gamme de contraintes restreinte. Pour les sols granulaires (Mitchell et Soga, 2005), la rupture des grains modifie la granulométrie et induit une diminution de la dilatance jusqu’à l’éliminer complètement. Les travaux de Lê Long (1968), Bard (1993) et Biarez et Hicher (1994) ont montré que ce phénomène peut être modélisé comme une translation vers le bas de la ligne d’état critique dans le plan e-log(p’). De cette façon, la position de l’état critique dans le plan e-log(p’) peut être empiriquement définie en fonction des paramètres de la granulométrie, comme le coefficient d’uniformité (Cu=d60/d10) . Il est donc important de connaitre l’évolution de la granulométrie, vue comme un paramètre d’écrouissage des sols fonction de la rupture des grains.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
1 REVUE DE LA LITTERATURE
1.1 COMPORTEMENT MECANIQUE DES SOLS GRANULAIRES
1.1.1 Résistance au cisaillement
1.1.2 Etat critique
1.1.3 Dilatance
1.2 RUPTURE DES GRAINS
1.2.1 Effets de la rupture des grains sur le comportement mécanique
1.2.2 Taux de rupture des grains
1.3 MECANIQUE DE LA RUPTURE FRAGILE
1.3.1 Modes de rupture
1.3.2 La théorie de Griffith
1.3.3 Fracture probabiliste des matériaux fragiles : la théorie de Weibull
1.4 FACTEURS INFLUENÇANT LA RUPTURE DES GRAINS
1.4.1 Propriétés intrinsèques du matériau
1.4.1.1 Effet de la minéralogie
1.4.1.2 Influence de la forme des grains
1.4.1.3 Effet de la granulométrie initiale
1.4.1.4 Effet de la taille des grains ou effet d’échelle
1.4.2 Propriétés d’état du matériau et conditions d’essai
1.4.2.1 Densité initiale
1.4.2.2 Influence de la teneur en eau
1.4.2.3 Effet du temps
1.4.2.4 Effet du chemin de contraintes
1.4.2.5 Effet de la déformation
1.5 REPRESENTATION DES COURBES GRANULOMETRIQUES
1.6 RUPTURE DES GRAINS DANS LES MODELES CONSTITUTIFS
1.6.1 Modèles de type Cam-Clay basés sur l’état critique
1.6.2 Approche thermomécanique
1.7 EFFETS D’ECHELLE DUS A LA RUPTURE DES GRAINS
1.7.1 Effets d’échelle dans les grains de sol et les agrégats de roche
1.7.2 Effets d’échelle dans les assemblages granulaires
1.7.2.1 Observations expérimentales
1.7.2.2 Méthode théorique de Frossard (2009)
1.7.3 Effets d’échelle dans les enrochements de barrages
1.8 COMMENTAIRES
2 ANALYSE DE LA THEORIE DE WEIBULL
2.1 SIMILARITE GEOMETRIQUE DANS LA THEORIE DE WEIBULL
2.2 LIMITATIONS DE LA THEORIE DE WEIBULL
2.3 APPLICATIONS DE LA THEORIE DE WEIBULL
2.3.1 Analyse des cas rapportés dans la littérature
2.3.2 Analyse statistique de Weibull sur des granulats de roche
2.3.2.1 Matériau : Calcaire de Préfontaines (CP)
2.3.2.2 Matériau : Schiste de la carrière des Trois Vallées (STV)
2.3.2.3 Analyse statistique des essais d’écrasement sur des agrégats de CP et STV
2.4 REMARQUES ET COMMENTAIRES
3 METHODE PROBABILISTE DE PREDICTION DE LA COMMINUTION CONFINEE
3.1 COMMINUTION PAR BROYAGE
3.2 COMMINUTION CONFINEE
3.2.1 Equation d’équilibre de masse
3.2.2 Fonction de rupture bij
3.2.3 Fonction de sélection Si en comminution confinée
3.2.3.1 Statistique de la résistance à l’écrasement des grains pris individuellement
3.2.3.2 Distribution des forces normales de contact
3.2.3.3 Probabilité combinée Si
3.3 SIMULATIONS EXPERIMENTALES
3.4 DISCUSSIONS DES RESULTATS
4 VALIDATION EXPERIMENTALE DE L’EFFET D’ECHELLE
4.1 INTRODUCTION
4.2 OBJECTIFS
4.3 METHODOLOGIE DU PROGRAMME EXPERIMENTAL
4.4 OUTILS EXPERIMENTAUX
4.4.1 Cellule triaxiale pour des échantillons de 1000 mm de diamètre
4.4.2 Cellule triaxiale pour des échantillons de 250 mm de diamètre
4.4.3 Cellule triaxiale pour des échantillons de 70 mm de diamètre
4.5 PARAMETRES MESURES ET INTERPRETATIONS COMPARATIVES DES RESULTATS
4.6 ENROCHEMENT TESTE
4.7 RESULTATS DES ESSAIS TRIAXIAUX
4.8 COMPARAISON AVEC D’AUTRES MATERIAUX GROSSIERS
4.9 VALIDATION DE LA METHODE PREDICTIVE DE FROSSARD (2009)
4.10 CONCLUSION
5 EFFETS DE L’EAU ET DU TEMPS SUR LECOMPORTEMENT DES MATERIAUX GRANULAIRES AVEC DES RUPTURES DES GRAINS
CONCLUSION GENERALE

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