Le diabète est un état d’hyperglycémie chronique lié à une carence absolue ou relative en insuline, en rapport avec des facteurs génétiques et ou environnementaux agissant souvent de concert. C’est une affection chronique, considérée aujourd’hui comme une véritable pandémie. D’après la Fédération Internationale du Diabète (FID), le nombre d’adultes atteints de diabète dans le monde est estimé à 366,2 millions. Parmi ceux-ci, 14,7 millions vivent en Afrique. Les experts de la FID prévoient 552 millions d’adultes atteints de diabète en 2030 [62]. En Afrique, la prévalence du diabète est en augmentation, atteignant ou dépassant celle trouvée dans les pays développés. L’Afrique a aussi la plus forte proportion de diabète non diagnostiqué estimée à au moins 78% [62]. Le diabète de type 1 représente 10% et survient de façon brutale dans un tableau d’acidocétose chez un sujet jeune généralement maigre. Le diabète de type 2 représente 90%. Il survient typiquement vers la quarantaine chez un sujet en surpoids avec des antécédents familiaux de diabète [26]. Sa prévalence augmente parallèlement au vieillissement, à l’urbanisation et à la sédentarisation de la population. A ces facteurs de risque s’ajoute le développement de l’obésité. Il s’agit d’une affection métabolique redoutable de par son évolution, le plus souvent insidieuse. Ceci conduit à un retard diagnostique pouvant dépasser 5 ans. Ceci a pour conséquence d’exposer les patients aux complications aigues métaboliques, mais aussi et surtout aux complications chroniques dégénératives nécessitant une prise en charge longue et onéreuse. Le diabète est exposé à des complications métaboliques et chroniques notamment cardiovasculaires ; des amputations et infectieuses. Ces dernières peuvent déséquiliber le diabete et augmentant la morbi mortalité. Le diabète est associé à un risque élevé d’infections surtout bactériennes. Ceci serait lié à l’effet néfaste de l’hyperglycémie sur l’immunité cellulaire.
DEFINITIONS
Le diabète sucré est une pathologie caractérisée par un état d’hyperglycémie chronique lié à une carence absolue ou relative en insuline, en rapport avec des facteurs génétiques et/ou environnementaux agissant souvent de concert [88]. La glycémie désigne le taux de glucose dans le sang. La glycémie à jeun normale est comprise entre 0,7 g/l et 1,10 g/l. Le diabète sucré correspond à un état d’hyperglycémie chronique dont le diagnostic est porté sur les critères édictés depuis 1998 par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) :
– Glycémie à jeun supérieure ou égale à 1,26 g/l à deux reprises. Le jeun étant défini par une absence d’apport calorique depuis au moins 8 heures.
– Signes cliniques d’hyperglycémie et découverte au hasard d’une glycémie supérieure ou égale à 2 g/l. Les symptômes de l’hyperglycémie sont des signes cardinaux classiques : polyurie, polydipsie et perte de poids inexpliquée souvent associée à une polyphagie [12].
– Glycémie à la deuxième heure d’HGPO supérieure ou égale à 2 g/l. Si l’hyperglycémie n’est pas flagrante dès le premier test, ces critères doivent être confirmés par un nouveau test.
Le diabète gestationnel correspond à un trouble de la tolérance glucidique apparaissant entre la 24ème et la 28ème semaine de la grossesse et disparaissant après l’accouchement. Son diagnostic doit être systématique et repose sur une glycémie supérieure à 1,80 à 60ème minute et à 1,53 g/l à la 120eme minute d’une épreuve d’HGPO avec 75g de glucose effectuée au 6ème mois de la grossesse. On parle d’hyperglycémie à jeun non diabétique lorsque la glycémie à jeun est comprise entre 1,10 g/l et 1,25 g/l. L’intolérance au glucose correspond à une glycémie à jeun comprise entre 1,40 g/l et 2 g/l à la deuxième heure de l’hyperglycémie provoquée par voie orale (HGPO).
CLASSIFICATION DU DIABETE SUCRE
La classification nosologique du diabète publiée en 1997 par un groupe d’experts sous la responsabilité de l’Association Américaine du Diabète (ADA) remplace celle élaborée en 1979 par le National Diabetes Data Group et entérinée par l’OMS [99]. Plusieurs mécanismes physiopathologiques distincts peuvent aboutir au syndrome biologique commun à tous types de diabète sucré : l’hyperglycémie. Ce sont ces entités physiopathologiques qui permettent de définir le type de diabète et non le mode de traitement, l’âge ou les circonstances de survenue (même s’il s’agit d’éléments d’orientation). Ainsi cette nouvelle classification répartit le diabète selon la pathogénie en 4 types.
