Protection des composites à matrice céramique (CMC) contre la corrosion à haute température dans les moteurs aéronautiques

Les contraintes économiques et environnementales poussent les motoristes de l’industrie aéronautique à développer des axes de recherche en vue de réduire les nuisances sonores, la consommation de carburant, les émissions de NOx et de CO2. Pour répondre aux deux dernières exigences, une solution consiste à augmenter la température des gaz dans la chambre de combustion des turboréacteurs, ce qui induit une amélioration du rendement moteur (réduction de la consommation de kérosène) et la possibilité d’avoir un mélange pauvre en combustible (réduction des NOx). Il faut cependant que les matériaux utilisés dans la chambre de combustion soient capables de supporter des températures plus élevées.

Actuellement, les superalliages sont utilisés, mais les températures atteintes (de l’ordre de 1000°C) dans les moteurs aéronautiques sont proches de leur limite d’utilisation [Naslain 1999]. Pour accroître significativement ces températures d’utilisation jusqu’à 1400°C, une nouvelle classe de matériaux est envisagée. Les céramiques à base de silicium, telles que SiC, Si3N4, ou encore les composites thermostructuraux de type SiC/SiC sont des candidats prometteurs en raison de leurs propriétés mécaniques et thermiques et de leur stabilité à haute température [Christin 2002].

Identification des matériaux de revêtement

Les matériaux de revêtement à étudier dans le cadre de cette thèse ont pu être identifiés grâce à une étude bibliographique qui met en évidence : (i) les propriétés qu’une protection externe anticorrosion doit posséder, (ii) les avantages et inconvénients des systèmes actuels et (iii) les nouveaux systèmes en cours de développement.

Rôle d’une protection externe 

La protection externe a pour but de protéger le substrat contre l’environnement agressif rencontré notamment dans les moteurs aéronautiques. Ainsi, les matériaux utilisés doivent être capables de résister dans des conditions extrêmes, c’est-à-dire sous contrainte mécanique à très haute température et sous atmosphère oxydante et/ou corrosive (présence de vapeur d’eau, de sels fondus…), générée par la combustion du kérosène. Historiquement, les revêtements ont été développés pour protéger le composite des sels fondus. Ensuite, il a été démontré que dans les conditions d’utilisation, la silice, SiO2, formée par oxydation du SiC se volatilisait sous forme d’hydroxydes Si(OH)4 [Opila 1997]. Par conséquent, les efforts se sont tournés vers le développement de barrières contre les espèces corrosives, permettant ainsi de limiter la volatilisation de la silice. Ces barrières doivent évidemment présenter une meilleure stabilité thermique et chimique que celle présentée par la silice.

D’une manière générale, les travaux entrepris ont consisté à développer des revêtements permettant d’accroître la durée de vie du composite. Deux types de solutions ont été envisagés :
– Les barrières thermiques (TBC : Thermal Barrier Coating) consistent à limiter la conduction de chaleur à cœur du matériau, et ainsi abaisser la température à la surface du composite à matrice céramique. Les matériaux utilisés en tant que TBC doivent posséder une faible conductivité thermique. Ils ne constituent pas forcément une barrière de diffusion des espèces oxydantes. La zircone yttriée (YSZ) reste le matériau de référence.
– Les barrières environnementales (EBC : Environmental Barrier Coating) forment une barrière de diffusion des espèces oxydantes et/ou corrosives et freinent ainsi l’oxydation du composite.

En fonction de la nature du substrat et des conditions d’utilisation, l’accent sera mis sur l’utilisation préférentielle d’un TBC ou d’un EBC, même si un matériau doit associer les propriétés des deux types de barrières précédemment citées pour assurer une bonne protection. Dans la suite de ce mémoire, seules les protections externes de type EBC seront considérées.

Les différentes propriétés d’un système de protection externe 

Une propriété incontournable est une bonne adhérence caractérisée par une liaison forte entre le revêtement et le substrat. Celle-ci est souvent liée à une compatibilité mécanique et chimique entre les matériaux utilisés. La liaison entre deux matériaux peut être d’origine (i) mécanique, en raison de l’interpénétration des rugosités de surface des deux matériaux en contact ou (ii) chimique par réaction entre les matériaux pour former une troisième phase. Les obstacles à une bonne adhésion sont les contraintes mécaniques d’origine thermique qui peuvent se développer si les coefficients de dilatation thermique sont trop différents, et les réactions chimiques parasites susceptibles de former de nouvelles phases solides aux volumes molaires différents ou une phase gazeuse et une porosité le long des interfaces. L’augmentation de la pression à l’interface revêtement/CMC, sous l’effet d’une accumulation de gaz, peut alors conduire à l’écaillage du revêtement. Ce phénomène se retrouve aussi lors de l’augmentation des vitesses d’oxydation des différents constituants.

