Le dopage est le « fait d’administrer, d’inciter à l’usage, de faciliter l’utilisation, en vue d’une compétition sportive, de substances ou de procédés de nature à accroître artificiellement les capacités physiques d’une personne ou d’un animal ou de masquer leur emploi en vue d’un contrôle » (1). Depuis les temps les plus anciens l’humain a souvent dépassé les limites de la déontologie au profit d’accomplissements personnels. Cette perversion de la nature humaine explique la concomitance entre la naissance des compétitions sportives et celle du dopage. Au VIème siècle avant J.-C., à l’aube des premiers jeux olympiques antiques, les connaissances en physiologie humaine étant très limitées voire nulles, les athlètes utilisaient certaines viandes pour améliorer leurs performances. Les sauteurs en hauteur ingéraient de la viande de chèvre pour sauter plus haut et les lanceurs puisaient leur force dans la viande de taureaux. Au XXème siècle, l’explosion des connaissances scientifiques permit au dopage de se perfectionner en mimant ou en inhibant des phénomènes physiologiques de plus en plus complexes.
Aujourd’hui, le sport est devenu un véritable business, c’est une source de revenu exploitée par un nombre considérable de corps de métiers. L’appât du gain pousse malheureusement certains individus peu scrupuleux à vouloir faire leur place dans cette industrie en oubliant les valeurs fondamentales du sport. En 2020, combien seront ceux qui ne trembleront pas en entendant résonner le serment olympique de Pierre de Coubertin dans le stade de Tokyo ? Les sommes en jeu, en continuelle inflation et les techniques de dopage de plus en plus perfectionnées, combinées à la soif de gloire, risquent malheureusement d’augmenter cet effectif.
Le muscle étant le principal outil de travail du sportif, les utilisateurs de produits dopants ont toujours cherché à pousser la performance de celui-ci au-delà des limites physiologiques. Les stimulants comme les amphétamines et les antidouleurs comme le tramadol ont permis la surutilisation du muscle sans ressentir les signes de détresse renvoyés par ce dernier. L’EPO, les transfusions sanguines et les bronchodilatateurs ont permis d’augmenter la quantité de carburant mise à disposition du muscle pendant l’effort. Mais ces techniques sont maintenant bien connues des autorités de lutte antidopage, ce qui peut dissuader leurs potentiels utilisateurs.
Au cours de ces dernières années les connaissances sur les mécanismes moléculaires nécessaires à la fonction du muscle squelettique n’ont cessé de croitre. Un grand nombre d’agents pharmacologiques ont été synthétisés dans le but de mimer un exercice physique physiologique. Ces candidats médicaments sont notamment développés pour combattre les maladies neuromusculaires, mais certains d’entre eux ont déjà été détournés par des sportifs pour améliorer leurs performances. De nouvelles molécules voient le jour chaque année et permettent aux tricheurs d’utiliser des produits encore indétectables par les techniques d’analyse actuelles.
PHYSIOLOGIE DU MUSCLE STRIE SQUELETTIQUE
L’organisme humain est composé de deux types de muscles différents : les muscles non-striés (lisses) et les muscles striés. Les muscles striés sont divisés en deux sous-familles : les muscles squelettiques et le muscle cardiaque. On les nomme ainsi car ils présentent une alternance de bandes sombres et claires au microscope optique. Les muscles lisses et cardiaques sont innervés par le système nerveux autonome, leur contraction est involontaire. Ils permettent, entre autres, la progression du contenu d’organes creux comme le bol alimentaire dans le tube digestif ou la circulation sanguine. A l’inverse les muscles striés squelettiques sont innervés par le système nerveux somatique, leur contraction est volontaire, ils assurent un rôle de motricité dynamique. Ces muscles présentent cependant de nombreuses activités involontaires telles que le maintien de la posture, rendant possible la motricité statique. Les trois types de muscles présentent donc des structures différentes qui leurs procurent des fonctions différentes.
Dans le cadre de cette étude nous nous intéresserons exclusivement au fonctionnement des muscles striés squelettiques. Comme leur nom l’indique, ces muscles sont fixés sur notre squelette, ils permettent sa mise en mouvement. Les muscles squelettiques représentent 40% du poids du corps chez un homme et 32% chez une femme.
