LA MALTRAlTANCE
Introduction
Cet essai se compose de trois sections : une introduction générale, un article scientifique et une conclusion générale. Dans la présente partie, l’introduction offre une définition de la maltraitance et décrit les différentes formes qu’elle peut prendre. Elle fait aussi un bilan des connaissances actuelles sur la maltraitance psychologique, la maltraitance financière et la maltraitance physique dont les personnes âgées peuvent être la cible. Par la suite, les facteurs de vulnérabilité des aînés à la maltraitance seront explorés, particulièrement dans les cas de maltraitance commise par leur enfant. Enfin, cette introduction se terminera par la présentation des objectifs de l’essai. Avec le vieillissement de la population, la santé des aînés devient un enjeu de société important. D ‘ après Statistique Canada (2010a), les adultes âgés de 65 ans et plus comptaient pour 13 % de la population en 2009 et compteront pour le quart de la population en 2031 . Depuis quelques années, les transformations démographiques ont amené le gouvernement à se préoccuper des enjeux liés au vieillissement, notamment le respect des droits des aînés (Gouvernement du Québec, 2010) . Le gouvernement du Québec a mis en place un plan d’action gouvernemental sur cinq ans pour contrer la maltraitance envers les aînés (Gouvernement du Québec, 2010). Ce plan gouvernemental vise la sensibilisation, la prévention, la détection et l’intervention sur la maltraitance. L’objectif est de briser le silence entourant cette problématique et de trouver des solutions pour la contrer. La littérature dans le domaine présente surtout des études descriptives et cliniques portant sur la prévention, les modes de détection et l’ intervention (Cooper, Selwood, & Livingston, 2008 ; Rabiner, O’Keeffe, & Brown, 2006; White, 2000) . Peu d’études empiriques s’ intéressent à la maltraitance faite aux personnes âgées comparativement à celles faites aux femmes plus jeunes ou aux enfants (Beaulieu & Leclerc, 2006) .
Maltraitance financière chez les aînés
La maltraitance financière est la deuxième forme de maltraitance vécue par les aînés après la négligence et ex requo avec la maltraitance psychologique (Beaulieu & Bergeron-Patenaude, 2012). Il s’agit principalement de vol de biens matériels et financiers . Cette forme de maltraitance est souvent associée à d’autres et s’inscrit habituellement dans une longue histoire de maltraitance, surtout lorsqu’elle est perpétrée par un membre de la famille (Jackson & Hafemeister, 2011). Les aînés vivant uniquement de la maltraitance financière ne voient pas la relation à la personne maltraitante comme étant de pauvre qualité (Jackson & Hafemeister, 2011). Toutefois, le réseau social de l’aîné est souvent limité, il y a donc peu de soutien social (Choi & Mayer, 2000). La maltraitance financière peut provoquer une perte d’indépendance et de sécurité chez l’ aîné maltraité, ainsi que de la honte et de la culpabilité, tout autant que le conduire à la dépression ou au suicide (Nerenberg, 2000) .
MaItraitance psychologique chez les aÎnés
Peu d’ études portent exclusivement sur la maltraitance psychologique, bien que celle-ci soit très fréquente (Beaulieu & Bergeron-Patenaude, 2012) . Elle semble difficile à définir et est influencée par des dimensions culturelles (Conrad et al. , 2011) . La maltraitance psychologique est difficilement observable par un tiers puisqu’ elle ne présente pas de marques visibles. Pour Nerenberg (2000), l’important est de regarder l’effet de la maltraitance sur l’individu. Les conséquences peuvent être très variées : inconfort, agitation, dépression ou désespoir et dans certains cas hospitalisation, suicide (Conrad et al, 2011 ; Lachs, Williams, O’Brien, Pillemer, & Charleson, 1998). Une étude, menée auprès de femmes de 50 à 79 ans, a mis en évidence que la maltraitance verbale a un impact majeur sur la santé mentale. Associée à la maltraitance physique, elle suscitait chez les aînées une perception négative du réseau social, plus de symptômes dépressifs et moins d’ optimisme que chez les aînées n’ en subissant pas (Mouton, Rodabough, Rovi, Br;z;yski, & Katerndahl, 2010) . La maltraitance psychologique est souvent une prémisse de la maltraitance physique (O ‘ Leary, 1999).
Maltraitance physique chez les aînés
La maltraitance physique est une forme de maltraitance peu observée chez les aînés, mais plus fréquente que la maltraitance sexuelle. Elle découlerait souvent d’une histoire familiale où existait la violence corporelle. La maltraitance physique par les enfants des aînés proviendrait du type de relation créé durant l’enfance. En effet, les enfants ayant été violentés durant leur enfance seront plus portés à utiliser la violence pour gérer leurs relations une fois devenus adultes et pourront en faire usage contre leur parent (Heide, 1995). Les tensions familiales et l’usage de la violence pour résoudre les conflits semblent jouer un rôle dans la maltraitance faite au parent par son enfant (Athens, 1992). Être veuf, cohabiter avec la personne maltraitante, et voir cette relation comme de pauvre qualité, semblent être des caractéristiques des personnes maltraitées physiquement (Jackson & Hafemeister, 2011).
