Approche théorique des MOOC

La chercheuse a entamé son travail de recherche par la revue de la littérature sur les MOOC, afin d’identifier le vide existant dans l’état de la connaissance actuelle sur le sujet, et ainsi donner une première direction. C’est en effectuant la lecture de documents d’ordre scientifique, en les comparant, en les « faisant dialoguer », que les questions traitées et celles qui restent à traiter sont explicitées ainsi que les éléments problématisant de l’approche (Olivier & al., 2005, Beaud, 2003, Lamoureux, 2006).

Démarche d’analyse de la littérature sur les MOOC

La revue de la littérature a été conduite en suivant le principe selon lequel elle acquiert une valeur de systématicité lorsque les méthodes d’identification des publications examinées sont décrites et justifiées, et qu’une approche qui peut être répliquée est construite (Fink, 2010, cité par Liyanagunawardena & al., 2013). Elle a aussi été effectuée afin de mieux saisir les caractéristiques associées aux MOOC, à la recherche de précisions quant aux cadres mobilisés pour les étudier et aux méthodes d’analyse et étude employées (Kennedy, 2014). Il s’est avéré nécessaire de poser un cadre de la recherche existante en termes de méthodes et sujets compte tenu du développement des MOOC au niveau planétaire. L’augmentation des inscriptions a inspiré des échanges dans le domaine de l’éducation et notamment sur l’utilisation des nouvelles technologies en formation (Zhu & al., 2018) : il a été en effet observé une hétérogénéité grandissante en termes de sujets de recherche liés aux MOOC (Liyanagunawardena & al., 2013, Veletsianos & Shepherdson, 2015, Zhu & al., 2018, Bozkurt & al., 2016), mais en même temps une certaine limitation des résultats disponibles (Jona & Naidu, cités par Zhu & al., 2018).

Le travail entamé par une étude exploratoire en amont des laboratoires de recherche en formation des adultes avec les nouvelles technologies a été effectué, l’objectif étant de structurer la littérature existante au sujet des MOOC de 2008 (date de création du terme avec la publication de l’article de Downes sur le connectivisme) et 2020. Il a tout d’abord permis d’identifier des laboratoires basés en Europe, et d’autres en Amérique du Nord :

– TEKRI, Atabasca University, Canada : laboratoire dirigé par Georges Siemens (jusqu’en 2013) et David Cormier, menant des recherches sur sept champs de recherche : open education, social computing, mobile and ubiquous computing, semantic technolgoies, adaptivity and personalization, design based research, learning analytics & knowledge ;
– GTA, Groupe des technologies de l’apprentissage, Université de Moncton, Canada : laboratoire dirigé par Stephen Downes, il « décline la pédagogie au rythme des technologies pour créer des contenus d’apprentissage multimédia novateurs » ;
– Ensemble MediaX, Stanford University, États-Unis : l’université américaine a été pionnière dans le domaine des MOOC, notamment grâce aux travaux de Daphne Koller et Andrew Ng, qui ont lancé la première plateforme MOOC rattachée à une université : la plateforme Coursera, en 2012. Ceci a contribué à l’évolution de l’innovation digitale en formation des adultes. Harvard et MIT ont suivi en lançant la plateforme EdX. Parmi les laboratoires réunis au sein de MediaX : Graduate School of Education, Lytics Lab, Open Learning Initiative at Stanford, PERTS, Stanford Data Sciences, Virtual Human Interaction Lab ;
– Le MIT Open Learning, Centre de recherche du Massachusetts Institute of Technology, qui regroupe plusieurs groupes de travail parmi lesquels les Center for Advanced Virtuality et le MIT OpenCourseWare (OCW) ;
– L’équipe Trigone du laboratoire CIREL, Université de Lille, qui comprend le pôle ADAN, dirigé par Anne Jézégou, dont les recherches portent sur les dynamiques psychologiques et sociales entre les apprenants adultes et les dispositifs numériques ;
– Laboratoire CREF, Université de Nanterre, et notamment l’équipe « Apprenance et formation des adultes », qui s’intéresse particulièrement aux environnements dits « innovants » selon la perspective de l’ingénierie (conduite de projet), des technologies et des conceptions pédagogiques.
– Le IET – institute of educational technologies de la Open Univeristy, UK, université créée par le Gouvernement britannique afin de favoriser la formation à distance. Le IET mène des recherches sur l’apprentissage digital, les Learning Analytics et le futur de l’apprentissage à distance, et publie tous les ans le rapport « Innovating Pedagogy report » ;
– Le UCL Knowledge Lab de la University College London : laboratoire interdisciplinaire de recherche sur le thème du digital et de la construction de dispositifs pédagogiques ;
– Le Laboratoire TECFA, qui approfondit la question de la formation à distance et de la notion d’hybridation entre formats présentiels et distanciels en entreprise. TECFA est une unité de recherche et d’enseignement dans le domaine des technologies éducatives, faisant partie de la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’Éducation – Université de Genève.