– Diabète de type I : défini par une disparition profonde ou totale de l’insulinosécrétion endogène pancréatique par destruction auto-immune des cellules béta pancréatiques.
o Ia : auto-immum
o IIb : autre cause
– Diabète de type II : lié à un déficit relatif en insuline en rapport avec un trouble de l’insulino-sécrétion ou une anomalie de l’effet insulinique.
– le diabète gestationnel : il est défini comme une intolérance au glucose de sévérité variable survenant ou diagnostiquée pour la première fois pendant la grossesse, quel que soit le terme de cette grossesse, quel que soit le traitement nécessaire et l’évolution après l’accouchement. Le diagnostic est généralement fait entre la 24ème et 28ème SA (6ème mois) [57].
– les autres types de diabètes spécifiques plus rarement rencontrés que le type 1 et 2 correspondent à la catégorie appelée antérieurement « diabètes secondaires »[7].
o Défauts génétiques de la cellule bêta : « Maturity onset diabetes of the young » MODY : C’est une forme particulière de diabète de type 2 qui commence à un âge relativement jeune (25 ans) et qui est transmis comme un caractère autosomique dominant .
o Défauts génétiques dans l’action de l’insuline.
o Maladies du pancréas exocrine :
o Endocrinopathie qui s’accompagne d’une hypersécrétion hormonale et/ou inhibition de l’action ou de la sécrétion d’insuline .
EPIDEMIOLOGIE DU DIABETE
Le diabète pose un problème de santé publique car sa prévalence augmente parallèlement au vieillissement, à l’urbanisation, à la sédentarisation et au développement de l’obésité dans les populations des pays industrialisés. Mais cette maladie de pléthore n’épargne pas les pays sous-développés en raison d’une prédisposition héréditaire associée à une modification rapide du mode de vie caractérisée par l’urbanisation brutale allant de pair avec une sédentarisation accrue des populations. Il constitue la quatrième ou la cinquième cause de décès dans la plupart des pays à revenu élevé. De nombreuses données tendent aujourd’hui à prouver qu’il atteint des proportions épidémiques dans de nombreux pays en développement et récemment industrialisés. Le diabète est incontestablement un des problèmes de santé les plus compliqués de ce XXIe siècle.
Répartition géographique
Diabète dans le monde
Le diabète est un problème majeur de santé publique. L’OMS évoque une « véritable épidémie mondiale ». Le nombre de cas de diabète est passé de 30 millions en 1985 à 135 millions en 1995. Ce chiffre est passé de 177 millions en 2000 à 234 millions en 2003 [103]. En 2012, le nombre de sujets diabétiques dans le monde était estimé à 371 millions selon la FID. Selon les toutes dernières estimations, l’OMS suggèrent que 552 millions de personnes dans le monde seront diabétiques d’ici 2030 [62]. Le diabète de type 2 touche principalement 300 millions de personnes soit 6,6% de la population adulte [62]. Ce chiffre augmente de 7 millions chaque année. Aux États Unis, le diabète sucré est en expansion constante. Quinze millions de personnes, soit 8% de la population sont atteintes avec des différences selon l’ethnie. Les afro américains sont 1,7 fois plus susceptibles de développer le diabète de type 2 dont 10,8% d’entre eux qui sont atteints. Ce taux est de 10,2% chez les hispano américains, de 12% chez les amérindiens et de 50% chez l’indien Pima adulte en Arizona [105]. La prévalence varie aussi selon les groupes raciaux.
Elle est de 10% chez les noirs et 5,7% chez les blancs [35]. En Europe on estime à plus de 21 millions de diabétiques de type 2 avec une prévalence entre 2 et 4% .
Diabète en Afrique
L’Afrique n’échappe pas à cette augmentation de l’incidence du diabète sucré. On parle d’épidémie galopante pour le diabète de type 2. En 1901, Albert Cock, médecin missionnaire en Ouganda rapportait que « Le diabète est assez rare et très mortel ». Ce n’est qu’au début des années 60 que son existence a été affirmée. Par la suite, diverses études dans différents pays d’Afrique noir l’ont confirmé. Les données étaient basées sur des statistiques hospitalières. Les fréquences oscillaient entre 2 à 6% en milieu urbain .
En Afrique du nord, selon l’IDF édition 2012, un adulte sur 9 est atteint de diabète sucré avec une prévalence de 10,9% dont 52,9% des personnes diabétiques ne seraient pas diagnostiquées. En Afrique Sub-saharienne, le diabète était longtemps considéré comme une maladie rare. Pour les 20 prochaines années, l’Afrique sub-saharienne devrait enregistrer la plus forte augmentation mondiale du nombre de cas de diabète. Les prévalences actuellement observés en Afrique sub-saharienne laissent penser que la seule évolution démographique générera 9,5 millions de cas de diabète supplémentaires entre 2010 et 2030 [61, 44]. En 2013, 12,1 millions d’adultes étaient diabétiques dont 15% seulement ont été diagnostiqués. D’ici 2030, l’Afrique sub-saharienne devrait recenser 23,9 millions d’adultes atteints de diabète sucré .
