Etude microbiologique de Borrelia burgdorferi sensu lato
MORPHOLOGIE
Borrelia burgdorferi présente donc cette structure hélicoïdale caractéristique des Spirochetales, très mobile et mesurant entre 4 et 30 µm de longueur et 0,2 à 0,4 µm de diamètre (Figures 3 et 4) [30] [42] [60] [78] [86]. Les spires sont peu serrées (amplitude de 1,5 à 4,6 µm) et semblent orientées vers la gauche. On peut la colorer par l’aniline, la coloration de GIEMSA, la coloration de VAGO ou par imprégnation argentique. Elle est également visible sans coloration au microscope à contraste de phase ou à fond noir .
STRUCTURE
On trouve de l’extérieur vers l’intérieur :
La couche amorphe
Elle se compose d’hydrates de carbone et disparaît après un lavage au tampon PBS. Son origine (bactérienne ou exogène) est inconnue.
L’enveloppe externe
Sa structure est proche de celle des bactéries à GRAM négatif. Elle représente 16,5 % du poids sec du germe, dont 46 à 50 % de protéines, 33 à 51 % de lipides et 3 à 4 % d’hydrates de carbone. Des protéines majeures ayant un rôle antigénique et immunogène sont associées à l’enveloppe externe. On les appelle Osp (pour Outer Surface Protein), les principales étant OspA et OspB (Figure 5). D’autres présentent un intérêt également pour expliquer la pathogénie et pour le diagnostic (OspC, Osp17 par exemple).L’enveloppe externe, si elle est proche de celle des bactéries GRAM négatif, ne présente pas de lipopolysaccharide (LPS) à l’origine de chocs endotoxiniques. Par contre, une substance de type LPS-like semble à l’origine de réactions appelées réaction de JARISH-HERXHEIMER, se traduisant par une exacerbation des symptômes au cours du traitement antibiotique des spirochétoses.
Les flagelles
Ils constituent l’appareil locomoteur de la bactérie. Ils sont implantés à chaque extrémité du corps de la bactérie sur un corpuscule basal et cheminent le long de l’axe cellulaire entre le cylindre protoplasmique et l’enveloppe externe, si bien qu’ils se chevauchent au centre de la cellule. Ils sont au nombre de 14, 16 ou 22 flagelles selon les souches et l’origine géographique. Ces flagelles sont de nature polypeptidique et résultent de l’assemblage de flagelline (p41) ayant un rôle antigénique et immunogénique important. Ils réagissent avec l’anticorps monoclonal H604, et présentent de nombreuses réactions croisées avec d’autres antigènes ou des cellules neuronales humaines.
Le cylindre protoplasmique
Il est limité par une membrane plasmique, associée à un peptidoglycane sur sa face externe, lui conférant sa rigidité. Le cytoplasme contient l’appareil nucléaire et les plasmides. Il est dépourvu de microtubules.
Culture et métabolisme
cherche B.burgdorferi sensu lato dans la plupart des liquides pathologiques et des organes cibles (sang en début d’infection, biopsie cutanée, LCR ou liquide synovial) mais les résultats de culture sont souvent négatifs de par le faible taux de bactéries en circulation. Les prélèvements pour culture doivent être réalisés de façon stérile (PBS pH 7,6 pour la peau) et maintenu à 4°C pour être traités ultérieurement. Le sang peut être conservé à -80°C avec un cryoprotecteur [86].
Ce sont des bactéries micro-aérophiles, dépourvues de catalase et de peroxydase (mais présentant une super oxyde dismutase), dont la croissance est favorisée par l’ajout de glucose. L’énergie est fournie par fermentation par la voie d’EMDEN-MEYERHOFF d’où l’ajout d’acide pyruvique pour activer la glycolyse. On ajoute également dans les cultures de l’albumine (milieux à base de blanc d’œuf coagulé) et du sérum de lapin (par exemple milieu de Noguchi) pour apporter des acides gras à longue chaîne qui sont incorporés dans les lipides cellulaires ; les Borrelia, comme tous les Spirochètes, sont riches en lipides qui constituent ainsi un facteur de croissance essentiel. Egalement indispensable, la N-acétyl glucosamine intervient dans la composition du peptidoglycane (son absence ralentit la croissance de 90%).Ces voies métaboliques et ces besoins complexes expliquent la difficulté qu’ont rencontré les chercheurs à trouver un milieu de culture. En 1971, KELLY propose un milieu semi-synthétique qui fut amélioré successivement par STOENNER en 1982, puis par BARBOUR pour obtenir le milieu B.S.K. II, ou Barbour-Stoenner-Kelly modifié. Il permet la croissance à partir d’une seule bactérie, avec un temps de génération de l’ordre de 6 à 12 heures correspondant à 2.108 bactéries par mL en 5 à 7 jours .
On peut rendre le milieu plus sélectif en ajoutant des antibiotiques (rifampicine, 5-fluoro-uracile, phosphomycine, kanamycine, métronidazole, néomycine ou cotrimoxazole).Les cultures sont ensuite incubées à 30-33°C, observées et repiquées tous les 5-7 jours pendant 2 mois. L’observation se fait au microscope à fond noir, où l’on distingue la forme et la mobilité caractéristique des Borrelia. Des modifications se produisent au cours des cultures :
– perte de pouvoir pathogène ;
– modification de l’antigénicité des protéines OspA et OspB ;
– augmentation du poids moléculaire du complexe « LPS-like » ;
– perte de plasmides qui entraîne une diminution de la virulence ;Ces cultures, longues et délicates, sont en fait rarement utilisées car inutiles pour le diagnostic.