L’étude de la littérature produite par la communauté de chercheurs au niveau international au sein de ces laboratoires, sélectionnée selon les modalités précisées dans les chapitres qui suivent, a confirmé l’existence d’une diversité d’approches théoriques à l’apprentissage et plusieurs postures épistémologiques par publication scientifique, selon entre autres son lieu de publication et le laboratoire d’attachement. Chacun de ces laboratoires répond en effet à des préférences en termes de sujets de recherche et à des postures épistémologiques différentes. Parmi ceux-ci, le laboratoire TECFA a été retenu pour une question d’affinité à la fois en termes de sujets de recherche menés, tous intimement liés à la question des technologies éducatives, avec une approche d’analyse de l’impact: « l’étude scientifique des usages des technologies numériques et leur impact sur les processus d’enseignement et d’apprentissage » , que de posture épistémologique, de nature interprétativiste. Dans le cadre de cette recherche, on se positionne en effet dans une approche socio-constructiviste de l’apprentissage et on adopte une posture épistémologique de nature interprétativiste. Le choix a donc été effectué d’entamer l’analyse de la littérature par une publication écrite au sein du TECFA : « Ortoleva, G., Peltier, C., & Betrancourt, M. (2017). MOOC : un mot, plusieurs facettes. Pour une caractérisation systématique des MOOC orientée ingénierie pédagogique. Revue des sciences et techniques de l’information et de la communication pour l’éducation et la formation, 24(2)». Le choix de la chercheuse a donc été d’entamer l’analyse de la littérature en prenant comme point d’ancrage initial l’étude de cet article de recherche, publié par des chercheurs de ce Laboratoire TECFA dans une revue classée HCERES en Sciences de l’Éducation, la STICEF, et ceci, pour deux raisons : cette publication a été rédigée en tenant compte du corps de littérature publié jusqu’en 2017 tant dans les pays anglophones que francophones et répond explicitement à la question de départ, qui est celle de savoir selon quels critères caractériser les MOOC.

Approche théorique des MOOC

On entend par MOOC des cours en ligne gratuits, qui ne font pas appel à un public spécifique cible (Daniel & Uvalić-Trumbić, 2010, cités par Dejoux et Charrière-Grillon, 2016). Le terme MOOC a été créé par Dave Comrier et Bryan Alexander en 2008. La même année Stephen Downes et George Siemens ont présenté ce terme dans leur cours précurseur «Connectivism and Connective Knowledge » considéré par la littérature comme le premier MOOC de l’Histoire. L’université de Stanford a également été dans cette mouvance avec le MOOC de Sebastian Thrun et Peter Norvig « Artificial intelligence » de 2011 (Dosson & al., 2015). Le cours attire 160.000 étudiants alors que seulement 10.000 étaient attendus. Suite à ce succès, Sebastian Thrun abandonne son poste de professeur à Stanford et fonde Udacity en février 2012. Le premier MOOC à emboîter le pas à Udacity est Coursera, en avril 2012, fondé par Andrew Ng et Daphne Koller. Contrairement à d’autres universités prestigieuses comme Duke ou Princeton, le MIT ne rejoint pas Coursera. A partir de l’un de ses projets de partage de cours en ligne, le MITx, qui fonctionne dès décembre 2011, l’établissement s’associe avec Harvard pour former en avril 2012 la plate-forme edX. A ce jour, les principaux acteurs sont encore des plateformes basées aux États-Unis, tels qu’EdX, Coursera, Udacity (Dejoux et CharrièreGrillon, 2016).