La seconde propriété concerne la stabilité du revêtement lui-même. La protection du substrat doit être efficace dans une large gamme de températures et de pressions, typiquement de 1000°C à 1600°C et de 100 kPa à 3 MPa, avec une résistance à la fissuration lors de cyclage thermique. Le système doit être stable dans ces conditions jusqu’à la température maximale d’utilisation pour éviter les variations de composition ou les changements de structure. Les oxydes sont, en général, stables dans l’air et les atmosphères oxydantes mais la liaison oxyde/substrat nécessite souvent des souscouches d’adaptation dont la température de fusion doit être au moins égale à la température d’utilisation. L’efficacité de la protection est liée à la fois à sa vitesse de volatilisation, à son érosion et à la perméabilité à l’oxygène et/ou à l’eau de ses constituants. Cependant, une faible perméabilité devient inutile si le revêtement est fissuré. Les fissurations proviennent principalement :
– des contraintes mécaniques d’origine thermique : leur intensité dépend de la différence de coefficient de dilatation thermique des matériaux et de leurs propriétés mécaniques (rigidité, déformation à rupture) ;
– de l’anisotropie du matériau : les matériaux cristallins à haute symétrie plus isotropes résistent généralement mieux aux chocs thermiques. Un gradient de composition à l’interface revêtement/CMC permet une variation continue des propriétés physiques et la répartition des contraintes sur un volume de matériau plus grand ;
– de l’apparition d’une nouvelle phase à l’interface substrat / dépôt ;
– des transformations allotropiques qui s’accompagnent d’importantes variations de volume de la maille élémentaire.

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Table des matières

1 INTRODUCTION GENERALE
2 IDENTIFICATION DES MATERIAUX DE REVETEMENT
2.1 ROLE D’UNE PROTECTION EXTERNE
2.2 LES DIFFERENTES PROPRIETES D’UN SYSTEME DE PROTECTION EXTERNE
2.3 LES BARRIERES ENVIRONNEMENTALES DE REFERENCE
2.3.1 Revêtement à base de mullite
2.3.2 Revêtement à base de mullite et de YSZ
2.3.3 Revêtement à base de mullite et de BSAS
2.4 LES NOUVEAUX SYSTEMES DE BARRIERE ENVIRONNEMENTALE
2.4.1 Les silicates de terre rare
2.4.2 Les aluminates de terre rare
2.4.3 L’oxyde de tantale et les tantalates de terre rare
2.5 BILAN
3 MOYENS EXPERIMENTAUX
3.1 ELABORATION
3.1.1 Le broyage et le pastillage des poudres
3.1.2 Les traitements thermiques
3.2 ESSAIS DE CORROSION
3.2.1 Description de l’installation
3.2.2 Conditions opératoires
3.2.3 Déroulement des essais de corrosion
3.3 CARACTERISATIONS THERMOMECANIQUES
3.4 CHOCS THERMIQUES
3.5 CARACTERISATIONS PHYSICO-CHIMIQUES
3.5.1 Les observations morphologiques
3.5.2 Les analyses physico-chimiques quantitatives
4 VALIDATION DU CHOIX DES FAMILLES DE MATERIAUX DE REVETEMENT
4.1 LES SILICATES DE TERRE RARE
4.1.1 Elaboration
4.1.1.1 Le frittage réactif
4.1.1.2 Le procédé sol gel
4.1.2 Stabilité structurale
4.1.3 Compatibilité thermomécanique
4.1.4 Compatibilité chimique
4.2 LES ALUMINATES D’YTTRIUM
4.2.1 Elaboration et stabilité structurale
4.2.2 Compatibilité thermomécanique
4.2.3 Compatibilité chimique
4.3 LES TANTALATES D’YTTRIUM
4.3.1 Elaboration et stabilité structurale
4.3.2 Compatibilité thermomécanique
4.3.3 Compatibilité chimique
4.4 BILAN DES MATERIAUX SELECTIONNES
5 STABILITE DES SILICATES DE TERRE RARE SOUS ATMOSPHERE HUMIDE
5.1 ETUDE THERMODYNAMIQUE
5.1.1 La modélisation thermodynamique
5.1.1.1 Enthalpie libre des composés définis
5.1.1.2 Description des solutions condensées : modèle en sous-réseaux
5.1.1.3 Les logiciels utilisés
5.1.2 Etat de l’art des données thermodynamiques disponibles
5.1.2.1 Les espèces condensées
5.1.2.2 Les espèces gazeuses
5.1.3 Evaluation des données thermodynamiques manquantes
5.1.3.1 Méthodes pouvant être mises en oeuvre
5.1.3.2 Présentation de la démarche expérimentale
5.1.3.3 Détermination de la nature des flux à l’intérieur du four
5.1.3.4 Détermination des pressions partielles des hydroxydes formés
5.1.3.5 Validation des hypothèses de travail par l’étude de la silice
5.1.3.6 Volatilisation des oxydes de terre rare
5.1.3.7 Obtention des données thermodynamiques
5.1.4 Stabilité des oxydes de terre rare sous air humide
5.1.5 Comportement des matériaux de revêtement sous air humide
5.2 CONFRONTATION EXPERIENCE – THERMODYNAMIQUE
5.2.1 Cas des silicates d’yttrium
5.2.2 Cas des silicates d’ytterbium
5.2.3 Comparaison des différents silicates de terre rare
5.3 BILAN DES TRAVAUX
6 APPLICATION SUR LES MATERIAUX COMPOSITES
6.1 CHOIX DU MODE D’ELABORATION DES REVETEMENTS
6.2 CARACTERISATION DE LA POUDRE INITIALE
6.3 CARACTERISATION DES DEPOTS PLASMA
6.3.1 Caractérisations physico-chimiques des dépôts bruts
6.3.2 Tenue aux chocs thermiques des dépôts bruts
6.3.3 Aptitude à cristalliser des dépôts bruts
6.3.4 Caractérisations physico-chimiques des dépôts cristallisés
6.3.5 Tenue aux chocs thermiques des dépôts cristallisés
6.3.6 Comparaison de la résistance à la corrosion des dépôts plasma
7 CONCLUSION

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