Diabète au Sénégal
Au Sénégal nous ne disposons pas de données exactes sur la prévalence nationale, les statistiques proviennent d’études hospitalières. Payet trouvait déjà une fréquence de 1,1% en 1960 à Dakar [89]. Déjà en 1965, une étude réalisée en zone suburbaine de Dakar basée sur la glucosurie à jeun avait estimé à 1,73 % la prévalence globale du diabète sucré [21]; la glycosurie n’étant habituellement positive que pour des glycémies supérieures ou égales à 1,80 g/l, il est clair que beaucoup de cas de diabète n’aient pas été pris en compte lors de cette étude. Et curieusement, une autre étude basée sur la glycémie capillaire au hasard menée en 1996 a rapporté une prévalence de 0,75 % en milieu rural [83]. Le nombre limité des sujets de ces études et l’inadéquation des moyens diagnostiques permettent cependant d’affirmer que ces données sont sous-estimées. Au Centre antidiabétique Marc Sankalé de Dakar, référence nationale dans la prise en charge du diabète sucré, le nombre de nouveaux cas est passé de 200 par an entre 1980 et 1990 à plus de 2000 cas par an à partir de 2000[55]. Selon la FID, on compte actuellement au Sénégal 160110 cas de diabètes. Les statistiques hospitalières ont l’avantage de mieux mettre en évidence l’augmentation du nombre des diabétiques en service de médecine interne d’un CHU de Dakar [38] de 1,1% en 1957 elle passe à 4,4% en 1960 [91], à 6,96 % en 1979 [78] puis 8,56 % en 1984 [43]. Une étude réalisée en 1999 à l’hôpital principal de Dakar avait montré que le diabète est la première cause d’hospitalisation médicale d’adulte [78]. Une enquête sur les facteurs de risques cardiovasculaires chez 1424 sujets résidants à Saint-Louis du Sénégal, rapportait en 2010 une prévalence du diabète sucré de 10,4% ; bien loin des 1,73% retrouvés par Baylet et coll. [18] en zone ambulatoire à Dakar. A Guéoul, en zone semi-urbaine du Sénégal, une étude observationnelle, transversale, descriptive réalisée en décembre 2012 auprès de 1411 individus rapportait une prévalence de 7,2 % dont 5,4 % de cas connus et 1,8 % de cas nouvellement dépistés. Les autres facteurs de risque cardiovasculaire étaient une HTA dans 46,4%, une obésité dans 12,9%, une sédentarité dans 56,1%, la dyslipidémie dans 61,1% dont 59,5% de cas ignorée. Ainsi vraisemblablement le Sénégal comme les autres pays en voie de développement n’est nullement épargné par cette pandémie ; le diabète sucré dont la prévalence est en perpétuelle augmentation .
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Table des matières
INTRODUCTION
1. DEFINITIONS
2. CLASSIFICATION DU DIABETE SUCRE
3. EPIDEMIOLOGIE DU DIABETE
3.1. Répartition géographique
3.1.1. Diabète dans le monde
3.1.2. Diabète en Afrique
3.1.3. Diabète au Sénégal
3.2. Répartition selon l’âge et le sexe
4. AUTRES FACTEURS DE RISQUE
5. DIAGNOSTIC
5.1. Circonstances de découverte
5.1.1. . Découverte fortuite
5.1.2. Dépistage systématique
5.1.3. Dépistage dirigé
5.1.4. Manifestations cliniques
5.2. Critères Diagnostiques du Diabète sucré
6. PARAMETRES DE SURVEILLANCE DU DIABETE SUCRE
7. COMPLICATIONS
7.1. Complications infectieuses
7.2. Complications aiguës métaboliques
7.2.1. Acidocétose diabétique
7.2.2. Hyperosmolarité diabétique
7.2.3. Acidose lactique
7.2.4. Hypoglycémie
7.3. Complications chroniques
7.3.1. Micro angiopathie
7.3.1.1. Rétinopathie diabétique (RD)
7.3.1.2. Néphropathie diabétique (ND)
7.3.1.3. Neuropathie diabétique
7.3.2. Macroangiopathie
7.3.2.1. Hypertension artérielle (HTA)
7.3.2.2. Ischémie myocardique
7.3.2.3. Artérite des membres inférieurs
7.3.2.4. Accidents vasculaires cérébraux
7.4. Pied diabétique
8. PRISE EN CHARGE
8.1. Buts
8.2. Moyens
8.2.1. Les moyens non médicamenteux
8.2.2. Les moyens médicamenteux
8.2.3. Traitement médicamenteux des autres facteurs de risque
8.2.3.1. Les hypolipémiants
8.3. Modalités du traitement de l’hyperglycémie
8.3.1. Dans le diabète de type 1
8.3.2. Dans le diabète de type 2
CONCLUSION
