L’écriture et les élèves à besoins éducatifs particuliers

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Comment les élèves rédigent-ils un écrit ?

Josette Jolibert et Christine Sraïki dans Des enfants lecteurs et producteurs de textes4 utilisent l’expression : « chantier d’écriture » émarched d’apprentissage-production de textes. Les auteures précisent que les chantiers nedoivent pas être régis par l’enseignement des manuels ni devenir des ateliers d’écriture. Pour mieux comprendre les propos des auteures, il nous faut éclaircir la différence entre l’atelier d’écriture et le chantier d’écriture.
Les ateliers d’écriture auxquels font allusion lesauteures sont guidés par un « animateur » : l’enseignant, par exemple, qui donne les situations et les consignes. Ces ateliers sont ponctuels et souvent à long terme. L’enseignant peut avoir un statut analogue aux élèves en écrivant en même temps qu’eux. La rédaction d’un texte dans cecontexte est un moyen au service de l’expression de l’élève, de sa relation avec ses camarades. L’atelier d’écriture est souvent utilisé au cycle III pour aborder la création de textes courts de façon ludique. Il sera mentionné et développé dans la seconde partie du mémoire lors del’étude de l’écriture avec les enfants à besoins éducatifs particuliers.
Le chantier d’écriture, tel qu’il est mentionné parles auteures, correspond à une démarche particulière, les élèves doivent pouvoir résoudreesl problèmes qui se posent au cours de leur mise en texte. Ils sont ainsi invités à prendre conscience et s’approprier les processus, les stratégies et les outils qu’ils mettent en place. L’objectif est de donner une autonomie aux élèves dans cette situation de mise en texte. Le chantier d’écriture a pour caractéristiques de conserver flexibilité et adaptation aux différentessituations et contextes. L’autre critère important est le choix délibéré de demander aux élèves d’écrire individuellement pendant toute la durée des chantiers. Écrire et réécrire sont ici perçus comme des démarches personnelles et permettent « de conduire et d’évaluer un cheminement presque toujours singulier ». Cependant, les phases de confrontations, discussions, débats, suggestions sont collectifs.
Lors de l’entrée dans ces séances de rédaction dextes, il est intéressant en tant qu’enseignant, de guider l’élève. Cependant, lors de travaux en groupe il est nécessaire qu’il soit critiqué et aidé par ses camarades dans les procédés et outilsqu’il va utiliser. Une large part de « libre cours » doit être laissée à l’élève si l’enseignanet veut pas se retrouver avec des textes uniformes, tous identiques. D’ailleurs, l’imagination doit avoir toute sa place dans ce type d’exercice. Un cadre dans la forme des textes produits doit être donné mais le fond doit rester personnel et permettre ainsi à l’élève de s’autoévaluer.
Les caractéristiques du texte sont subordonnées à des règles mises en place par l’enseignant et dont l’élève doit se servir dans un premier jet. Ilest, par exemple, demandé aux élèves de rédiger un texte avec « je » ou sans « je », en utilisant un temps précis pour les verbes (imparfait, passé simple ou future), un registre delangue, un vocabulaire spécifique.
La classe de CM1 où j’ai été accueillie en stage depratique accompagnée, au cours de ma formation en Master 1, a étudié le romanRenard de Morlange de Alain Surget5. Dans le cadre de plusieurs séances de rédaction de textes chaquesemaine, l’enseignant a remis aux élèves, lors de la première séance, un poème de Georges Pérec « Déménager » extraitd’ Espèces d’espaces6 (voir Annexe I), il leur a demandé de relever les verbes et les sentiments présents dans ce poème et d’en donner des synonymes pour écri e un poème identique mais à leur manière. Lors de la séance suivante, l’enseignant