Génétique
C’est FRASER et al. qui, les premiers, ont séquencé et identifié le génome de Borrelia burgdorferi. Le décodage du génome est accessible sur le site de génétique moléculaire de l’Institut Pasteur .Les Borrelia présentent la particularité de posséder un chromosome linéaire se comportant comme un chromosome d’eucaryote, et mesurant environ 950 kb (Figure 6) [10] [46]. Les plasmides peuvent être circulaires ou également linéaires ; cette structure linéaire simple brin avec les extrémités repliées en épingle à cheveux est une exception parmi les procaryotes mais se retrouve chez certains virus, notamment les Poxvirus, ce qui laisse penser à une origine virale [60]. Les plasmides sont au nombre de 5 en moyenne, cette composition variant au cours des repiquages. Certaines souches en portent jusqu’à 21 (620 kb dont 9 plasmides linéaires et 12 circulaires), ce qui constitue le plus grand nombre de plasmides connus à ce jour pour une bactérie (CASJENS cité par [83]). Leur taille varie de 5 à 200 kb pour les plus grands. Les profils plasmidiques obtenus à partir de 13 souches [9] révèlent une grande hétérogénéité.
La perte du pouvoir pathogène au cours des cultures parallèlement à celle de plasmides suggère la présence de gènes de virulence sur ces plasmides chez B.b.s.l.
Les gènes codant pour de nombreuses protéines ont été identifiés : on en dénombre 853 sur le chromosome et encore 535 codés par les plasmides :
– OspA et OspB sont codés par deux gènes organisés en opéron (avec un promoteur commun) situés sur un plasmide linéaire de 49 à 56 kb selon les souches considérées. Cette particularité avait été utilisée pour classifier les Borrelia en groupes génomiques ;
– les gènes codant pour OspC et OspD sont situés sur des plasmides linéaires respectivement de 27 et 38 kb ;
– OspE et OspF sont codés par des gènes situés sur un plasmide de 45 kb ;
– le gène fla codant pour la flagelline est situé sur le chromosome bactérien ;
– les gènes ribosomaux ont une structure originale : il existe une seule copie du gène rrs codant pour l’ARN 16S mais deux copies des gènes rrl et rrf spécifiant l’ARN 23S et 5S respectivement. On peut identifier les souches en analysant le profil de restriction enzymatique du produit d’amplification de l’espace intergénique rrfrrl [86] ;
– des protéines de stress comme les HSP communes à de nombreux agents pathogènes bactériens sont des chaperonines impliquées dans les phénomènes de réparation cellulaire. Ce sont des assemblages de sous unités de 60 kDa codées par des gènes situés sur le chromosome bactérien. Ces protéines sont hautement immunogènes mais peu spécifiques.
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Table des matières
TABLE DES ILLUSTRATIONS
INTRODUCTION
HISTORIQUE
ETIOLOGIE : Etude microbiologique de Borrelia burgdorferi sensu lato
1. Taxonomie
1.1. Taxonomie du genre Borrelia
1.2. Le complexe Borrelia burgdorferi sensu lato
2. Morphologie
3. Structure
3.1 La couche amorphe
3.2 L’enveloppe externe
3.3 Les flagelles
3.4 Le cylindre protoplasmique
4. Culture et métabolisme
5. Génétique
EPIDEMIOLOGIE
1. Epidémiologie descriptive
1.1 Importance
1.2 Espèces affectées
1.3 Répartition géographique
1.4 Répartition temporelle
1.4.1. Incidence annuelle
1.4.2. Variations saisonnières
2. Epidémiologie analytique
2.1 Les modes de transmission
2.1.1. Transmission par les tiques dures
2.1.2. Transmission par les insectes
2.1.3. Transmission directe
2.2 Biologie du principal vecteur en Europe de l’ouest : Ixodes ricinus
2.2.1. Habitat
2.2.2. Cycles de développement
2.2.3. Saisonnalité
2.2.4. Hôtes potentiels
2.2.5. Compétence de vecteur
2.3 Les réservoirs
2.4 Cycles enzootiques fermés
2.5 Les facteurs de risque
ETUDE CLINIQUE
1. Les signes cliniques chez l’Homme
1.1. Les manifestations cutanées
1.2. Les signes généraux
1.3. Les signes neurologiques
1.4. Les complications articulaires
1.5. Les complications cardiaques
1.6. Autres signes
2. Les signes cliniques chez les bovins
2.1. Premières observations
2.2. Symptômes généraux
2.3. Signes articulaires
2.4. Autres signes
3. Pathogénie
3.1. Pouvoir pathogène expérimental
3.2. Pouvoir pathogène naturel
3.2.1. La colonisation du vecteur
3.2.2. Le passage du vecteur à l’hôte
3.2.3. Colonisation de l’hôte
3.2.4. Echappement à la réponse immunitaire
3.2.5. Mécanismes auto-immuns
3.2.6. Pouvoir toxique
4. Diagnostic
4.1. Diagnostic de laboratoire
4.1.1. Méthodes non mirobiologiques
4.1.2. Isolement – mise en évidence directe
4.1.3. Sérologie
4.1.4. Limites
4.2. Diagnostic différentiel
4.3. Guide diagnostique
4.4. Diagnostic chez les bovins
5. Traitement
5.1. Chez l’Homme
5.2. Chez les bovins
6. Prévention
6.1. Mesures indirectes
6.2. Mesures directes
ETUDE EXPERIMENTALE
1. Matériel et méthodes
1.1. Origine des sérums
1.2. La technique d’immunofluorescence indirecte
2. Résultats
2.1. Résultats globaux – prévalence sérologique
2.2. Résultats en fonction de l’origine géographique
3. Discussion
3.1. Discussion méthodologique
3.2. Discussion des résultats
3.3. Limites – proposition d’études à venir
CONCLUSION
ANNEXES
TABLE DES ABREVIATIONS
BIBLIOGRAPHIE
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