Douleur et cancer

L’augmentation du nombre de cas diagnostiqués et de son taux de survie fait du cancer un véritable enjeu de santé publique notamment dans la prise en charge des soins de support dont la prise en charge de la douleur. Le Plan Cancer 2014-2019 est dans une dynamique d’amélioration de ces soins, en donnant au médecin généraliste une place à part entière, le citant dans plusieurs articles comme étant un acteur pivot des soins de support. Le cancer peut être générateur de douleur à tous les stades de la maladie y compris en phase de rémission avec la présence de douleurs séquellaires. L’évaluation de la douleur et sa prise en charge ont donc leur place dans les soins en cancérologie. Mais cette prise en charge est complexe car elle doit prendre en compte toutes les dimensions de la douleur selon le modèle bio-psycho-social de celle-ci .

Le médecin généraliste, au cœur des soins de premier recours et de proximité, a un rôle central dans la prise en charge des patients cancéreux en prenant en charge globalement son patient. Aujourd’hui, les connaissances de la physiopathologie de la douleur offrent différents outils aux médecins pour soulager leurs patients.

Douleur et cancer

Epidémiologie

Epidémiologie du cancer 

Epidémiologie du cancer en France 
En 2015, il a été estimé à 385 000 le nombre de nouveaux cas de cancer. Le diagnostic se fait à un âge médian de 68 ans chez l’homme et 67 ans chez la femme. Le taux de mortalité est évalué à 124 pour 100 000 hommes et 73 pour 100 000 femmes. 149 500 décès par cancer ont été dénombrés en 2015 en France métropolitaine dont 84 100 hommes et 65 400 femmes, contre 85 000 hommes et 63 000 femmes en 2012. Le premier cancer en incidence chez l’homme est celui de la prostate. D’évolution lente, il touche un homme sur deux après 80 ans. Son taux de mortalité est en diminution grâce au dépistage qui permet un diagnostic précoce (2). Chez la femme, le premier cancer en incidence et mortalité est le cancer du sein. En 20 ans, l’incidence a augmenté de 50% mais tend à décroître depuis 2005. Une femme sur huit est touchée avec un âge médian de 65 ans (3). Le cancer colorectal est le troisième cancer chez l’homme et le deuxième chez la femme. Grâce au dépistage, nous remarquons une augmentation de son incidence mais une diminution de sa mortalité. Chez l’enfant et le jeune adulte, les cancers sont rares et représentent la troisième cause de mortalité. Les cancers les plus fréquents sont les tumeurs germinales, les lymphomes de Hodgkin, les mélanomes et les cancers de la thyroïde .

Épidémiologie du cancer dans la Manche 
Dans le département de la Manche, entre 1994 et 2008, les cancers avec le plus haut taux d’incidence sont par ordre de décroissance, le cancer du sein, celui de la prostate, du poumon, du côlon puis les hémopathies (5). Le registre des cancers de la Manche a enregistré entre 1994 et 2012, 50 300 tumeurs invasives diagnostiquées, deux tiers de ces tumeurs étant des cancers de la prostate, cutanés, du sein, du côlon-rectum ou du poumon.

Épidémiologie de la douleur dans le cancer

Avant les années 2000

En 1984, le nombre de patients ayant un cancer et étant douloureux est estimé à 19 millions dans le monde (6). Depuis 1986, l’OMS fait de la prise en charge de la douleur cancéreuse, un enjeu de santé publique. En 1989, une étude américaine montre que la douleur était peu reconnue par les soignants mais une préoccupation pour les patients. Cette étude met en évidence que 50% des patients déclaraient être douloureux à tous les stades de la maladie (7). A cette époque, l’évaluation de la douleur était peu pratiquée. En 1994, l’étude de Jacox et al., conclut que moins de la moitié des patients avec un cancer sont soulagés de leur douleur et 25% d’entre eux décèdent en étant douloureux .

Depuis les années 2000

Aujourd’hui, les spécialistes estiment que 90% des douleurs du cancer peuvent être soulagées grâce aux progrès de la médecine. Or, bon nombre de patients ne se disent pas soulagés. Il est estimé que 38% d’entre eux sont douloureux (9). D’après une enquête européenne de 2007, la douleur a été le symptôme conduisant au diagnostic de cancer chez 46% des patients, la moitié d’entre eux décrivant la douleur comme intense. En prenant en compte seulement les patients français, 38% évaluent leur douleur comme intolérable, 52% d’entre eux considèrent que la douleur les empêchent de penser ou de se concentrer et 16% ont subi une intervention chirurgicale pour le traitement de cette douleur (10). Une méta-analyse récente ayant repris des publications sur les 40 dernières années révèle que pour tous cancers, à tous stades confondus, la prévalence de la douleur est supérieure à 50%, avec des douleurs d’intensité modérée à forte dans 1/3 à 2/3 des cas .