ademandé aux élèves de rédiger, individuellement, un texte à la manière du poème Déménager de Georges Pérec (voir quelques productions d’élèves en Annexe II). Le poème de G. Pérec a pour particularité d’être composé de verbes à l’infinitif. Cette contrainte est intéressante et va étoffer les compétences des « élèves écrivains ». L’organisation de la phrase n’est plus la même lorsque l’on doit utiliser des verbes à l’infinitif : dans le poème de G. Pérec, l’absence de sujet, d’une part, et de compléments, d’autre part, donnent une toute autrestructure au texte composé sans retirer le sens du texte rédigé ainsi. Cette rédaction a étécriteé dans le cahier « des arts » de chaque élève car cette activité était en lien avec la créativité poétique des élèves. Quelques jours plus tard, l’enseignant proposait aux élèves une nouvell forme de rédaction à l’aide de leur texte créé à la manière de G. Pérec. Cette fois, les élèves devaient raconter la vie d’un personnage du Renard de Morlange en s’inspirant des poèmes de leur cahier des arts .
La consigne au tableau a été donnée ainsi :
1 raconter la vie d’un personnage (s’identifier au sanglier, au paysan ou au chevalier) ;
1 débuter l’histoire en utilisant : « ce matin, commetous les jours, hier, comme c’était, un jour d’été, aujourd’hui » ;
1 l’action se déroule sur une journée ;
1 utiliser « je »
1 les verbes du texte doivent être conjugués à l’imparfait ou au passé simple.
Une fois ce premier jet élaboré, les élèves ont confronté leur texte par deux et cherché comment améliorer leur rédaction et quels outils pouvaient être utilisés. Ensuite, ils ont révisé et relu leur texte comme une sorte de « contrôle de conformité ». Cette systématisation en lien avec l’activité chantier d’écriture a pour objectifde donner son « autonomie intellectuelle à l’élève». La systématisation des procédés utiliséslors de chantiers d’écriture permet à l’élève aguerri de produire des textes où son imagination peut s’exprimer tout en respectant le cadre donné par l’enseignant. Quelques exemples de ce chantier d’écriture figure en Annexe III, les contraintes présentes dans la consigne ont, semble-t-il, permis aux élèves de donner une forme et un rythme à leur composition. Parmi les exemples pris, l’un d’eux montre qu’un élève qui n’a pas respecté la consigne d’introduire sa rédaction à l’aide des locutions « ce matin, comme tous les jours, hier, comme c’était, un jour d’été,aujourd’hui » obtient un résultat qui, à la lecture, est moins « fluide ». L’utilisation de l’imparfait ou du passé simple convenaient tout à fait à ce type de texte et rappelait la structure gr ammaticale rencontrée lors de la lecture du roman le Renard de Morlange. La progression entre le poème créé en utilisant lemodèle de G. Pérec, puis la rédaction d’un écrit à partir de cemodèle et du roman étudié en classe a permis aux élèves de composer un texte à l’aide des contraintes contenues à la fois dans le poème de G. Pérec et dans le roman le Renard de Morlange. Ces contraintes avaient été préalablement rencontrées, élucidées ce qui a permis la compréhension et l’aptitude à rédiger un texte personnel. Le cadre de ce chantier d’écriture montre la capacité des élèves à rédiger un écrit grâce aux procédés mis en place et aussi à valoriser leur rédaction.
L’élève est livré à l’activité de rédaction de textes de manière libre connaissant les contraintes et les ouvertures qui lui incombent. En a-t-il réelement conscience au cycle III ? Francis Ruellan dans un article paru dans la Revue de recherche en éducation Spirale en 19997, émet l’idée que la mise en situation : la rédaction d’untexte, fait naître chez l’élève un apprentissage dont il n’a pas conscience (action implicite) mais le fait de confronter par deux ou plus le premier jet met en lumière les questions que l’élèvese pose, le cheminement qui le guide vers la manière et les outils qu’il va mettre en œuvre p our réécrire son texte.
