La mobilité dans le sport
Dans la grande majorité des sports, les masseur-kinésithérapeutes (MK) portent une grande attention au gain de mobilité des sportifs. En effet, cette notion semble synonyme de performance mais également de prévention des pathologies. Que cela soit à l’échauffement, pendant une séance de récupération ou à l’écart de la pratique, les MK vont influer sur les différents facteurs qui altèrent la mobilité. Cette dernière est exprimée, selon les tests utilisés pour la quantifier, en degré ou en centimètre, mais par quoi est-elle limitée ? Tout d’abord une articulation est composée de deux os et d’éléments périphériques comme les ligaments, la capsule, le cartilage, la membrane synoviale, les muscles et leurs tendons etc… La limitation peut venir du contact os-os mais aussi de la tension maximale des tissus péri-articulaires vus précédemment.
Les étirements ont toujours été plébiscités par les sportifs de tout temps, et même si dernièrement la pratique semble être remise en question, de nouveaux outils apparaissent pour rechercher encore et toujours des gains en mobilité. Des nouvelles techniques manuelles, ou assistées de différents outils comme le crochetage, le Self Myofascial Release (SMR), l’utilisation d’un FatTool®, mobilisations spécifiques, se multiplient, et doivent faire leurs preuves sur leur efficacité respective. Mais, rechercher toujours plus de mobilité est-il pour autant justifié ? Plusieurs questions se posent, La mobilité rime-t-elle toujours avec performance ? Existe-t-il un équilibre entre mobilité et stabilité ? Sur quels critères se base une hypo-mobilité ou une hyper-laxité ?
En termes de performance, une articulation qui perd en mobilité pourrait limiter l’efficacité d’un geste sportif, pour des sports de précision ou d’adresse (tennis, Tir à l’arc etc.), ou des sports qui nécessitent des gestes de grande amplitude (Danse, gymnastique etc.). Mais également, dans des sports de force où la puissance musculaire ne pourra pas se traduire dans l’amplitude totale du mouvement. Enfin dans les sports d’endurance, ce manque de mobilité pose débat, il pourrait en effet favoriser une meilleure économie d’énergie dans la gestuelle des sportifs, tout comme, lorsqu’il est trop important, représenter un frein mécanique dans cette gestuelle et donc une dépense énergétique supplémentaire.
Des travaux [2]semblent indiquer un certain avantage des raideurs créées par les répétitions d’un mouvement sur la force musculaire lors de test isocinétique. En effet, les changements de mobilité seraient dus à une adaptation de l’organisme lié au stress mécanique dans les sports non symétriques comme le Baseball ou les volleyeurs. C’est pourquoi le thérapeute devra prendre en considération chaque sportif dans son contexte. C’est-à-dire, pour chaque patient, ajuster la prise en charge en fonction des caractéristiques de son sport et de ses contraintes physiques actuelles, mais aussi des objectifs recherchés à plus au moins long terme.
La place des étirements statiques dans la recherche de mobilité
Malgré certains avantages qu’un gain en mobilité pourrait apporter, le thérapeute devra prendre en compte également les inconvénients associés des techniques utilisées pour l’obtenir. En effet, par exemple, les étirements statiques passifs dans le domaine du sport seraient associés, à court terme, à plusieurs effets délétères pour la performance. Tout d’abord, cette technique serait associée à une diminution du tonus musculaire, qui deviendrai alors néfaste pour la performance sportive si utilisé avant l’effort, notamment sur des efforts courts et intenses [23]. Ils diminueraient en effet la puissance, la force et la vitesse musculaire. D’autres part, ils ont longtemps été utilisés dans l’optique de diminuer les courbatures après un effort violent, inhabituel ou riche en mouvements excentriques. Or, il est désormais montré [17] que les étirements placés immédiatement après une telle séance d’entrainement augmenteraient l’apparition des courbatures, par l’augmentation des contraintes sur les fibres musculaires déjà lésées.
Sur du long terme, les étirements statiques montrent des effets positifs au niveau de la mobilité, mais aussi au niveau de la restitution d’énergie élastique des muscles, avec une augmentation du moment de force maximal et de production de travail [8]. Les étirements statiques peuvent donc se révéler bénéfiques lorsqu’ils sont utilisés à bon escient, mais ils peuvent également se montrer délétères pour les muscles du sportif et dans la recherche de la meilleure performance possible.
On voit ainsi la nécessité de varier les techniques utilisées et d’élargir son éventail thérapeutique, surtout si les besoins de mobilité doivent s’effectuer à court terme, à proximité d’entrainement intensifs et riche en travail excentrique.
Pour gagner en mobilité, le thérapeute va agir sur différents tissus. Il faut d’abord voir si la limitation est purement articulaire (butée osseuse, arthrose, luxation, lésion méniscale, ligaments …). Mais, chez le sportif, c’est souvent sur l’ensemble tendon muscle que l’on va essayer de travailler. L’unité contractile du muscle, appelé sarcomère, n’est pas en soit la partie qui va nous intéresser de par ses qualités d’extensibilité. C’est sur la partie conjonctive de l’ensemble que nous agirons, car ils ne sont que très peu extensibles. En plus de leur faible extensibilité, l’effort pourrait engendrer des adhérences fasciales qui limiteraient d’autant plus la mobilité du sportif.