D’autres études concluent que la prévalence de la douleur cancéreuse est de 25 à 70%, en prenant en compte la localisation de la tumeur primitive, le stade de la maladie et les traitements utilisés (12). Mais ces études ne font pas la distinction entre douleur aiguë et chronique. En 2017, l’étude du Dr Bouhassira révèle une prévalence élevée de la douleur chronique dans le cancer, avec ou sans dimension neuropathique. Elle est estimée à 35% des patients vus par leur spécialiste. Seulement 7.3% de ces patients douloureux rencontre un médecin algologue (9).Ce constat met en exergue les difficultés de la prise en charge de la douleur dès le diagnostic de la maladie par les différents professionnels accompagnant le patient. Pourtant la prise en charge de la douleur dans le cancer est bien codifiée, grâce notamment à la publication de protocoles .

Spécificités de la douleur dans le cancer

La douleur cancéreuse peut être un signe tardif dans l’histoire de la maladie mais peut parfois en être révélatrice. 40% des patients sont douloureux au stade curatif et 80% en phase avancée (14). La douleur cancéreuse peut avoir n’importe quelle localisation, quel que soit le site primitif de la tumeur. Les territoires d’irradiation des douleurs viscérales et somatiques peuvent se juxtaposer ou se superposer. Les cancers les plus douloureux sont ceux de la prostate, du sein, du côlon, du poumon, du pancréas et les cancers génito-urinaires (15). En effet, ces cancers métastasent le plus au niveau osseux ou envahissent rapidement les plexus nerveux entraînant de fortes douleurs. Les douleurs sont localisées majoritairement au niveau du rachis cervical, lombaire bas et haut, et des épaules (9), et correspondent au siège des métastases osseuses ou envahissant les plexus nerveux. Les douleurs aiguës peuvent se surajouter aux douleurs chroniques. De plus, d’autres pathologies douloureuses peuvent s’intriquer à la douleur du cancer. Des facteurs tels que l’anxiété, la dépression, l’histoire personnelle du patient sont susceptibles d’influencer la perception, l’intensité, le vécu de la douleur.

Différents types de douleur en cancérologie

Douleur par excès de nociception : Première cause de douleur 

Il existe plusieurs causes aux douleurs par excès de nociception. Ces douleurs dépendent de la localisation, du type de tumeur ou de métastases, du type de traitement du cancer lui-même et de ses effets secondaires. Les tumeurs digestives par envahissement des viscères peuvent donner des douleurs abdominales, des dysphagies. Les métastases osseuses favorisent des fractures pathologiques, à l’origine de douleurs intenses. Elles peuvent être elles-mêmes douloureuses par l’inflammation locale qu’elles entraînent en mettant en tension le périoste. Les traitements tels que la radiothérapie et la chimiothérapie peuvent être responsables d’atteintes muqueuses comme des mucites.

Douleur neuropathique : Deuxième cause

Il s’agit d’une douleur étant la conséquence directe d’une lésion ou d’une maladie affectant le système somato-sensoriel, selon l’IASP (16). Elle peut être centrale ou périphérique, due au cancer ou aux traitements. L’élément évocateur de cette douleur est la description par le patient de dysesthésies ou d’un dysfonctionnement du système nerveux autonome. La sémiologie à l’examen clinique permet d’orienter le médecin vers une douleur neuropathique. Son diagnostic est établi en s’appuyant sur l’anamnèse de la douleur, l’interrogatoire et la clinique du patient avec l’utilisation de l’outil DN4. Il peut être trouvé :
– Une allodynie, sensation douloureuse provoquée par une stimulation normalement non douloureuse.
– Une hyperalgésie, sensation douloureuse anormalement intense provoquée par une stimulation douloureuse normalement moins intense.
– Une hyperpathie, sensation douloureuse intense et durable due à la somation spatiale et temporelle d’un stimulus faiblement douloureux.
– Une hypoesthésie ou une hyperesthésie correspondant respectivement à une diminution de la sensibilité et à une majoration de la sensibilité.
– Des dysesthésies, sensations anormales et désagréables mais non douloureuses qui sont spontanées ou provoquées.
– Des paresthésies, sensations anormales spontanées non douloureuses et non désagréables à types de picotements ou fourmillements.

Les principales causes centrales regroupent les tumeurs primitives et l’envahissement médullaire. Les neuropathies post-chirurgicales, post-radiques, chimio-induites, font partie des causes périphériques. L’envahissement radiculaire de la tumeur comme dans le syndrome de Pancoast-Tobias, est à l’origine de douleurs neuropathiques périphériques.