La prise de conscience implicite est ici guidée parla confrontation, la critique, la suggestion. Cependant est-il possible d’envisager que l’enseignant s’engage dans une démarche en classe où il mettrait en évidence le cheminement qu’il attend des élèves à travers les consignes qu’il donne ? F. Ruellan (1999) précise que l’accompagnement de l’enseignant donne du sens, des objectifs et guide l’élève vers des critères qui vont faire émerger des solutions. Ce guidage de l’enseignant permet à l’élève de construire des savoirs et des savoir-faire.
B) Quels procédés peuvent-ils être mis en œuvre ?
J. Jolibert et C. Sraïki (2006) proposent plusieurs options pédagogiques :
1). Alterner l’écriture et la réflexion (évaluation desapprentissages « procéduraux et linguistiques en cours »)
2). Activité individuelle ou par groupes
3). Organisation sous forme d’emboîtement entre « la gestion de la production, la planification, mise en texte et révision » ainsi les activités mentales, linguistiques sont étudiées.
La lecture-recherche : trouver comment fonctionne chaque type de texte 1 règle du jeu, lettre
de demande, poème…
Comment fonctionnent ces textes, quel découpage adoptent-ils ? Quels introduction, déroulement, conclusion les habillent ? Quelle silhouette prend tel ou tel texte ?
Comment ces textes mettent « en évidence le sujet, la relation avec le destinataire, quels pronoms, temps des verbes, registre de langue sont utilisés » ?
Plus précisément quels liens existent-ils entre lesparagraphes, les phrases et les mots ?
Ces mécanismes peuvent ainsi devenir systématiqueschez les élèves et les aider dans tous les types de production auxquels ils peuvent être confrontés.
Ce procédé montre une nouvelle fois qu’un cadre dedépart laisse plus de liberté à l’élève dans le but de servir les futures rédactions de celui-ci.
De son côté, Yves Reuter dans son ouvrage Enseigner et apprendre à écrire (2000)8 précise qu’il existe plusieurs styles de conduites rédactionnelles :
– le « pas à pas » : 1 ère phase, 2è phase… ;
– le « griffonnement d’idées » : jeter sur la feuille les idées et les reprendre ensuite pour rédiger ;
– la collecte d’informations avant la rédaction du texte ;
– les esquisses successives : plan, rédaction (au brouillon) et relecture.
Ces « conduites rédactionnelles » sont emboîtables avec les procédés conseillés par J. Jolibert et C. Sraïki (2006). Ce sont les processus « de base » de toute rédaction/production d’écrit. Elles ont une valeur incontournable dans la réalisation d’un écrit.
Les élèves amenés à construire des outils par leurssavoirs et leurs observations, tels que les suggèrent le Groupe EVA dans Évaluer les écrits à l’école primaire9, acquièrent l’autonomie face aux actions de structurer, faire évoluer leurssavoir-faire lors de la fabrication d’outils. Par exemple, dans une classe de CE2 (exemple cité dans l’ouvrage du Groupe EVA), les élèves se posent des questions au sujet de la construction et de la composition des textes narratifs et documentaires : quelle présentation ? Qu’est-ce quiles caractérise ? Quels enseignements émergent de ces textes ? Les savoirs des élèves sont alors provisoires mais évolutifs. Les notions de départ qui ressortent des questionnement vont cheminer vers des savoirs que les élèves n’avaient pas en leur possession auparavantEnsuite,. en s’appuyant sur les outils qu’ils ont fabriqués, les élèves vont se lancer dans un premier jet de rédaction d’un texte. L’action d’écrire est alors guidée par des outils que les élèves se sont appropriés et qui leur paraissent évidents et ils laissent ressortir de leur imaginaire des idées pour construire librement leur texte.