L’expansion des MOOC a été exponentielle dans le monde depuis 2011. Concernant la France, en septembre 2012, le premier MOOC francophone est un MOOC « Internet, tout y est Pour Apprendre » (ITyPA) de Télécom Bretagne et Centrale Nantes. Recrutant à partir de début janvier 2013, le MOOC « ABC de la gestion de projet » de l’École Centrale de Lille est le premier MOOC en France. Les acteurs principaux en France sont à ce jour l’Agence universitaire de la francophonie, Neodemia, franceTV education, Sillages.info, Solerni, EDUlib, Openclassroom et surtout FUN (Dejoux et Charrière-Grillon). Les MOOCs ont tellement disrupté le monde de l’éducation en tant que dispositif d’apprentissage, que les entreprises se les sont appropriés pour développer leurs propres COOCs, de façon complètement autonome ou en co-branding, voire en co-construction, avec d’autres organisations, sur des sujets d’importance stratégique pour leurs employés (Dejoux et Charrière-Grillon, 2016). Lorsque se pose l’interrogation sur le traitement des MOOC dans l’analyse de la littérature par rapport à d’autres types d’innovations pédagogiques, la notion qui se pose d’emblée est celle, plus générique, d’OER – open educational ressources. Parmi les catégories d’analyse identifiées pour effectuer l’analyse de la littérature, celle-ci est aussi la plus traitée. La relation entre MOOC et OER est en effet fondamentale car le concept de MOOC trouve ses racines justement dans le mouvement OER (Egloffstein, 2018). En effet les innovations pédagogiques peuvent toutes être traitées dans une optique de continuum temporel par rapport aux OER, allant des OPEN EDUCATIONAL RESSOURCES à une extrémité aux OPEN EDUCATIONAL COURSES (Charlier, 2013), et donc MOOC, à l’autre.

La notion d’OER a été créée aux États-Unis, au sein du MIT, mais depuis la pratique s’est étendue au niveau mondial. En Europe il y a eu plusieurs initiatives de ce type, notamment aux UK, en Espagne, au Pays Bas, dans les pays scandinaves et en Italie (Panto’ & al., 2013). La Open University a été à l’avant garde à la fois en termes de recherche, mais aussi de promotion et création de ressources en libre accès. Dans le monde hispanophone, le secteur s’est développé grâce à des programmes de développement de coopération transatlantique qui ont permis l’émergence d’initiatives à l’Université de Monterrey, au Mexique ou au Brésil (Panto’ & al., 2013).

Les OER sont définies en tant qu’”ensemble de matériaux d’apprentissage et enseignement de nature digitale ou pas, de domaine public ou cédé en mode « open license », qui permet d’accéder à des contenus librement adaptables et distribuables » (Unesco ). Il y a un lien entre utilisation des MOOC et universalité des apprentissages, qui dépasse la frontière entre formel et informel. Même si d’un point de vue temporel l’apprentissage n’a jamais été « enfermé » dans une salle de cours, les évolutions technologiques ouvrent maintenant de nouvelles opportunités. L’utilisation d’internet et de nouvelles solutions digitales permet d’augmenter la fréquence et l’ubiquité des apprentissages (Bell, 2010). Les apprenants ont de plus en plus accès à des contenus et à des possibilités de collaboration avec leurs co apprenants. Ceci encourage le passage à la formation tout au long de la vie, ou lifelong learning, permettant aux individus de créer leur propre « cours dans le cours ». Le programme de formation, au lieu d’être prédéterminé à la mise en place de la formation, est le fruit de la construction et de l’output du parcours en acte par l’apprenant. Ceci est encore plus important dans le domaine de la formation des adultes, qui entament leur formation chacun avec leurs besoins et compétences (Cormier, 2010).

La définition que l’Unesco fournit des OER est construite autour de l’idée de redistribution et de réutilisation des ressources éducatives. Wiley (cité par Hill & al., 2010) ; elle explicite quatre modalités de réutilisation des ressources, qui peuvent être mixées, ajoutant de la complexité au dispositif. Ces quatre « R » permettent de customiser le niveau d’ouverture et sont les suivantes : reuse (réutilisation), redistribute (redistribution), revise (révision) et remix. Selon Downes (cité par Jacoby, 2004), la notion d’« open » est construite autour de trois catégories : contenu, instruction et évaluation. Les contenus de nature ouverte sont ceux qui sont partagés librement en mode « peer-to-peer ». L’instruction acquiert une nature ouverte lorsque les participants construisent leur propre parcours de formation. L’évaluation de nature ouverte est celle qui peut être effectuée par toute entité souhaitant donner une certification aux participants. On évolue dans ce cas vers des configurations de CMOOC , selon lesquelles les participants s’adaptent constamment et ainsi faisant transforment un réseau de nature complexe (Waite, cité par Jacoby, 2014). Les apprenants exercent en effet leur propre agentivité, et il y a une relation entre leur autonomie et la nature ouverte des dispositifs d’apprentissage : ces caractéristiques sont interdépendantes et s’influencent l’une l’autre, en influençant également l’expérience de l’apprenant selon un cercle vertueux (Mak & al., 2010). Ainsi faisant, un MOOC évolue vers ce que Jézégou (2010) appelle « formation ouverte » : « un dispositif organisé, finalisé, reconnu comme tel par les acteurs, qui prend en compte la singularité des personnes dans leurs dimensions individuelle et collective et repose sur des situations d’apprentissage complémentaire en termes de temps, de lieux, de médiations pédagogiques, humaines et technologiques, et de ressources » (Jézégou, 2010, p. 84).