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Table des matières

Introduction
Chapitre 1 : Douleur et cancer
I. Epidémiologie
I.A. Epidémiologie du cancer
I.A.1. Epidémiologie du cancer en France
I.A.2. Épidémiologie du cancer dans la Manche
I.B. Épidémiologie de la douleur dans le cancer
I.B.1. Avant les années 2000
I.B.2. Depuis les années 2000
II. Spécificités de la douleur dans le cancer
II.A. Différents types de douleur en cancérologie
II.A.1. Douleur par excès de nociception : Première cause de douleur
II.A.2. Douleur neuropathique : Deuxième cause
II.A.3. Douleurs mixtes
II.A.4. Douleurs liées aux soins
II.A.5. Douleur dysfonctionnelle ou nociplastique
II.B. Physiopathologie de la douleur dans le cancer
II.B.1. Au niveau périphérique
II.B.1.a. La transmission du message douloureux
II.B.1.b. Le rôle de la tumeur
II.B.2. Voie de la douleur cancéreuse au niveau central
II.B.3. Cas des tumeurs et des métastases osseuses
II.C. Spécificités de l’évolution de la douleur dans le cancer
II.C.1. Accès douloureux paroxystiques (ADP)
II.C.2. Douleurs rebelles
Chapitre 2 : Prise en charge de la douleur dans le cancer
I. Les traitements médicamenteux
I.A. Classification de Beaulieu
I.B. Concernant la douleur nociceptive
I.B.1. Palier I : Traitements « non opioïdes »
I.B.2. Palier II : Traitements « opioïdes faibles »
I.B.3. Palier III : Traitements « opioïdes forts »
I.B.4. Règles de prescription
I.C. Concernant la douleur neuropathique
I.C.1. Les antidépresseurs
I.C.2. Les antiépileptiques
I.C.3. Règles de prescription
I.D. Concernant les douleurs liées aux soins
I.E. Cas des accès douloureux paroxystiques
I.F. Cas des douleurs rebelles
I.F.1. La kétamine
I.F.2. La méthadone
I.F.3. Les anesthésiques locaux
I.G. L’analgésie auto-contrôlée par le patient
II. Les techniques interventionnelles
II.A. Les blocs nerveux périphériques et la neurolyse
II.A.1. Exemple de la neurolyse du ganglion stellaire
II.B. Chirurgie du rachis et techniques ablatives (Drézotomie et cordotomie)
II.B.1. La DREZotomie
II.B.2. La cordotomie
II.B.3. La mésencéphalotomie
II.B.4. La myélotomie commissurale
II.C. L’algoradiologie interventionnelle
II.C.1. La cimentoplastie ou vertébroplastie
II.C.2. L’ablation thermique par radiofréquence ou micro-ondes
II.C.3. La cryothérapie
II.D. Les injections centrales
II.D.1. Les injections intrathécales
II.D.2. Les injections péridurales
II.D.3. Les injections intravertébroventriculaires
III. La radiothérapie à visée antalgique
IV. Les traitements co-analgésiques
IV.A. La cortisone
IV.B. Les biphosphonates
V. Les techniques non médicamenteuses
V.A. La neurostimulation transcutanée
V.B. L’hypnose
V.C. L’acupuncture
V.D. La kinésithérapie et le massage
V.E. La mésothérapie
V.F. L’auriculothérapie
V.G. La relaxation
V.H. La sophrologie
V.I. La thérapie cognitivo-comportementale
V.J. Les ateliers d’éducation thérapeutique des patients
Chapitre 3 : Etat des lieux dans le Sud-Manche
I. La prise en charge des cancers
I.A. La chirurgie
I.B. La radiothérapie
I.C. La chimiothérapie
I.D. Les soins de support
II. Les centres d’oncologie dans Le Sud-Manche
II.A. Le Centre Hospitalier Avranches-Granville : (D’après le Dr Bravard, oncopneumologue au Centre Hospitalier Avranches-Granville)
II.B. La polyclinique de La Baie : (D’après le Dr Pernin, oncologue à la polyclinique de La Baie)
II.C. II. C. Le dossier de liaison, un outil de communication régional
III. Les autres centres d’oncologies sollicités
III.A. Le Centre François Baclesse
III.B. Le Centre Eugène Marquis
IV. Les acteurs de la prise en charge de la douleur dans le cancer
IV.A. Le Plan Cancer 2014-2019 et la place des soins de support
IV.A.1. Assurer une orientation adéquate vers les soins de support pour tous les malades (Action 7.6 du plan Cancer 2014-2019)
IV.A.2. Améliorer l’accès aux soins de support de qualité (Action 7.7 du Plan Cancer 2014-2019)
IV.B. Le rôle du médecin généraliste
IV.B.1. Niveau 1 : Le médecin généraliste correspondant
IV.B.2. Niveau 2 : Le médecin généraliste « algovigilants »
IV.B.3. Niveau 3 : Les structures de prise en charge de la douleur
IV.C. Le rôle des centres oncologiques
Conclusion

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