L’échauffement sportif, mécanismes d’action
L’échauffement avant un effort sportif est une habitude dûment ancrée dans la routine des sportifs, quel que soit le sport pratiqué. D’une part, pour réduire la prévalence des blessures, notamment musculaires, surtout dans les sports nécessitant des efforts brefs et intenses, et d’autre part, pour potentialiser la meilleure performance possible dès le départ de la compétition ou de la séance d’entrainement. Pour aborder les différents mécanismes d’action de l’échauffement, nous nous baserons sur les travaux de J. McGowan 2015 [20]. Il existe différentes réponses physiologiques à l’échauffement, qui vont permettre de favoriser les performances.
Effet thermique
Tout d’abord, il va permettre une élévation de la température facilitant le travail de l’organisme. Plus précisément, une augmentation de la température intramusculaire va avoir lieu. En chiffre, une augmentation de 1° permettrait d’améliorer de 2-5% la performance sportive, en fonction de l’effort demandé. Après une élévation rapide dans les premières minutes, la température va trouver un équilibre après environ 15 min d’échauffement à intensité modérée. Les mécanismes rentrant en jeu dans ce phénomène sont, premièrement, l’augmentation du métabolisme musculaire, avec une amélioration de l’utilisation du glycogène musculaire en tant que substrat énergétique, mais également un meilleur renouvèlement de l’adénosine triphosphate (ATP). Deuxièmement, l’augmentation de la température va permettre un fonctionnement plus performant des fibres musculaires de par la meilleure utilisation de la Créatine Phosphate (PCr) et de l’ATP. Mais, selon le type d’effort concerné et plus particulièrement la vélocité recherchée, cette amélioration de performance concernera seulement un type de Fibre (I ou II). Enfin, on observera une amélioration de la vitesse de conduction des fibres musculaires, ce qui va augmenter positivement le rapport force/vélocité, découlant vers une production de puissance supérieure, à partir d’une augmentation de seulement 3° de la température intramusculaire. Des hypothèses sur les mécanismes d’action qui entre en jeu sont la libération de calcium durant la dépolarisation de la membrane, l’augmentation de l’activité de la pompe Na+/K+ par l’hyperpolarisation de la membrane, le gonflement et l’activation plus rapide des fibres musculaires.
Effets Métaboliques
L ‘échauffement va par ailleurs engendrer des changements dans les métabolismes aérobie et anaérobie. Le métabolisme oxydatif est la principale source d’énergie du corps humain lors d’un effort physique, excepté pour les intensités les plus élevées. La cinétique de transport de l’oxygène jusqu’au muscle et donc sa consommation (VO2), et son efficacité, vont pouvoir être potentialiser par un échauffement bien dirigé.
En effet, après avoir permis une augmentation de la température grâce à un effort modéré, il est démontré qu’un effort court (inférieur à 9 minutes), à haute intensité, c’est-à-dire permettant l’apparition de lactate, permettrait de fortifier la cinétique VO2, sans pour autant provoquer une acidose métabolique dû à la déplétion des substrats anaérobie. Plusieurs mécanismes pourraient rentrer en jeu comme l’augmentation de l’activité d’enzyme oxydative, changement d’affinité de l’hémoglobine, acidose résiduelle, ou encore augmentation de l’apport en oxygène et de son extraction. Pour cette composante de l’échauffement, il faudra donc doser avec minutie les intensités recherchées pour ne pas qu’il n’en devienne néfaste.
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Table des matières
1. Introduction
1.1 La mobilité dans le sport
1.2 La place des étirements statiques dans la recherche de mobilité
1.3 L’échauffement sportif, mécanismes d’action
1.3.1 Effet thermique
1.3.2 Effets Métaboliques
1.3.3 Effet Neuronal
1.3.4 Effet psychologique
1.3.5 Les différents types d’échauffement
1.4 Hypothèse sur le fonctionnement du SMR sur le gain d’amplitude
1.5 La notion d‘autonomisation, avantages et limites
1.6 Le Foam Roller
1.7 Importance et objectifs de la revue
2. Méthodologie
2.1 Critère d’éligibilité des études pour cette revue
2.2 Méthodologie de recherche des études
2.3 Méthode d’analyse et d’extraction des données
2.3.1 Méthode de sélection des études
2.3.2 Évaluation de la qualité méthodologique des études sélectionnées
2.3.3 Extraction des données et synthèse des résultats
3. Résultats
3.1 Description des études
3.1.1 Processus de sélection des études
3.1.2 Synthèse des études incluses
3.2 Risque de biais des études incluses
3.3 Effet de l’intervention sur le critère de jugement
4. Discussion
4.1 Analyse des principaux résultats
4.1.1 Les études utilisant le ‘Sit and Reach Test’ (cm) et le ‘Weight Bearing Lunge test’
4.1.2 Les études quantifiant la mobilité par l’amplitude articulaire
4.2 Applicabilité fonctionnelle des résultats en pratique clinique et limitations des études
4.2.1 Le rapport bénéfice/risque
4.2.2 Le rapport bénéfice/coût
4.2.3 Limitations des études
4.3 Niveau de preuve
4.4 Biais potentiel de la revue
5. Conclusion
Bibliographie
Annexes
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