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Table des matières

INTRODUCTION
1. Première section : définition du thème de recherche
1.1 Démarche d’analyse de la littérature sur les MOOC
1.2. Sélection de la littérature
1.3. Approche théorique des MOOC
1.4. Innovation en entreprise avec les MOOC
1.5. Limites de la littérature
1.6. Premier niveau de problématisation
Synthèse de la première section
2. Deuxième section : cadrage de l’objet de recherche
2.1. Perspectives d’analyse émergentes
2.2. Premier niveau de cadrage
2.2.1. Auteurs du behaviorisme
2.2.2. Auteurs du cognitivisme
2.2.3. Auteurs du socioconstructivisme
2.2.4. Auteurs du courant expérientiel
2.2.5. Auteurs du courant connectiviste
2.2.6. Positionnement de la chercheuse
2.3. Deuxième niveau de cadrage : le MOOC en tant qu’artefact
2.3.1. Traitement de la notion d’artefacts dans la littérature
2.3.1.1.. Cognition distribuée
2.3.1.2. Théorie instrumentale
2.3.1.3. Activity Theory
2.3.1.4. Sociomatérialité
2.3.2. Le MOOC en tant qu’artefact d’apprentissage
2.3.3. Analyse de la notion de performativité
2.3.4. Apport de la notion de performativité aux sciences de gestion
2.3.5. Positionnement de la chercheuse
2.4. Troisième niveau de cadrage : le locus de l’apprentissage
2.4.1. Les représentations en tant que clé de voûte
2.4.2 MOOC et représentations des apprenants
2.5 Possibles angles d’analyse des MOOC
2.6. Positionnement de la chercheuse
Synthèse de la deuxième section
3. Troisième section : problématisation
3.1. Étudier les MOOC sous l’angle de la performativité
3.2. Opérationnalisation des concepts dans le cadre de cette recherche
3.3. Construction du modèle de recherche
Synthèse de la troisième section
4. Quatrième section : analyse empirique
4.1. Présentation du contexte de la recherche
4.2. Fondements épistémologiques
4.3. Posture épistémologique
4.4. Approche de recherche
4.4.1. Méthodologie générale de la recherche quantitative
4.4.2. Terrain de recherche
4.4.3. Procédure de collecte et de traitement des données
4.4.4. Traitements statistiques
4.4.4.1. L’alpha de Cronbach
4.4.4.2. Les équations structurelles
4.4.4.3. La classification
4.4.4.4. L’analyse en composantes principales
4.4.4.5. La régression logistique
4.5. Traitement quantitatif
4.5.1. Niveau individuel
4.5.1.1. Attentes de performativité
4.5.1.2. Lien avec le statut managérial des apprenants
4.5.1.3. Lien avec le profil managérial des apprenants
4.5.2. Niveau « outil »
4.5.2.1. Portée disruptive du MOOCLead
4.5.2.2. Construction du modèle complexe associant innovation pédagogique et performativité
4.5.2.3. Portée amplificatrice du MOOCLead
4.5.3. Niveau « Entreprise » : hybridation du MOOCLead
4.6. Récapitulatif des résultats de l’analyse quantitative
4.7. Approfondissement qualitatif
4.7.1. Explication de la démarche
4.7.2. Analyse des commentaires FUN
4.7.2.1. Terrain et nature de l’échantillon
4.7.2.2. Traitement des données par NVIVO
4.7.3. Analyse des interactions Zeebra
4.7.3.1. Terrain et nature de l’échantillon
4.7.3.2. Traitement des données par NVIVO
4.7.3.3. Analyse des interactions Zeebra
4.7.4. Entretiens qualitatifs d’approfondissement
4.7.4.1. Approche méthodologique
4.7.4.2. Modèle de recherche
4.7.4.3. Méthodologie de conduite des entretiens
4.7.4.4. Traitement des données par NVIVO
4.7.4.5. Analyse qualitative du discours
Synthèse de la quatrième section
5. Cinquième section : conclusions de recherche
5.1. Rappel de la problématique
5.2. Les réponses à la problématique de départ
5.3 Limites et perspectives de la recherche
5.4. Contribution de la recherche
5.5. Applications managériales
5.6. Conclusions
6. Bibliographie
CONCLUSION

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