Rôles
Les muscles squelettiques présentent de nombreuses fonctions dont certaines sont indispensables au bon fonctionnement de notre organisme. En particulier en exerçant un rôle majeur dans l’homéostasie. Ce processus est défini par la régulation de l’organisme dans le maintien des différentes constantes du milieu intérieur (ensemble des liquides de l’organisme) entre les limites des valeurs normales (3). Les muscles squelettiques sont indispensables à l’obtention de nutriments, nous les utilisons pour mâcher et avaler les aliments. Ils nous permettent de respirer. Leur production de chaleur remplit un rôle majeur dans la thermorégulation de l’organisme. Enfin, en étant garant de notre motricité dynamique, ils nous permettent d’éviter les dangers et assurent ainsi la protection de l’homéostasie. Outre leurs rôles dans l’homéostasie, ces muscles ont un rôle social, ils nous permettent de jouir d’une certaine qualité de vie et sont indispensables à notre indépendance. A l’image de la relation entre les câbles porteurs et le tablier d’un pont, ils sont essentiels au maintien de la géométrie tridimensionnelle de notre squelette. Leur action sur notre posture nous confère donc une motricité statique. Enfin, les muscles squelettiques, nous attribuent une motricité dynamique, grâce à eux nous pouvons nous mouvoir, faire du sport et nous livrer à des activités artistiques.
Histologie
Structure
Le muscle squelettique est constitué de nombreuses fibres parallèles occupant toute la longueur du muscle, entourées par du tissu conjonctif. Nous allons définir successivement ses différents constituants.
La myofibrille
Les myofibrilles sont des éléments intracellulaires cylindriques contractiles spécialisés qui occupent 80% du volume de la fibre en allant d’un bout à l’autre de celle-ci. Elles sont constituées d’éléments du cytosquelette disposés de façon régulière : les filaments fins (assemblage de protéines d’actine) et épais (assemblages de protéines de myosine). En microscopie optique, la myofibrille est une alternance de bandes sombres (bandes A) et claires (bandes I) alignées de façon parallèle, lui conférant son apparence striée.
La bande A
C’est un faisceau constitué de filaments épais et de la partie des filaments fins qui chevauchent leurs deux extrémités. La zone la plus claire située au centre de la bande A n’est constituée que de la partie centrale des filaments épais, elle est dénuée de filaments fins. Elle porte le nom de zone H.
La bande I
Elle contient la partie des filaments fins qui n’appartient pas à la bande A ainsi qu’une partie des molécules de titine. Elle contient donc des filaments fins appartenant à deux sarcomères adjacents.
La ligne M
C’est un ensemble de protéines de soutien reliant transversalement les filaments épais d’un même faisceau. Elle est donc située au milieu de la bande A et de la zone H.
Le disque Z (ou ligne Z)
C’est la ligne sombre transversale, située au milieu de la bande I. Il est constitué d’un assemblage de protéines du cytosquelette reliant les filaments fins de deux sarcomères contigus.
Le sarcomère
C’est la zone de myofibrilles comprise entre deux disques Z. Le sarcomère est l’unité fonctionnelle de base du muscle squelettique. A l’instar du néphron dans le rein, une unité fonctionnelle d’un organe est le plus petit élément capable d’exécuter toutes les fonctions de l’organe.
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Table des matières
INTRODUCTION
CHAPITRE I : PHYSIOLOGIE DU MUSCLE STRIE SQUELETTIQUE
I.1 Rôles
I.2 Histologie
I.2.1 Structure
I.2.2 Bases moléculaires de la contraction
I.3 Métabolisme
I.3.1 La phosphocréatine ou créatine-phosphate
I.3.2 La glycolyse
I.3.3 Le cycle de Krebs
I.3.4 La phosphorylation oxydative
I.3.5 La myokinase ou adénylate kinase
I.3.6 Rôle des peroxysomes
I.4 Typologies
I.4.1 Fibres I
I.4.2 Fibres II
I.5 Régénération
I.5.1 Trois étapes de la régénération
I.5.2 Action de la myostatine
CHAPITRE II : LES RECEPTEURS PPARs
II.1 Généralités sur les récepteurs nucléaires
II.2 Mécanisme d’action
II.2.1 Interaction ligand-récepteur
II.2.2 Interaction récepteur-ADN
II.3 Différents types de PPARs et leurs ligands endogènes et synthétiques
II.3.1. Mécanismes d’action des PPARs
II.3.2 structure des PPARs
II.3.3 PPARα (42)
II.3.4 PPARγ
II.3.5 PPARδ
CHAPITRE III : MEDICAMENTS AFFECTANT LE MUSCLE STRIE SQUELETTIQUE
III.1 Molécules agonistes
III.1.1 AICAR
III.1.2 Ligands REV-ERB
III.1.3 Composés activant les sirtuines (STACS)
III.1.4 Précurseurs du NAD+
III.1.5 Agonistes AdipoR1
III.1.6 Agonistes PPARδ
III.1.7 Agonistes ERR
III.2 Molécules antagonistes et inhibitrices
III.2.1 Inhibiteurs de la GCN5
III.2.2 MOTS-c
III.2.3 Inhibiteurs des voies de signalisation de la myostatine
III.2.4 Inhibiteurs de la NCoR-1
III.3 Obstacles à la détection des utilisateurs
III.4 Les cas de sportifs positifs déclarés par l’AMA à ce jour
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