Facteurs de risque et de vulnérabilité
Les facteurs de risque et de vulnérabilité sont parfois confondus dans les recherches (pillemer, Mueller-Johnson, Mock, Suitor, & Lachs, 2007) . Les facteurs de risque réfèrent aux stresseurs provenant de l’environnement dans lequel vit l’aîné et qui augmentent la probabilité qu’il subisse de la maltraitance. Ils incluent les caractéristiques propres à la personne maltraitante. Les facteurs de vulnérabilité correspondent aux caractéristiques personnelles des aînés (Beaulieu & Bergeron-Patenaude, 2012; Fulmer et al. , 2005). Les facteurs de vulnérabilité seraient moins prédictifs de la maltraitance que les facteurs de risque (Anetzberger, 2005; Baker, 2007). La majorité des recherches porte sur les facteurs de risque puisque les facteurs de vulnérabilité des aînés peuvent être confondus avec de nombreux symptômes gériatriques ou bien avec les conséquences de la maltraitance (Lachs & Pillemer, 2004). Selon les études, les pertes cognitives ou la démence, la perte d’autonomie fonctionnelle, le déclin de la santé physique, l’isolement social, les symptômes dépressifs, et le fait de vivre avec l’aidant sont considérés comme des facteurs de risque ou de vulnérabilité. Chaque type de maltraitance possèderait ses propres facteurs de risque et de vulnérabilité (Jackson & Hafemeister, 2011).
Facteurs de risque
Plusieurs facteurs de risque ont été mis en évidence dans les différentes études sur la maltraitance des aînés. La cohabitation est reconnue comme un facteur de risque. Vivre ensemble peut créer des tensions, raviver des conflits et ainsi entretenir un climat pouvant conduire à la maltraitance, surtout quand l’aîné souffre d’une démence et cohabite avec son proche aidant (Bonnie & Wallace, 2003 ; Paveza et al. , 1992; Pillemer & Finkelhor, 1988b; Reeves, Desmarais, Nicholls, & Douglas, 2007). La maltraitance financière fait toutefois exception. Pour ce type de maltraitance, vivre seul serait un facteur de risque et non la cohabitation. L’isolement de l’aîné permettrait à la personne maltraitante de disposer plus facilement de ses ressources matérielles et financières (Comijs, Smit, Pot, Bouter, & Jonker, 1998; Lachs & Pillemer, 2004) . La dépendance de la personne maltraitante à la personne maltraitée est aussi un facteur de risque, que la dépendance soit financière, matérielle ou psychologique (Anetzberger, 1987; Pillemer, 2004 ; Pillemer & Finkelhor, 1989; Wolf & Pillemer, 1989). Les problèmes de santé mentale ou de toxicomanie chez les personnes maltraitantes sont souvent identifiés comme facteurs de risque de maltraitance des aînés (pillemer & Finkelhor, 1989; Reis & Nahmiash, 1998). La dépression est souvent présente chez la personne maltraitante (Fulmer, 1991 ; Paveza et al. , 1992; Williamson & Shaffer, 2001) ainsi que l’ abus d’ alcool (Bristowe & Collins, 1989; Wolf & Pillemer, 1989) et de substances (Bradley, 1996).
Déroulement et participants
L ‘ enquête ESA-services, réalisée entre 2011 et 2013 , a permis d ‘ interroger plusieurs aînés vivant dans la communauté sur divers aspects de leur vie. Cette étude transversale a été effectuée en Montérégie (région située au sud de Montréal au Canada) .Les aînés ont été recrutés auprès d ‘un échantillon de médecins généralistes travaillant à temps plein sur ce territoire. Trois types de services médicaux ont été ciblés : les groupes de médecine familiale, les centres de services de santé communautaire et les cliniques médicales privées. Sur un ensemble de 744 médecins généralistes, 409 ont accepté de participer à l’étude. Cependant, seulement 245 médecins ont effectivement recruté des patients pour l’ étude, soit un taux de participation de 33 %. Les médecins ont recommandé en moyenne 7,3 patients et ont touché 400 $ CAD pour leur implication. Les aînés âgés de 65 ans et plus, ayant un rendez-vous avec leur médecin durant la période de l’étude, ont reçu, dans la salle d’attente, un document explicatif concernant les objectifs de l’étude, ainsi que ce qu’impliquerait leur éventuelle participation. Les volontaires remplissaient un coupon réponse avec leurs coordonnées, celui-ci était ensuite transmis par la secrétaire du médecin au coordonnateur de l’étude qui contactait les aînés dans un délai de 30 jours pour confirmer leur intérêt à collaborer et organiser une entrevue individuelle à leur domicile. Une compensation de 15 $ a été donnée à chaque répondant pour le dédommager du temps passé à répondre aux questions et pour assurer un nombre suffisant de participants . Ce projet a été approuvé par le comité d’éthique de la recherche de l’Hôpital Charles-LeMoyne. Les interviewers (N = 19) avaient suivi deux jours de formation sur l’administration par ordinateur du questionnaire ESA-services. Les entrevues, d’environ 90 minutes, débutaient par le consentement écrit du participant. Elles étaient conduites dans un lieu calme et isolé du domicile afin d’éviter les biais associés à la présence d’un tiers durant l’entrevue. Au total, 1800 patients ont été rencontrés pour une entrevue à domicile.
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Table des matières
Sommaire
Liste des tableaux
Remerciements
Introduction
Définitions et prévalence
Négligence chez les aînés
Maltraitance financière chez les aînés
Maltraitance psychologique chez les aînés
Maltraitance physique chez les aînés
Facteurs de risque et de vulnérabilité
Facteurs de risque
Facteurs de vulnérabilité
Objectifs de l’étude
Article scientifique
Résumé
Objectifs
Méthode
Déroulement et participants
Instruments de mesure
Résultats
Prévalence et caractéristiques démographiques
Mid’a a les chr’omques et probremes cogmtl. ‘f:s
Autonomie fonctionnelle
Dépression et anxiété
Tracas
Soutien social et violence vécue dans le passé
Facteurs de vulnérabilité associés à la maltraitance
Variables sociodémographiques
Modèle global
Discussion
Références
Conclusion
Références
Appendice. Questions utilisées pour évaluer la maltraitance
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