Quels outils sont-ils mis à la disposition des élèves ?

Pour Y. Reuter (2000) : la construction d’outils en elle-même apporte plus à l’élève que son utilisation. En effet, il semblerait qu’une fois intégrés ces outils enregistrés par les élèves deviennent des automatismes qu’ils font évoluer enfonction des supports.
Cette approche des outils est intéressante et semble correspondre à ce qui se passe en classe, les outils mis en place servent à un moment bien pr écis dans telle ou telle classe et évolueront en fonction des types de textes, des disciplines, du niveau de cycle, de classe. P. Cappeau et M-N. Roubaud 10 dans leur ouvrage montrent comment les élèves construisent un texte : découpage du texte, personnages, accords, verbes, orthographe et grammaire. Les auteurs analysent chaque difficulté rencontrée, les clés données et proposent des exemples de textes produits par les élèves ciblant ainsi les problèmesqui se posent et comment l’enseignant peut y remédier. Lors de mon stage de pratique accompagnée en classe de CM1, lorsque j’ai interrogé certains élèves sur les outils utilisés urpo rédiger leur texte, j’ai pu constater que la quasi-totalité des élèves m’avait répondu qu’ilserchaient à « imiter » les procédés employés sur le modèle qu’ils avaient lu.
Un quatrain lu dans unes des œuvres de Roald Dahl : Matilda 11 (voir Annexe IV), est retranscrit par l’enseignant au tableau, il demande ensuite à ses élèves de trouver ce qu’est un quatrain et comment il est composé. Certains élèvesmentionnent les quatre vers, d’autres les rimes entre les vers, certains font remarquer que les vers ont le même nombre de syllabes. Cette analyse rapide et collective terminée, l’enseignant demande aux élèves de composer à leur tour un quatrain sans leur donner plus de précisions…
Quelques exemples de quatrains rédigés par les élèves de CM1 sont fournis en Annexe V, les quatre vers sont présents sur chaque feuille cependant les rimes sont organisées différemment en fonction des élèves et certains n’ont pas écritle même nombre de syllabes par quatrain. L’enseignant a marqué un temps au cours de cette rédaction afin de valider avec les élèves la nécessité du nombre de syllabes identiques par verset le fonctionnement des rimes (pas d’utilisation du vocabulaire de poésie précis à ceniveau-là, mais un schéma pour montrer que les rimes peuvent être croisées ou embrassées).
Cette observation faite en classe montre que les outils, ici, la segmentation des phrases, a permis aux élèves de composer leur quatrain. Dans esl exemples de quatrains qu’ont rédigés les élèves, l’imaginaire a toute sa place et la forme (ici outil de rédaction) a permis cette composition. Lors de la mise en commun, certains élèves ont lu leur composition poétique, il était évident que les élèves étaient fiers et ressentaient un certain plaisir d’avoir pris cette posture et attitude de poète ! Les concepts défendus par J. Jolibert et C.Sraïki (2006) prennent toute leur mesure à travers l’exemple que je viens de relater. En effet, les élèves de CM1 ont pris ici une posture d’élèves en action. En s’appuyant sur leurs savoirs et compétences, de manière individuelle et autonome ils ont composé les quatrains. Cette action autonome à la lueur de leurs savoirs et savoir-faire est chargée de sens pour eux et le plaisir dégagé était flagrant.

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Table des matières

Introduction
Première partie : La mise en texte en classe, au cycle III
I. La rédaction du texte
A) Comment les élèves rédigent-ils un écrit ?
B) Quels procédés peuvent-ils être mis en oeuvre ?
C) Quels outils sont-ils mis à la disposition des élèves ?
II. La corrélation entre le texte, l’orthographe, la grammaire et le lexique
III. Le type de texte/production
Conclusion provisoire
Deuxième partie : L’écriture et les élèves à besoins éducatifs particuliers
I. Les principes
A) Les origines des ateliers d’écriture
B) Les différents courants
II. Objectifs des ateliers d’écriture en lien avec les élèves à besoins éducatifs particuliers
III. L’atelier d’écriture thérapeutique
Bibliographie principale
Bibliographie secondaire
Annexes

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